J’ai eu l’info hier par Julien, le Webmestre du site de campagne de JPC. Horizons est cité dans « Les Echos » de ce Week-End, dans un article curieusement intitulé "L'Elysée, via Francfort et Belfort" où un journaliste du Débat 2007 rend compte des réactions qui ont accompagné le ralliement de JPC dans la blogosphère.
Je ne vais pas raconter d’histoires. J’ai été très surpris et assez fier de voir ce site cité dans la presse nationale. En revanche, la phrase, que le journaliste a retenu m’embête un peu. C’était certainement la plus sévère parmi les quatre articles que j’ai publiés cette semaine sur le sujet. « Malakine, sur son blog Horizons, publie une série de billets pour exprimer son désarroi et accuser Chevènement d'avoir « rabaissé le combat républicain à une vulgaire quête de quelques postes pour assurer la survie d'un parti moribond »
Je dois être très clair sur ce point. Je n’ai jamais, ni pensé, ni écrit que le ralliement de JPC était motivé par des considérations partisanes. Je crois au contraire à la sincérité de sa stratégie de repositionnement et probablement à sa pertinence. Il a effectivement plus de chance d’influencer le contenu politique de Ségolène Royal en se présentant comme un allié et en en jouant la stratégie de la synthèse entre oui-ouistes, et nonistes, qu’en lui proposant une primaire à gauche qui aurait conduit à radicaliser les positions de chacun et donc à pousser Ségolène Royal à affirmer une plus grande adhésion à l’orientation actuelle de la construction européenne.
Ce que je lui reproche c’est d’avoir géré son ralliement de manière désastreuse. Non seulement, il y a perdu à titre personnel beaucoup de crédit en accréditant l’idée qu’il allait à la soupe, mais l’absence de toute mise en scène de l’accord politique l’a réduit dans l’opinion à ce que Ségolène avait dit devant le PSE ; une critique de l’Euro Fort.
Jean Pierre Chevènement est définitivement réfractaire aux règles du jeu de la vie politique moderne. Il est si pur et si « intello » qu’il est inapte à toute stratégie de communication ou de marketing politique. Quelque part c’est aussi pour cela qu’on l’aime. Il est difficile de lui en vouloir vraiment.
J’avais écrit après son premier meeting de campagne qu’il manquait à ses cotés une "passionaria". A l’annonce de sa candidature, j’avais émis le vœu en fin d’article que Ségolène Royal décide de « combler sa vacuité doctrinale en adoptant le logiciel chevènementiste après un ralliement fort opportun » Sur le papier, une véritable alliance entre Ségolène Royal et Jean Pierre Chevènement est effectivement la meilleure configuration que le mouvement républicain peut espérer. Je suis néanmoins sceptique et tient à en appeler à la lucidité tous ceux qui croient qu’une telle alliance s’est nouée le week-end dernier.
Jacques André ma demandé hier par mail (1) si je pensais toujours que "Ségolène était toujours la candidate du vide" (d'après Todd) depuis qu'elle s'est ralliée aux thèses de JPC ? » Je ne sais pas ce qui veut réellement permettre d’affirmer cela à l’heure actuelle. Tout dépend d’ailleurs ce que l’on entend par les thèses des JPC. Si c’est son discours d’ordre, il n’y a pas de problème. Je pense qu’ils sont en phase sur ce point, mais c’est bien ça qui m’inquiète. Je ne voudrais pas que la convergence se limite à la question du rapport à l’autorité. Il y a aujourd’hui un consensus à droite comme à gauche pour tourner la page du libertarisme soixanthuitard. Ce n’est pas cela qui me semblait le plus intéressant dans la candidature Chevènement, mais son discours sur l’Europe et sa critique du principe même de la mondialisation. Sur ce point, j’attends des signes de conversion de la part de Ségolène. Pour l’instant, je n’ai rien entendu.
Le positionnement de Ségolène Royal me rend d’ailleurs foncièrement pessimiste sur sa capacité à porter un jour une telle ligne politique. Sa campagne, qui vise avant tout à s’ériger en figure d’incarnation est peut-être redoutablement efficace pour être élue dans le monde médiatique d’aujourd’hui, mais elle s’avèrera totalement inopérante pour gouverner. Une campagne sert aussi à légitimer l’action future. Et je pose la question : Si la campagne continue ainsi, quelles réformes la nouvelle présidente sera t-elle mandatée pour conduire ? Rien ! Si elle est élue sur le seul fondement de son image, la technostructure conservera les pleins pouvoirs, et continuera la même politique. La nouvelle présidence sera réduite à un magistère de la parole. En cela, OUI, Ségolène Royal est toujours la candidate du vide.
