Christophe Barbier titre cette semaine son édito dans l’express, « Changez de candidate ? » Il n’est pas le seul. La sympathique équipe du vrai débat, s’est posé la même question ces derniers jours. La posture peut comprendre pour les amis du Vrai débat car leur ligne éditoriale les conduit naturellement à remettre en question le duopôle Ségo-Sarko. En revanche, pour Barbier, qui malgré son jeune âge, est un parfait représentant de la pensée unique journalistique, celle qui a fabriqué de toute pièce la Ségomania, il s’agit d’une pratique honteuse, une indigne illustration de la théorie des trois L « Lèche, lâche, lynche »
La nullité de sa campagne et son effondrement dans les sondages ne doivent pas être une surprise. J’ai toujours été violemment critique à l’égard de Ségolène, et j’ai toujours prédit son explosion en plein vol. Néanmoins, j’en appelle à un cessez le feu sur Ségolène Royal. Non pas parce que je me serais brusquement converti aux charmes de la realpolitik ou par un généreux geste de charité à l’égard de cette pauvre victime d’un injuste acharnement médiatique, mais en vertu d’une analyse politique simple et sans concession : Ségolène Royal n’est pas une erreur de casting. Son vide doctrinal et sa campagne d’image n’est que le reflet de la stratégie de l’appareil socialiste pour reconquérir le pouvoir. Le PS doit assumer et périr avec elle.
Mon aversion pour la candidate socialiste ne date pas d’hier. Son effondrement n’est pas une surprise. Pour illustrer le propos, je ne résiste pas au plaisir en guise d’introduction de citer deux extraits d’articles anciens.
« Ségolène a été une très bonne candidate de pré-campagne. Elle a été exceptionnelle pour susciter un mouvement d’opinion qui a tout emporté sur son passage. Elle s’avèrera une candidate affligeante dans la vraie campagne. Elle s’aliénera d’abords la gauche intellectuelle et l’électorat le plus politisé, puis les classes populaires qui ne verront en elle qu’un leurre pour permettre aux hiérarques socialistes de réoccuper les palais nationaux et leurs 607 avec chauffeur » Le 24 novembre dans « "La popularité de Ségolène Royal est construite sur du sable"
« Une popularité fondée sur la projection peut se retourner très vite, notamment lorsque l’opinion commencera à se former et que les Français rechercheront des réponses concrètes à leurs préoccupations. Chercher à cristalliser sur sa personne tous les espoirs, même les plus contradictoires, est aussi le moyen le plus efficace de les décevoir tous, pour ne plus en incarner aucun. » Le 12 décembre dans « "La Ségomania ou le saut dans l'inconnu"
Pendant que je développais ces analyses, les médias chantaient en cœur le formidable renouveau qu’elle incarnait, son extraordinaire intelligence politique, sa détermination, l’originalité de son positionnement et j’en passe … Aujourd’hui, ils s’acharnent sur leur créature, leur ancienne idole, en feignant de découvrir son incompétence et la vacuité de son propos.
Ils avaient tort, hier, quand ils l’encensaient. Ils ont tout aussi tort aujourd’hui quand ils se mettent à la chasser en meute.
Ils ont suscité l’émergence du phénomène Ségolène en s’obstinant à n’analyser la politique qu’en terme d’images, de tactique et de positionnement. S’ils avaient fait leur boulot, en parlant des problèmes du pays et en interrogeant les candidats sur leur vision de l’avenir dès le début de la campagne, il est évident qu’ils auraient facilité le jeu d’un Fabius ou d’un DSK et que Ségolène n’en serait pas là. Si erreur de casting il y a, c’est plutôt du coté de nos analystes politiques qu’il faudrait la chercher.
Mais, ils ont tord aujourd’hui de s’acharner sur le personnage et ses limites. Ce serait exonérer le PS de toute responsabilité dans cette affaire. Les militants PS avaient le choix entre deux hommes d’Etat proposant chacun un projet politique relativement clair et construit, et une cruche qui n’avait que sa féminité et son sourire orthodonté comme atout. Ils ont massivement choisi la cruche. Ils continuent d’ailleurs à la soutenir. 77% des sympathisants socialistes considèrent que le PS a eu raison de désigner Ségolène Royal selon un sondage publié ce matin par le Figaro.
