Mon billet d’hier posait la question de l’utilité sociale des inégalités qui ont explosé au cours de la dernière décennie pour conclure naturellement au caractère parasitaire des hyper riches. Voyons aujourd’hui comment ramener à la réalité nos classes dirigeantes au moyen de mesures fiscales dissuasives. Puisque la question de la fiscalité pesant sur les plus riches est dans le débat, ouvre le, mais ouvrons le complètement !
Autrefois, le débat fiscal était simple. Il portait essentiellement sur le taux marginal de l’impôt sur le revenu ou l’existence d’un impôt sur les grandes fortunes. Aujourd’hui, entre le bouclier fiscal, à 60 ou 50%, les niches fiscales plafonnées ou non, l’ISF plus ou moins assoupli, les droits de succession que l’on en finit plus de supprimer, sans parler de nouvelles notions qui émergent comme l’impôt plancher ou le revenu maximum, il est difficile d’y voir clair.
Tentons donc de donner du contenu à la perspective qui effrayait tant Alain Minc dans sa tribune commentée hier, celle qui pourrait conduire à la disparition pure et simple des profiteurs du capitalisme financiers en tant que classe sociale.
Le mini-programme fiscal qui suit ne cherche pas à jouer sur les symboles autour d’une mesure de faible portée comme aime tant à le faire les oppositions parlementaire. Il vise à en finir définitivement avec ces privilégiés qu’Alain Minc qualifie de « classe dirigeante » et Emmanuel Todd de « classe dérivante » Quelque soit l’épithète choisi, nous parlons ici, de ceux qui ont mis en place en deux décennies pour leur plus grand profit, le système politique, économique, idéologique et fiscal que nous connaissons aujourd’hui. L’échec étant patent, il n’y a plus aucune raison de laisser se perpétuer les avantages qu’ils se sont arrogés.
Transférer la fiscalité du patrimoine sur les successions
Ce programme commence par une concession de taille qui fera plaisir à la droite : La suppression de l’ISF, car sur le plan des principes il est quelque peu aberrant de taxer un patrimoine pour le seul motif que le marché lui a fait prendre de la valeur. Cette concession permet en revanche de s’attaquer à deux de ses conséquences bien plus intéressantes en terme de justice fiscale.
L’ISF supprimé, le bouclier fiscal n’a plus lieu d’être. Par ailleurs, si l’on ne taxe plus le patrimoine au cours de l’existence pour ne plus taxer que les revenus, il apparaît possible et souhaitable de le taxer en fin de vie par une restauration de droits de successions conséquents.
Les successions sont un vecteur de reproduction sociale qui nourrit l’autonomisation des classes supérieures dans la logique de reconstitution d’une aristocratie financière héréditaire. Il convient donc de briser avec force cette reproduction des inégalités, ce qu’aucun vrai libéral ne contestera.
En outre, avec l’allongement de la durée de la vie, l’âge moyen de la transmission des patrimoines s’établit à 52 ans et ne va que progresser au fil du temps. L’héritage a perdu toute fonction sociale. Il n’y a aucun sens à organiser un transfert de richesse conséquent au profit des seniors, qui disposent déjà des meilleurs revenus et de l’essentiel du patrimoine, mais qui partent en retraite sans avoir provisionné les coûts que leur importance numérique fera subir aux systèmes sociaux. Il est donc essentiel de revenir sur la suppression des droits de successions pour taxer fortement les donations et les successions, au moyen d’un barème fortement progressif. Ces ressources nouvelles seront précieuses pour le financement de la retraite par répartition et aux autres dépenses liées au vieillissement (santé, dépendance)
Rétablir la progressivité de l’impôt sur le revenu
Le taux marginal supérieur de l’impôt sur le revenu n’a fait que décroître depuis 30 ans, passant de 65 % en 1986 à 40 % aujourd’hui. Certains économistes, tels Thomas Piketty ou Frédéric Lordon proposent de remonter ce taux à 80 ou 90 % pour les très hauts revenus. Seule une telle mesure permettra d’endiguer l’inflation salariale des dirigeants et des apprentis sorciers de la finance folle.