A titre personnel, je me fiche complètement que la Gauche repasse si c’est pour refaire du Bérégovoy ou du Jospin. Je ne soutiendrais pas Ségolène Royal juste pour « faire barrage » à Sarkozy ou à Le Pen. Gagner pour gagner, ce n’est pas la conception que je me fais du combat politique. Je voterais peut-être pour elle à titre individuel, mais il est hors de question de participer à ce phénomène d’hypnose générale où chacun veut voir en Sainte Ségolène le réceptacle à tous ces espoirs et à tous ces désirs.
On ne pourra opérer après 2007 une vraie réorientation de l’ordre économique que si nouveau président est élu sur la base d’un mandat clair et puissant du peuple français. L’expression de l’opinion et l’adhésion de la classe dirigeante à la volonté populaire ne se fera qu’en livrant le combat des idées.
Je suis persuadé que la critique de la mondialisation libre-échangiste et le protectionnisme européen sont des idées aujourd’hui majoritaires. J’ai même indiqué des sondages (2) qui le démontraient clairement. Malheureusement, la campagne avortée de JPC a eu si peu d’impact qu’elle n’a pas permis de faire émerger ces idées dans le débat public.
Jean Pierre Chevènement continue de s'y employer. Ses soutiens doivent continuer à relayer ces idées, et surtout ne pas s’endormir en pensant que la future présidente est d’ores et déjà « chevènementisée » On aura gagné le jour où la contestation de la mondialisation sera au centre du débat, et où la création d’un marché intérieur européen soutenu par des politiques keynésiennes apparaîtra comme la seule alternative raisonnable.
Le rapprochement de Jean Pierre Chevènement et de Ségolène Royal, n’est, en soi, en aucun cas une victoire. C’est au mieux une opportunité. Le vrai combat n’a même pas encore commencé.
1- A ce propos, n’hésitez pas à m’écrire. Je sens que beaucoup n’osent pas poster des commentaires, mais tout de même besoin de vos retours et de vos réactions qu’il s’agisse de critique, conseils ou encouragements.
2- Je fais référence ici aux sondages cités dans l’article sur le sondage du CEVIPOF qui indique que 40 % souhaitent une plus grande protection économique contre 33 % qui pensent qu’elle doit plus s’ouvrir, et dans le manifeste du néo-républicanisme qui indique que 72 % des français perçoivent la mondialisation comme une menace et que la France est à l’avant garde d’un mouvement de rejet qui monte dans l’Europe toute entière.
Chevènement, et après ?
d'abord, bravo pour votre blog que j'apprécie beaucoup (pourquoi ne pas faire une sorte de livre d'or pour noter les appréciations et suggestions globales concernant votre blog ?)
Etant sensible comme vous paraissez l'être aux thêmes concernant la mondialisation, pour qui voter au premier tour, après le retrait de JPC ?
Sauf nouvelles candidatures, 3 candidats reprennent ce thême à leur manière, à savoir O Besancenot, MG Buffet, N Dupont Aignan (j'écarte le Pen et de Villiers pour d'autres raisons). Lequel vous paraît le plus acceptable (en politique, personne ne peut correspondre parfaitement à ses aspirations, il faut faire le moins mauvais choix )
Merci de votre avis,
Cordialement
Rédigé par : marc.sevres | 16 décembre 2006 à 17:25
Si marc cite Besancenot pourquoi ds ce cas éliminer arlette?
L'une comme l'autre sont pour moi a disqualifier d'office compte tenu du caractére iréaliste de nbre de leur propositions.
Ils ne peuvent être mis en perspective avec les propositions de Chevènement, qui elles sont le produit d'une articulation censée et réaliste entre la critique et les réalités économiques, politiques et sociales du moment.
Dupont Aignan est plus interressant, mais celon moi présente une limite difficile à dépasser, à savoir que ses propositions et analyses m'apparaissent plus tournées vers le passé que orientées vers l'avenir. En ce sens il n'apparait pas comme un renouveau, mais plus comme un retour en arrière.
Chevènement lui portait cette double articulation réaliste et prospective qui fait défaut aux autres candidats cités par Marc.
Pour moi ils représenteraient un choix par défaut et élimination, pas un choix d'adhésion et d'approbation.
