Surfant une fois de plus sur la vague d’émotion qui a accompagné l’affaire du petit Enis, le super président Sarkozy a immédiatement tenu une conférence de presse pour annoncer un renforcement de la lutte contre les pédophiles récidivistes. Le même jour, il avait réuni deux autres réunions interministérielles, l’une sur la croissance avec les calamiteuses statistiques économiques publiées cet été, l’autre sur l’immigration, mais curieusement, sur ces deux thèmes là, il n’avait aucune mesure fracassante à annoncer ...
Quand le système judiciaire dysfonctionne avec autant de force et de constance que dans cette affaire, il semble difficile de contredire le président dans son souci de durcir les règles. Le seul risque qu’il encoure c’est qu’on le trouve encore trop mou. "Castration chimique ?" Mais pourquoi chimique se demande le petit peuple Sarkozyste épris d’ordre et de sévérité. "Il n’y a qu’à leur couper les couilles, et puis c’est tout" (1)!
Les annonces présidentielles, pour consensuelles qu’elles soient, posent néanmoins beaucoup de questions ; la question des moyens à disposition de la Justice pour rendre ces mesures effectives, mais surtout celle de la nature de la sanction pénale. Face aux dysfonctionnements de l'institution judiciaire, Sarkozy propose rien de moins que de lui adjoindre un deuxième système destiné à protéger la société contre la dangerosité des détenus ayant purgé leur peine. Distinguer ainsi "l’exécution de la peine" et les "mesures de sûreté" ouvre sur un système assez inquiétant de double peine où se succéderait une sanction pénale dans le cadre du système judiciaire actuel et une mesure de rétention administrative pour dangerosité persistante dans le cadre du nouveau dispositif anti-pédophiles.
Cette affaire pose en fait la question du rôle de la prison et du sens de la sanction pénale. Entre fonction punitive, rééducation, préparation à la réinsertion, et neutralisation des individus dangereux, on ne sait plus bien quel est son rôle. Sarkozy, loin de répondre à cette question fondamentale, vient d'inventer le système le plus dangereux et arbitraire qui soit. Il vient de ressusciter les lettres de cachet pour pouvoir maintenir un individu sous les verrous sans procés, sans délit, juste en raison de la peur qu'il inspire.
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