Naturellement, ce taux doit être effectif. Il ne saurait être question de laisser subsister des niches fiscales qui permettent de ramener concrètement le taux d’imposition à presque rien. Une niche fiscale c’est une solution de facilité pour l’Etat pour diriger l’épargne vers un secteur particulier, les DOM-TOM ou l’immobilier locatif. Cela revient à une aide d’Etat, mais qui s’effectue de manière invisible et spontanée. A la différence près, que l'heureux contribuable, non seulement ne contribue pas à l’impôt à proportion de ses revenus, mais tire bénéfice de son investissement. Il faut mettre en terme à cette technique de financement pour transformer toutes les dépenses fiscales en vraies dépenses budgétaires.
Se pose enfin la question du revenu maximum. A priori, la proposition est redondante avec le relèvement du taux marginal de l’impôt sur le revenu. Pourquoi verser des salaires dépassant l’entendement si les trois quarts finiront au trésor public ? Néanmoins, deux précautions valent mieux qu’une. La mesure aurait l’avantage de fixer un plafond symbolique aux inégalités salariales. Plutôt que de passer par la loi, ce qui aurait l’inconvénient de légitimer des inégalités, déjà délirantes, de 1 à 100 ou 1 à 200, il serait préférable de laisser les conseils d’administration arrêter eux même ce ratio en toute transparence.
Et y intégrer les revenus du capital
Les revenus du patrimoine sont aujourd’hui très partiellement taxés. 80% échappent à tout impôt selon Th. Piketty. De plus, ils le sont désormais de manière forfaitaire à un niveau bien inférieur au taux marginal supérieur de l’impôt sur le revenu. La solution la plus simple serait de les inclure dans l’assiette des revenus soumis à l’impôt progressif, quelle que soit leur origine (revenus du travail, dividendes, plus values, loyers…)
Bien évidemment, la rémunération sous forme de stock-options devra être supprimée ou réservée aux petites entreprises, conformément à l’esprit initial de ce dispositif qui avait pour objet d’assurer une rémunération motivantes aux dirigeants des start-up.
Les stocks options ont depuis été dévoyées. Elle assurent non seulement des rémunérations indécentes aux dirigeants des grands groupes, mais surtout – et c’est leur principal vice – elles alignent leurs intérêts sur ceux des actionnaires. Ce mode de rémunération est ainsi un instrument puissant de propagation de ce capitalisme actionnarial qui réduit la vocation des entreprises à créer de la valeur pour l’actionnaire, au détriment des salaires, de l’emploi et de l’investissement.
Le faux problème de l’évasion fiscale
On objectera que ce programme organisera une fuite massive des capitaux et des talents à l’étranger. La parade est simple. Il suffit d’adopter le système de l’impôt-citoyen en vigueur aux Etats-Unis, qui oblige tout citoyen résident à l’étranger à payer la différence entre l’impôt payé dans son pays de résidence et ce qu’il devrait payer dans son pays d’origine. Les récalcitrants se verraient alors déchus de leur nationalité et les fraudeurs, frappés d'une mesure d’interdiction de séjour sur le territoire national. Cela devrait dissuader nombres de candidats à l'évasion fiscale !
La question qui vient immédiatement à l'esprit c'est que tout cela est bien joli mais comment le met-on en pratique ?
En fait, je crois que la réponse est donnée dans l'image au début de cet excellent billet.
Comme j'ai déjà eu l'occasion de l'écrire il y a quelques temps, je suis pour le principe du Salaire Maximum. Il me semble qu'il y a une symbolique qui va au delà des chiffres. Cela signifie que l'on reconnait que, quelque soient les talents supposés d'un individu, il ne pourra pas en abuser pour accaparer des richesses qui feront défaut à d'autres moins chanceux.
Rédigé par : RST | 24 mars 2009 à 21:35
@ RST et Malakine
Je suis du même avis, je partage l'idée d'un salaire maximum inspiré des travaux du MAUSS et d'Alain Caillé... cette idée d'illimitation dans les revenus, cet avaritia (amour immodéré de l'avoir selon St Thomas d'Aquin) n'est pas compatible avec l'idée d'alterdéveloppement.
Rédigé par : René Jacquot | 24 mars 2009 à 21:59
J'adore cette idée de déchoir les évadés fiscaux de leur nationalité. C'est d'une symbolique fantastique. Rêvons...
Question bête : on devient quoi sans nationalité ?
Rédigé par : Bouboune | 24 mars 2009 à 22:26
Un apatride!