Certes, la fascination devant l’icône médiatique et la promesse de victoire annoncée par les sondages peuvent expliquer une partie de ce succès, de même que le déficit de culture politique des nouveaux adhérents. Mais il ne faut pas oublier que Ségolène Royal était aussi la candidate de l’appareil. Sa désignation n’est pas le fruit du hasard ou d’un malentendu. Elle est le résultat d’une stratégie réfléchie du parti.
La vacuité du discours de la candidate n’est en fait que le reflet de la faillite idéologique du parti, aujourd’hui incapable de formuler un projet alternatif à la gestion pragmatique et technocratique du pouvoir en place. Le PS était déjà inaudible bien avant la désignation de Ségolène Royal comme candidate. Mis à part, proposer de revenir sur les rares réformes des gouvernements Raffarin et Villepin, on ne les a entendus formuler aucune proposition phare, ni même de doctrine ou de projet de société.
La stratégie de l’icône monarchique et de la méthode participative étaient parfaitement conscients. Fabius apparaissait trop à gauche. DSK trop à droite. Ils ont finalement choisi de ne pas choisir. Une non candidature, pour porter un non projet. Un emballage séduisant pour faire oublier l’absence de contenu.
Ségolène Royal est bel est bien la candidate du Parti Socialiste. Son effondrement ne fait que refléter la faillite du parti lui-même, du socialisme en tant que projet de société et du parti en tant que force d’alternance.
La raison est en simple. Notre société est déjà fortement socialisée avec une dépense publique record et une redistribution qui a déjà atteint ses niveaux maximums. Il est impossible pour le PS de camper dans la logique du toujours plus. La dette abyssale, la volatilité de la richesse et l’exigence de compétitivité dans la concurrence mondiale, l’en empêche. Le PS n’a qu’une alternative. Soit s’ériger en parti conservateur de l’ordre social, ce qui est impossible dans un contexte de forte insatisfaction populaire, soit remettre en cause les fondements du système, ce qui lui est impossible compte tenu son attachement au projet européen et à ses dogmes libéraux et libre-échangistes.
Inutile d’attendre le 11 février. Le PS est définitivement dans l’incapacité d’élaborer un vrai projet alternatif avec un tant soir peu de substance. Ségolène Royal ou pas.
Il est en outre, il est prisonnier de sa démarche participative. Cette stratégie, qui visait à renouer à bon compte avec l’électorat populaire en promettant de l’écouter et d’être proche de ses préoccupations, est totalement et fondamentalement contraire à l’esprit des institutions. Cela peut fonctionner dans une élection locale. C’est en revanche une erreur magistrale pour l’élection à la présidence de la République. Presque un suicide politique.
Le rôle d’un président de la République est de donner du sens et d’éclairer l’avenir. La fonction ne comporte pas qu’une dimension d’incarnation empathique fondée sur l’amour et l’identification. Elle a aussi une dimension transcendantale. Un postulant à la fonction de chef d’Etat se doit de tenir un discours vertical, venant du haut, parlant au nom de l’intérêt supérieur de la France ou de l’avenir. Cela, le PS dans son ensemble n’en avait pas les moyens intellectuels.
Le 11 février ou après, la candidate socialiste ne pourra au mieux qu’élaborer un programme de présidente de région. Au pire, elle tiendra des propos incantatoires et moralistes de mamans qui papotent en attendant leurs enfants devant la grille de l’école.
La candidature Ségolène Royal traduit la crise terminale du socialisme. Le PS n’a que la candidate qu’il mérite. Elle n’est que le reflet de ce qu’il est devenu : Un parti de notables locaux, embourgeoisés, sans imagination ni ambitions. Un parti de militant issus principalement du secteur public, sans aucune culture économique, totalement coupé des réalités du monde d’aujourd’hui et ignorant des enjeux de demain.
