On se plaît souvent à décrier la France, la ringardise de ses valeurs, sa réticence devant les grandes évolutions du monde ou son isolement sur la scène internationale. Le Week-End dernier a illustré cette thèse avec le scandaleux sommet de Madrid qui a réuni sans la France les 18 pays européens ayant voté le TCE. Mais il a été marqué par un autre évènement qui a infligé un cinglant démenti à ces thèses déclinistes : l'élection de Michel Platini à la tête de l'UEFA. On m’objectera qu’il s’agit de sport et non de politique. Pas si sûr ...
Le monde du football moderne est tellement empreint de considérations économiques que sa gestion en devient quelque chose d’éminemment politique. De plus, on l’a vu avec l’attribution des JO de 2012 ou même lors de tous les concours de l’Eurovision, les votes dans les instances internationales reposent toujours en grande part sur des considérations géopolitiques.
L'élection de Platini s'est bel est bien faite autour d'un discours très politique et de valeurs très « françaises » pour ne pas dire républicaines. Son programme était en effet construit autour de l'idée de démocratisation de l’institution, d'égalité, de redistribution en direction des petits clubs ou fédérations, de défense contre la main mise des intérêts financiers et la privatisation des compétitions, de luttes contre la corruption et le racisme, et même d’une demande d’une « exception sportive » à la commission européenne pour la libérer de règles trop libérales. Des valeurs résumées dans cette magnifique phrase : "Le football est un jeu avant d'être un produit, un sport avant d'être un marché, un spectacle avant d'être un business"
Transformez dans le discours les mots « football » par « économie », « sport » par « travail », « spectacle » par « prospérité » et vous arrivez à une discours qu’on n’espère même plus entendre dans le discours politique : L’économie doit être au service du travail et de l’épanouissement humain, avant d’être une source de profits pour les grands groupes capitalistes. Elle doit être contrôlée et dirigée par des instances démocratiques et non pas monopolisée par l’oligarchie des puissants. Les principes de concurrence et de liberté de circulations ne doivent pas aboutir à piller les économies nationales …
Plutôt sympathique non ?
Mais ce qui est le plus intéressant encore, c’est que Platini s’est appuyé non pas sur les grandes nations acquises à la cause commerciale, mais sur les petites fédérations et notamment des républiques de l’ancien bloc de l’Est.
Une leçon à méditer pour la relance de la construction européenne …
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