Rédigé par : ETDAS | 24 mars 2009 à 22:52
@Malakine
L'héritage est effectivement un des piliers de la création d'inégalité colossale. Mais ce dernier ne prend pas qu'une apparence monétaire ou capitalistique, l'héritage est aussi culturel et relationnel et contre çà il n'y a pas de mécanisme publique 100% efficace. Tout juste peut on minimiser les inégalités par l'instruction, enfin si on ne laissez pas l'instruction publique tombé comme on le fait. A ce propos il parait que le dernier film avec Adjani, La journée de la jupe, cassant les tabous sur l'école a fait un tabac si quelqu'un l'a vue il pourrait nous donner son avis.
Pour en revenir à ce débat je vais faire mon monomanique et reparler de la monnaie fondante. Une monnaie avec une durée de vie limiter c'est encore mieux que le salaire maximum. Ici l'accumulation n'est plus possible on tue dans l'œuf toute possibilité d'accumulation de l'argent pour de l'argent. Et on restitue à la monnaie sa vrai fonction l'échange. Je suis de plus en plus intrigué par les possibilités des monnaies fondantes de Silvio Gesell :http://fr.wikisource.org/wiki/Silvio_Gesell_:_un_pr%C3%A9d%C3%A9cesseur_de_Keynes
Elles ont des effets correcteurs extrêmement puissant sans avoir besoin de grosse bureaucratie pour les faire fonctionner. Et étant un adepte de la théorie du rasoir d’Ockham (la solution la plus simple est souvent la meilleur) je pense qu'il vaut mieux une réflexion sur le comment éviter le problème d'accumulation sans avoir à passer par une usine à gaz législative.
Sinon le salaire maximum dont parle RST est aussi une solution assez simple à mettre en pratique. Dans les œuvres de Paul Bairoch j'avais lu quelque part que le Danemark s'y été essayé avec un gros succès, mais que cela avait été abandonné avec la révolution néoféodaliste des années 80(je n'utilise plus le terme néolibérale) . Il faudrait voir si il y a des textes et des études sur le sujet pour voir les effets à long terme.
Rédigé par : yann | 24 mars 2009 à 23:12
@ René
Comme j'ai eu l'occasion de le dire sur le CGB Régis Debray est à Arrêt sur image ici (je ne l'ai pas encore visionné) http://www.arretsurimages.net/contenu.php?id=1800
Il faut être abonné. Si tu ne l'es pas déjà et que tu es intéressé , je me ferai un plaisir de te faire bénéficier du mois gratuit que je peux offrir à un ami.
Rédigé par : RST | 24 mars 2009 à 23:18
@ RST
Je ne me pose plus la question de l'alternative, car le diagnostic est sans issue. Si je faisais ça, je passerais mon temps à ironiser sur la situation du PS et il y a mieux à faire. Comme je viens de l'écrire, les politiques suivent l'opinion, et l'opinion ne sait pas encore quoi revendiquer de concret. On l'a bien vu lors de la deuxième grande grève. Alors, j'essaie de l'aider en proposant quelques pistes concrètes...
Sinon, pour répondre à ta question, il me semble que l'alternative ça s'appelle la lutte des classes. Tu te souviens ce que Todd disait dans son dernier bouquin ? Les luttes des classes c'est toujours la classe moyenne supérieure qui s'en prend aux classes supérieures. Ben, on y est.
@ René Jacquot
Comme je l'écris dans le papier, c'est une mesure redondante avec la hausse du taux marginal d'imposition. Seule ce serait juste une mesure symbolique qui ne concernerait pas grand monde et qui n'aurait aucun effet macroéconomique.
@ Bouboune
Les oligarques (Depuis la tribune de Minc, on peut les appeler comme ça) sont des élites mondialisées, donc déjà des apatrides. Leur patrie c'est le monde et leur capitale New York. Seules leurs racines sont en France.
Je repense à cette tribune de Minc. Avec le recul, il y a quelque chose qui m'apparait comme une évidence ce soir et que je n'ai pas vu hier. J'ai senti que ce texte était majeur, mais je n'ai pas tout de suite compris en quoi. Il a fait appel à une conscience de classe chez ses amis. Se faisant, il a donné le départ de la lutte des classes.
Rédigé par : Malakine | 24 mars 2009 à 23:22
@ Yann
Non mais il ne faut même pas essayer de lutter contre l'héritage intellectuel et culturel. Au contraire, il faut dire que le véritable héritage c'est celui là et non pas l'héritage monétaire.