En précipitant sa disparition, elle permettra et rendra nécessaire la reconstitution d’une véritable alternative politique, ce qui ne sera pas en soi forcément un mauvaise nouvelle.
Cher Malakine,
Comme tu y vas avec Ségolène: la traiter de cruche est une sacrée vacherie. L'arrêt de la nicotine cher Malakine te donne un mordant que je ne te connaissais pas. Reprends une clope, cela te calmera. Tu dis qu'il faut cesser le feu sur Ségolène et tu sors le bazooka ! Je ne sais pas s'il faut attendre monts et merveilles de madame Ségo, mais je ne crois pas qu'il faille crier avec les loups pour autant. La campagne s'annonce longue et on peut espérer que les semaines à venir nous réservent de bonnes surprises, comme des propositions de Ségolène innovantes, intelligentes, surprenantes… On peut rêver !
Rédigé par : olivier | 02 février 2007 à 22:12
Brillant et agressif, un peu trop peut-être, vous risquer de provoquer de la sympathie pour elle en retour. J'espère qu'aucune féministe enrager ne lira vos propos sinon vous allez être inondé de messages vous traitant de misogyne. Je constate qu'encore une fois notre Nostradamus moderne (Emmanuelle Tood) semble avoir prédit l'avenir en traitant de Ségolène Royale de candidate du vide, tout comme Sarko d'ailleurs. Si je me souviens de ses propos il avait dit que la seule candidature susceptible de faire perdre la gauche était celle de Ségolène, il avait peur-être raison.
Rédigé par : Yann | 02 février 2007 à 23:29
On est forcé de partager ces avis si on se donne la peine d'apréhender le problème rationellement.
La démocratie participative relève de l'hypocrisie complète, je reviens ce soir d'un de ces échanges:
30 personnes, toutes plus ou moins politisées, aucun représentant de cette France populaire que la candidate prétend défendre et incarner,aucun proces verbal de la réunion, pas même un raporteur, une animation par un cacique local qui n'a pas permis d'élever le débat et la réflexion.
Des interventions parfois bien plates, voir mêmes ridicules....
On va m'accuser de tirer sur l'ambulance.
Mais c'est le constat d'un simple militant engagé ds l'action et j'ose le dire le combat politique.
Ce combat est il définitivement perdu?
Franchement chaque jour qui passe me rapproche de cette conclusion, mais même si j'en arrive là je ne renoncerais pas et j'appelle tous ceux qui percoivent la menace, les dangers que représenteraient pour la France l'aventure communautariste, atlantiste, libérale de nicolas Sarkosy à faire abstraction des errements idéologiques et des inconséquences du PS et de sa candidate pour continuer à se battre et espérer.
Comme j'ai déjà eu l'occasion de l'écrire sur Horizons, avec NS le pire est certain, Ségolène est tombé si bas qu'elle ne peut plus que remonter.
Certains m'objecteraient que la situation étant ce quelle est autant aller au bout du processus: atomisation du PS, purge sarkosienne qui réveilleraient les Français..., mais j'ai 3 enfants et c'est pour eux que je ne veux pas voir cette descente aux enfers et la mort des valeurs républicaines, cette thérapie de choc que certains et je les comprend appellent de leur voeux nous laissera t'elle en situation de reconstruire?
Derrière Sarkosy il y a les rouleaux compresseurs médiatique de la pensée unique et les anciens d'occident.
Survivrons nous et trouverons nous demain les moyens de relever la tête?
Le 11 février est attendu car il reste porteur d' un espoir celui de la survie.
Et puis elle n'est pas seule, si il y a autour d'elle des boulets, chaque fois que j'entends Lang ou Kouchner je désespère un peu plus, mais il y a aussi des "lumières" par momment... Chevènement et d'autres.
Rédigé par : chavinier | 03 février 2007 à 00:13
avant d'être aussi radical, il serait peut être sage d'attendre un peu. On peut être circonspect tant sur la dame et sur ses méthodes... mais voyons déjà si la méthode accouche de quelque chose.
Rédigé par : Marc | 05 février 2007 à 13:06