Si Ségolène Royale est capable de continuer à prendre en compte (accord PS MRC) et a proposer (cela reste à faire) et ensuite, si elle est élue, a mettre en oeuvre une politique de réorientation de la construction européenne (tout est en suspension, j'en convient), est à ce jour la candidate la plus en phase avec les idées et le programme de JPC.
Les conséquences électorales qui en découlent sont sans équivoques.
Bien sûr chacun reste libre de son vote.
Pierre
Rédigé par : chavinier | 17 décembre 2006 à 10:55
Je voterai pour le candidat de gauche qui, le moment venu, me paraîtra le plus à même de penser et d’agir contre la concurrence toujours accrue entre les travailleurs, contre l’emprise croissante de la marchandisation, contre la répartition injuste de la richesse en France, en Europe et dans le monde.
Je ne doute pas que Ségolène Royal ait les qualités necéssaires pour s’attaquer aux conséquences (c'est à dire améliorer les petites choses du quotidien, ce qu'il faut faire bien entendu). Mais pour l’instant je reste sceptique sur sa capacité et sur sa volonté de s'en prendre aux causes de ces évolutions globales (or soigner les maux sans s'attaquer aux causes, c'est se condamner à souffrir toujours).
Particulièrement, je n’ai pas été convaincu, jusqu’à présent, qu’elle soit déterminée à faire de l’Union européenne non plus un but en soi mais un instrument efficace et puissant, y compris en matière sociale et fiscale. Il faudrait pour cela qu’elle oublie le choeur ouiste (qui jour pianissimo ces temps-ci, ça nous change) et propose un réformisme ambitieux !
Je voterai pour Ségolène Royal si elle est la meilleure candidate de gauche (le choix hélas ! est réduit). Elle a montré un talent tactique, du sens critique, la faculté de se fabriquer une image (fût-elle éloignée de la réalité). C'est beaucoup mais pas suffisant. Il lui reste encore à prendre pas mal de hauteur pour traiter non plus seulement les conséquences mais surtout les causes, et nous indiquer (en s'engageant formellement) comment elle entend s’y prendre.
Rédigé par : Playtime | 17 décembre 2006 à 21:45
@marc
Pour le livre d'or, certainement pas ! Je ne cours pas après les éloges publiques. Si ce que j'écris plaît tant mieux, mais ce n'est pas le but. Le but c'est de contribuer à faire vivre un courant de pensée sur le net et de ce blog un lieux d'échanges et de rencontres. Horizons sera un succès quand ses lecteurs débattrons entre eux à la suite de mes articles.
En ce qui concerne le premier tour, je n'en sais encore rien. 5 mois nous séparent du vote. C'est long, très long ...
@pierre : je partage ton soucis du vote réaliste. Protester pour s'émouvoir ce n'est pas mon truc, sinon je n'aurais pas appelé mon blog "horizons". NDA pourquoi pas, mais je voterais certainement pour celui qui saura le mieux se projeter dans l'avenir, et surtout, pour celui qui reprendra le plus à son compte les idées de Todd. Ca ne me gênera pas, s'il est de "droite"
@ playtime : j'ai assez dit ce que je pensais de SR. Je crains qu'elle ne soit qu'une femme de paille et que derrière elle se cache l'appareil du PS, en l'espèce son homme. Donc je refuse de céder à l'hypnose ambiante et de succomber à son charme. L'esprit républicain est dans l'esprit critique, avant tout.
Rédigé par : Malakine | 18 décembre 2006 à 22:23
Pour voter Ségoléne et ce malgré le ralliement de JPC, j'attends qu'elle se prononce sur les éléments que tu as cités dans ce post. A titre individuel, je ne voterais pour elle que si elle évoque (en se positionnant à gauche)la précarité, le chômage de masse, la mondialisation libérale et cherche à lutter contre ces fléaux ou du moins à prendre conscience qu'il faut une politique novatrice et à long terme pour les français! Je suis allé sur désirs d'avenir et pour l'instant je ne vois que méthode coué et vacuité (aucune politique réellement applicable, on reste dans l'incantation!)
Malakine, ton blog est admirable et mérite d'avoir été cité dans les échos. Tes articles sont tellement complet qu'il faut se concentrer comme quand on lit un livre complexe(ce qui est rare dans la blogosphére).
Continue ton travail, il est salutaire de lucidité et d'engagement!
Rédigé par : Chevillette | 23 décembre 2006 à 18:16