Monnaie fondante ... hum. Bon, je réfléchirais la dessus. En ce moment je suis dans la trappe intellectuelle de la contradiction entre relance par la demande et épuisement des ressources naturelles. Je suis en train d'étudier les thèses des "décroissants" Chaque chose en son temps.
@ RST
J'ai acheté le dernier bouquin de Debray, mais c'est pas facile à lire ! :-( Je m'y remettrais quand j'aurais fini ma série sur les décroissants.
@ René Jacquot
Tu le publies quand au fait le texte de 1989 sur démocrate et républicains ? Je ne l'ai pas vu passer ...
Rédigé par : Malakine | 24 mars 2009 à 23:29
@Malakine
Tu fais bien de parler de la contradiction entre les thèses écologiques sérieuses et les politiques progressistes car il y a effectivement un vrai problème. Pour ma part je considère que la seul critique véritable du keynésianisme et des politiques de régulation du capitalisme sont effectivement les thèses de la décroissance. Il y a comme qui dirait, une contradiction fatale à relancer la consommation tout en sachant les limites qui s'imposent à l'humanité. Et pourtant nous savons que le seul moyen en régime capitaliste, d'avoir le plein emploi et une cohérence sociale c'est d'avoir de la croissance, c'est un problème de quadrature du cercle.
Sinon il nous reste toujours les expéditions spatiales... mais ce n'est pas demain qu'on exploitera les ressources flottant dans l'espace.
Rédigé par : yann | 24 mars 2009 à 23:39
@ Malakine
« La lutte des classes existe et c’est la mienne qui est en train de la gagner » La formule est de Warren Buffet et il semble qu’il l’ait prononcée il y a déjà un certain temps ! A vrai dire cette lutte n’a jamais cessé depuis le début des années quatre vingt, mais elle portait alors le masque du consensus politique.
Ce consensus est né de l’erreur historique (et mortelle) des classes moyennes, qui ont joué l’alliance avec les classes dominantes en se ralliant aux dogmes de la mondialisation libérale et de ses différents leviers (l’Europe du libre échange en particuliers). Les classes moyennes ont cru longtemps que les nécessaires efforts d’adaptation pour se fondre dans ce nouveau paradigme ne concerneraient que les classes populaires, lesquelles pour l’occasion ont été délibérément lâchées par tout le monde (j’ai plutôt envie de dire mises à la casse). Effet d’aubaine, ces classes défavorisées se sont mises à voter pour l’extrême droite, ce qui a soulagé d’autant la bonne conscience des auteurs du forfait.
Donc, plutôt qu’une déclaration de guerre, laquelle fait rage depuis belle lurette, je vois dans le texte de Monsieur Minc une clarification sur la nouvelle stratégie des classes dominantes. Désormais, elles tombent le masque, et clament haut et fort qu’elles entendent bien tirer leur épingle du jeu en se passant de toutes les autres, et contre elles au besoin. Les classes moyennes achèveront donc leur douloureuse prise de conscience entamée depuis une dizaine d’année et qui n’a plus d’équivoque depuis le début de la crise financière : ce monde qu’elles ont largement contribué à édifier n’a désormais pas plus besoin d’elles que des plus pauvres.
Rédigé par : Elisa Derdsenian | 25 mars 2009 à 00:42
Pour l'évasion fiscale, on peut observer que c'est bien parce que les grands pays sont d'accord qu'il y en a. En effet, chaque paradis fiscal a son protecteur et serait bien en peine si ce dernier se fâchait un temps soit peu.
Rédigé par : jean_ | 25 mars 2009 à 02:50
Le 26 février 1794 (8 ventôse an II), puis le 3 mars 1794 (13 ventôse an II), Saint Just présente à la Convention deux rapports sur les pauvres. Après chacun de ces deux rapports, la Convention vote deux décrets historiques. On les appelle « les Décrets de ventôse ».
Dans son rapport du 26 février 1794, Saint Just prononce des grandes phrases : « La révolution nous conduit à reconnaître ce principe, que celui qui s’est montré l’ennemi de son pays n’y peut être propriétaire. Il faut encore quelques coups de génie pour nous sauver. Serait-ce donc pour ménager des jouissances à ses tyrans que le peuple verse son sang sur les frontières, et que toutes les familles portent le deuil de leurs enfants ? Vous reconnaitrez ce principe, que celui-là seul a des droits dans notre patrie qui a coopéré à l’affranchir. Abolissez la mendicité, qui déshonore un état libre ; les propriétés des patriotes sont sacrées, mais les biens des conspirateurs sont là pour tous les malheureux. Les malheureux sont les puissances de la terre ; ils ont le droit de parler en maîtres aux gouvernements qui les négligent. »
Aussitôt, la Convention adopte à l’unanimité le premier Décret de ventôse. Il ordonne la confiscation des biens des ennemis de la révolution. Je veux citer ce premier Décret de ventôse. Il le mérite !
