Depuis leur formidable victoire consistant à avoir réuni 17 millions de voix sur la peur de Sarkozy, ceux qui, par intérêt personnel ou par habitude, se définissent encore de gauche, nous offrent un spectacle affligeant fait de règlements de compte et de déclarations incantatoires sur la nécessité d’une « refondation ». Si les règlements de compte peuvent apparaître comme un mal nécessaire pour se débarrasser d’une personnalité de définitivement délirante, les premières tentatives de refondation doctrinale sont assez angoissantes dans ce qu’elles disent de l’état de décomposition intellectuelle de la gauche institutionnelle. Toutes les contributions lues ou entendues ces dernières semaines n'expriment qu’un total alignement idéologique sur les valeurs dominantes, une reddition doctrinale, une capitulation intellectuelle, un « munich politique ».
Les tenants de la "gauche moderne" semblent avoir totalement oublié que la dégelée du 6 mai s’inscrit dans une longue continuité, qui va de la débâcle de 1993 après Maastricht et la politique du Franc fort, à la gifle du 29 mai 2005 quand le « peuple de gauche » a massivement voté contre tout ce que ses élites avaient construit depuis 20 ans, en passant par l’humiliation du 21 avril 2002. Au lieu de faire une autocritique et d’ajuster leur doctrine à l’évolution du monde et de la société française, la gauche institutionnelle semble être revenue en 1988, à l’époque du centrisme triomphant, de l’européïsme béat, de la conversion aux charmes du capitalisme boursier et de la mondialisation heureuse, le « Ninisme » de l’époque étant simplement reformulé en un « et-et » qui promet une impossible synthèse entre efficacité économique et justice sociale, mondialisation et régulation, compétitivité et redistribution ou construction européenne et souveraineté nationale …
Le retour de cette pensée zéro est particulièrement éclatante dans le manifeste que « les Gracques » viennent de publier.
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