« Article 1 : Le comité de sûreté générale est investi du pouvoir de mettre en liberté les patriotes détenus. Toute personne qui réclamera sa liberté rendra compte de sa conduite depuis le 1er mai 1789.
Article 2 : Les propriétés des patriotes sont inviolables et sacrées. Les biens des personnes reconnues ennemies de la révolution seront séquestrés au profit de la République ; ces personnes seront détenues jusqu’à la paix, et bannies ensuite à perpétuité.
Article 3 : Le rapport, ainsi que le présent décret, seront imprimés, et envoyés sur le champ par des courriers extraordinaires aux départements, aux armées et aux sociétés populaires. »
Dans son rapport du 3 mars 1794, Saint Just prononce la phrase : « Le bonheur est une idée neuve en Europe ! » Son objectif est de répartir entre tous les pauvres les biens confisqués aux ennemis de la Révolution. Aussitôt, la Convention vote le second Décret de ventôse. Il ordonne à toutes les communes de France de recenser les indigents.
Je veux citer le second Décret de ventôse. Il le mérite !
« Article 1 : Toutes les communes de la République dresseront un état des patriotes indigents qu’elles renferment, avec leur nom, leur âge, leur profession, le nombre et l’âge de leurs enfants. Les directoires de district feront parvenir, dans le plus bref délai, ces états au comité de salut public.
Article 2 : Lorsque le comité de salut public aura reçu ces états, il fera un rapport sur les moyens d’indemniser tous les malheureux, avec le bien des ennemis de la révolution, selon le tableau que le comité de sûreté générale lui en aura présenté, et qui sera rendu public.
Article 3 : En conséquence, le comité de sûreté générale donnera des ordres précis à tous les comités de surveillance de la République, pour que, dans un délai qu’il fixera à chaque district, selon son éloignement, ces comités lui fassent passer respectivement les noms, la conduite de tous les détenus depuis le 1er mai 1789. Il en sera de même de ceux qui seront détenus par la suite.
Article 4 : le comité de sûreté générale joindra une instruction au présent décret pour en faciliter l’exécution. »
Les Décrets de ventôse ne seront jamais appliqués. Moins de cinq mois plus tard, la Convention enverra Robespierre, Couthon, Saint-Just et Lebas à la guillotine. Elle basculera vers la droite. Ce sera la réaction thermidorienne. Le 1er novembre 1794 (11 brumaire an III), la Convention thermidorienne supprimera les Décrets de ventôse. Ils n’auront vécu que huit mois !
Rédigé par : BA | 25 mars 2009 à 08:27
@Elisa: vous avez une interprétation particulièrement libre de l’histoire. J’aimerais savoir quelle sorte d’alliance les classes moyennes auraient nouée avec les classes dominantes : libre et consentie, ou plutôt contrainte et forcée ? Dans le 1er cas, il faut en déduire que les classes moyennes échappaient à la domination des classe dominantes ; dans le 2nd, que cette alliance n’en était pas vraiment une. Il me semble que vous confondez les classes moyennes avec la gauche dominante, le PS, qui a effectivement fait alliance avec la droite libérale, pour la seule satisfaction d’exercer le pouvoir.
Rédigé par : dmermin | 25 mars 2009 à 09:22
@ Yann
Je suis bien d'accord. Il y a une vrai contradiction et je cherche à la résoudre ! :-)
@ Elisa
Excellent commentaire, très "toddien" ! Effectivement, il faudra observer avec attention tous les signes de ce décrochement des classes moyennes vis à vis des classes dirigeantes. Et comme le disait quelqu'un dans le précédent post (c'est l'inconvénient d'écrire tous les jours) le basculement viendra sûrement lorsque les petits patrons se désolidariseront des thèses du Medef.
@ BA
J'imagine que par ces citations, tu veux signifier que tu espères voir se reproduire un tel partage autoritaire des richesses. Le problème c'est qu'il faudrait pour cela que l'on bascule vers un autre système économique et surtout que réémerge l'idée de Nation. Dans un cas comme dans l'autre, on en est encore loin...
@ Crapaud rouge
Tu te demande quelle alliance des classes moyennes ont passé avec les classes dominantes ? La conversion des socialistes à tous les dogmes néolibéraux sous couvert d'Europe ne te suffit pas ? La bataille idéologique gagnée par les classes dominantes au cours des années 80 et 90 a de fait entraîné l'adhésion des classes moyennes et les professions intermédiaires (notamment du secteur public) au système.
Rédigé par : Malakine | 25 mars 2009 à 09:46
@ Malakine
C'est vrai que je n'ai pas fait trop de pub, mais j'ai bien publié ce texte de R.Debray:
http://www.culturalgangbang.com/2009/03/etes-vous-democrate-ou-republicain.html
A noter que Debray s'en détache un peu dans "Le Moment fraternité".
@ Elisa et Malakine
Ces classes moyennes alliées aux classes dirigeantes sont bien décrites dans "Le petit bourgeois gentilhomme" d'Alain Accardo.
@ RST
Merci je vais réflechir à ta proposition
Rédigé par : René Jacquot | 25 mars 2009 à 10:23
Voilà un joli "programme fiscal" (certes incomplet : on ne peut laisser les impôts locaux HS, mais j'ai bien compris que ce n'était pas le sujet...). Mais qui pour le porter ? Là aussi, j'ai compris que la charité impose de ne pas enfoncer le PS en particulier et l'abscence d'alternative en général. Néanmoins et c'est une réponse partielle à la question de Crapaud Rouge à Elisa, annoncer que l'on va taxer plus progressivement les revenus, rétablir des droits de successions au delà des minimas symboliques d'aujourd'hui, ne fait pas un programme fiscal populaire !
En c'est en ce sens que les classes moyennes soutiennent les classes dominantes (et en partie les classes populaires, peut-être parce qu'elles ne veulent pas voir taxé les gains éventuels qu'elles transmettraient à leurs ouailles si elles venaient à gagner au loto ! ).
Une fiscalité marginale accrue supprime la nécessité de légiférer sur un salaire maximum. Mais il serait opportun que les partenaires sociaux s'emparent du problème de la progressivité de revenus dans les entreprises, de l'ensemble des revenus avec établissement d'un ratio décent.
Mais tout cela relève encore de l'utopie : le débat actuel va déboucher au mieux sur des mesurettes vite oubliées ou contournées...
Rédigé par : PeutMieuxFaire | 25 mars 2009 à 10:29
Elisa,
Un peu simplet quand même ces schématisations entres couches popu / moyennes /riches ... et ces supposées stratégies ...
Je veux bien admettre qu'on dise : "tout se se passe comme si la couche moyenne ... etc ..." , mais le conscientisation que vous leur prêtez est fausse .
Ainsi, dire que les couches moyennes auraient sournoisement ou hypocritement stratégifié que "les nécessaires efforts d’adaptation pour se fondre dans ce nouveau paradigme ne concerneraient que les classes populaires" , est vraiment d'une profonde débilité !
... "débilité" au sens de "faible" ... je reste courtois ;) !
Ce recyclage grossier de l'éternel lutte des classes plaît bien par son fumet marxiste mais ne permet de 'penser' la complexité micro/macro du monde , ni les motivations de ses acteurs.
Rédigé par : Oppossum | 25 mars 2009 à 13:43
@Elisa et Malakine: D’accord sur le fond mais pas trop sur les termes, car je vois les classes moyennes comme la caisse de résonance de la classe dirigeante. Elles sont plus dominées et manipulées qu’alliées au terme d’âpres batailles idéologiques. La preuve en est que, lorsqu’un vrai débat survient, comme pour le référendum de 2005, le résultat n’est pas gagné d’avance. Mais au fait, y aurait-il eu seulement débat si un poids lourd du PS, Fabius, n’avait donné au non ses lettres de noblesse ? J’y vois la preuve que, pour le reste, les « auteurs du forfait » appartiennent à l’élite établie de la gauche, les classes moyennes n’étant que des complices consentantes, (et satisfaites selon Galbraith), mais susceptibles d’adhérer à n’importe quel autre projet digne de ce nom.
Rédigé par : dmermin | 25 mars 2009 à 17:22
Yann,
Je n'ai vu qu'une partie de "La journée de la jupe" sur Arte mais suffisamment cependant pour être éblouie par la rencontre rare entre une comédienne et un rôle . Manifestement la fiction parle vrai et superbement . Il y a dix ans que je n'enseigne plus et ce n'était pas dans des "quartiers difficiles" mais je dirais que ce film "sonne juste" .
A titre d'exemple, il ne cache pas un problème important trop méconnu, celui de la personnalité du chef d'établissement et de sa capacité à soutenir l'équipe enseignante . Un documentaire de Thierry de Lestrade, "Madame la Principale", montrait, en 2001, le travail remarquable de la principale du collège Pierre de Geyter à Saint-Denis. A l'inverse, le principal du film est incapable de gérer les problèmes : au-delà se pose le problème des relations avec l'Académie et le Ministère ...
Rédigé par : Tadzoa Trekhei | 25 mars 2009 à 17:27
@ Opposum
La dureté de mon jugement est celle que confère le recul historique, car les années 80 sont déjà vieilles de 30 ans, et je ne les ai quasiment pas connues. Mais je maintiens qu'il s'est trouvé une majorité du corps social pour croire par exemple que l'on pourrait recycler à satiété les chômeurs de l'industrie dans "les services" et que le bonheur de "faire L'Europe" valait bien quelques centaines de milliers de chômeurs de plus. Cela est étalé noir sur blanc sur tous les magazines d'époque (Nouvel Obs. Express, Expansion) que j'ai trouvés dans le grenier de mes parents et qui forment actuellement une pile sur mon bureau. A ne considérer que des motivations individuelles vous pouvez bien sûr échapper au "fumet maxiste", comme à n'importe quelle autre explication collective du reste, mais moi, je crois précisément que la responsabilité collective a sa place dans l'histoire.
@ Crapaud rouge
Je vous fais simplement remarquer que la victoire du PS et son maintien au pouvoir sur une période de vingt ans ne sont pas tombés du ciel. De même que sous la troisième république, le parti radical avait représenté le mieux les nouvelles couches intermédiaires nées de la révolution industrielle, le parti socialiste a été par excellence le parti des nouvelles classes moyennes nées de la prospérité des trente glorieuses, et des progrès considérables de l'instruction secondaire et supérieure. La stratégie de ses dirigeants a tout de même été globalement en phase avec ce qu'attendait son électorat. Je pense aussi que vous exagérez le rôle de Laurent fabius dans la victoire du non en 2005. Lui a surtout eu le mérite de sentir le vent venir, et, quant au niveau du débat, je reste persuadé qu'Etienne chouard par exemple a eu plus d'impact que lui à ce niveau.
Rédigé par : Elisa Derdsenian | 25 mars 2009 à 23:41
Elisa
Attention , je n'ai pas dit qu'il n' y avait pas une vulgate, à l'époque, selon laquelle les acteurs du secteur privé devaient faire les efforts d'adaptation nécessaires. Opinion qui imprégnait les esprits avec plus ou moins de force , et , effectivement était reprise , pour des motivations diverses par un peu tout le monde.
Mais en faire un élément d'une stratégie d'une couche sociale aussi flottante et flou que celle des classes moyennes, me paraît foireux, et une façon paresseuse de faire semblant de nous faire (re)découvrir les ressorts cachés d'une lutte des classes qu'on accepte de complexifier en la faisant ternaire au lieu de binaire, en 150 ans de reflexion.
Cette mode idéologique du moment répondait à une situation dans laquelle il faut se replacer et la 'dureté de votre jugement' est un peu facile 30 ans après. Qu'il faille s'adapter un minimum me parait relever du bon sens et de plus, cette adaptation n'a jamais été pensée par la 'classe moyenne' lectrice du Nle Obs ou de l' Express comme un ultimatum, mais comme un processus que la collectivité devait accompagner : je ne pense pas que le "social" et ses protections soient anémiques en France, surtout comparés aux autres pays.
C'est vrai que la formation continue n'a jamais été très performante chez nous, et que la solidarité est plutôt mécaniquement arroseuse que "citoyenne" pour employer un mot largement vidé de son sens. Mais c'est un autre problème.
Et ce qui est également vrai c'est que la mise en concurrence a alors suivi une pente paroxystique destructrice à partir du moment ou la globalisation a amené à une frénésie dans la compétition , à une conception du temps économique qui n'a plus rien d'humain : l'homme est dévalorisé avant d'avoir pu s'adapter . Et, pire encore, cette compétition touche ceux ayant le plus de mal à se ré-adapter.
Sans compter que de l'autre côté, dans les pays émergents ou pauvres, le gain de quelques points de plus de niveau de vie est très hypothétique et est parfois extrêmement perturbateur culturellement , sans compter les aléas economiques ...
... la différence allant vers la concentration du capital dans la main d'une minorité ... capital dont il est illusoire qu'il pourrait en totalité être ré-allouer aux déshérités, car la plus grosse partie en est en outils de production (Du moins quand le système ne se transforme pas en casino spéculatif !) et c'est bien là qu'il est le plus utile ... à conditions de fabriquer des choses un minimum utiles tout de même !!!
Bref, seul un écrêtage me parait possible, mais il le faudrait vigoureux pour des raisons d'efficacité, de solidarité devant les temps assez difficiles qui ne font que s'ouvrir (Car on n'est toujours qu'au début des conséquences de la criiise) , et pour punir les goinfres sans morale.
Bon , il est vrai que la morale n'est pas mieux représentée ailleurs mais enfin ...
Rédigé par : oppossum | 26 mars 2009 à 20:05
Bonjour à tous,
merci pour ses propositions… que Besancenot et Laguillier émettent déjà depuis plusieurs années !
même si je soutiens pas les idées révolutionnaires d'Arlette qui rêvait notamment de voir la tête de tous les patrons au bout d'une pique le jour du "grand soir", je constate que leurs idées de taxer très fortement les gros salaires et les grandes fortunes commencent à faire leur bonhomme de chemin,
concernant le plafond des salaires, les chantres du libéralisme, à savoir les USA, ne nous ont pas attendu puisque par exemple les salaires des basketteurs stars sont plafonnés. Pour quelle raison ? Parce que les patrons de club se sont aperçus qu'avec l'envolée des salaires accordées aux meilleurs joueurs, ils finissaient par mettre en danger l'existence même de leurs clubs !
puisqu'on a depuis longtemps légiféré sur un salaire minimum (SMIC), je pense donc qu'il faudra aussi légiférer à l'avenir sur un salaire maximum ; car si on laisse cela à l'appréciation des conseils d'administration, toutes les dérives seront encore possibles (sauf à imaginer que les actionnaires extérieurs ne puissent désormais posséder plus de 49,9 % des actions d'une entreprise, le reste étant attribué aux salariés : on peut rêver !)
dernière remarque : avant de se lancer dans de nouvelles règles (par exemple fiscales), je propose que l'on réfléchisse tous ensemble au monde que nous souhaitons demain,
si nous savons imaginer un nouveau monde, alors nous saurons trouver les règles et lois qui le régiront,
la feuille est vierge : à chacun d'y inscrire ses rêves, ses utopies, son nouveau paradigme !
qu'en pense le maître des lieux ?
Rédigé par : olivier | 28 mars 2009 à 10:59
@ Olivier
Le maître des lieux pense à cela. Il a même en projet d'écrire un bouquin cet été qui tentera de répondre à cette question cruciale, quel monde pour l'après crise, à partir de quels principes le fonder, quel contenu lui donner...
Pour l'instant je bloque sur la contradiction entre relance par la demande et la problèmatique d'épuisement des ressources.
Rédigé par : Malakine | 28 mars 2009 à 17:16
@ Malakine,
Super nouvelle que ce bouquin !
je signe de suite pour lire les premiers feuillets…,
quant à "la contradiction" que tu évoques, je ne pense pas qu'elle existe,
je crois même que c'est toi qui te fabrique "cette contradiction" car ton corps et ton âme sont trop ancrés dans notre société du "marketing", une société complètement formatée et de laquelle il est bien difficile de s'éclipser,
si les créateurs, les bâtisseurs, les rêveurs, les artistes… ne créaient qu'en fonction des études de marché, alors rien (ou presque) de grand dans ce monde n'aurait pu voir le jour !
ne bride pas ton imagination, bouscule (écrase même) tes certitudes, combats les préjugés… et laisse-toi porter par tes rêves,
tu t'engages dans une voie difficile : alors bon courage car il va t'en falloir,
amicalement.
Rédigé par : olivier | 28 mars 2009 à 19:19
@ Olivier
Je ne sais pas si j'aurais suffisamment de matière et de discipline. Pour l'instant, ce n'est qu'un projet, une envie. J'en reparlerais quand tout ça sera plus mûr.
Rédigé par : Malakine | 29 mars 2009 à 16:16