Le rapport Stern qui a chiffré à 5 500 Milliards d’euros le coût des conséquences des changements climatiques, conjugué à la vraie-fausse candidature Nicolas Hulot ont projeté la question du changement climatique au devant de la scène publique.
Même si le problème est réel, je crains qu’on ne se trompe de perspective. A mon sens, l’enjeu n’est pas tant dans le réchauffement climatique que dans le changement d’énergie.
Le changement climatique est inéluctable
L’effet de serre est en fait lié au type d’énergie dont se sert notre civilisation pour faire tourner son économie : Charbon, Pétrole, gaz. Ces combustibles se trouvent dans le sous-sol sous forme stabilisée. En faisant ressortir l’énergie qu’ils recèlent, on produit un dégagement de vapeur d’eau et de CO2, à l’origine du gaz à effet de serre. Autrement dit, il y aura dégagement de gaz à effet de serre, tant que l’humanité n’aura pas trouvé et n’utilisera pas une autre source d’énergie non fossile.
Or à l’heure actuelle, il n’y a pas de source d’énergie « propre » alternative pour pouvoir remplacer les énergies fossiles. Dans ces conditions, qui peut penser que l’humanité n’ira pas jusqu’à consommer l’intégralité des réserves fossiles de la planète ? Sauf miracle, toutes les réserves du sous-sol seront, un jour ou l’autre, transformées en gaz carbonique.
Les efforts qu’on nous presse de faire pour réduire nos émissions à effet de serre ne repousseront que de quelques décennies, ou quelques années, la date la date à laquelle les énergies fossiles seront épuisées. Est-ce que ça changerait fondamentalement les choses au niveau du climat comte tenu de sa grande inertie ? Je suis sur ce point d’un grand pessimisme. Les changements climatiques auront lieu. Il faudrait commencer à s’y préparer pour prévenir certaines de ces conséquences les plus prévisibles (montée des eaux, périodes caniculaires, fréquence des tempêtes et des inondations, sécurisation la ressource en eau etc …)
La seule vraie solution serait de trouver le moyen de générer une réaction inverse en transformant ce CO2 à l’état solide. Soit sous forme minérale avec les recherches en cours sur le piégeage du carbone au moment des émissions. Soit sous forme végétale avec le projet d’ensemencement des océans en particules de fer pour stimuler la production de phytoplancton.
L’échéance du Pick-Oil
L’énergie fossile est en tout état de cause limitée. Nul ne connaît d’ailleurs l’état exact des réserves. Un jour viendra ce qu’on appelle le « pick-oil », le moment où la production ne pourra techniquement plus suffire à la consommation. La production stagnera, tentera de mobiliser de nouvelles réserves moins accessibles - et donc beaucoup plus onéreuses. La demande continuera de croître. Ce croisement des courbes entraînera une telle flambée des prix qu’elle prolongera l’économie mondiale dans une profonde récession.
Pire, la crise énergétique pourrait même générer de nouvelles guerres. Il existe en effet une théorie économique selon laquelle, au-delà d’un certain niveau de rareté, la régulation du marché par les prix ne suffit plus à équilibrer offre et demande. On assiste alors à des tentatives d’appropriation du bien par la force. Il est effectivement permis de voir dans la politique américaine depuis 2001 des prémisses d’un tel processus.
Si le « pick-oil » arrive avant que l’Humanité n’ait préparé des énergies de substitution pour ses besoins fondamentaux, il est à craindre que l’économie mondiale n’ait plus les moyens de financer les adaptations nécessaires. La mutation énergétique exigera en effet des investissements colossaux : Mettre en place de nouveaux générateurs, adapter le système de distribution, renouveler l’ensemble des équipements qui délivrent l’énergie aux consommateurs, dans l’industrie, l’habitat, les transports …
Là se situe le véritable l’enjeu. Il est autrement plus important que les conséquences du « réchauffement de la planète ». Même si les prévisions les plus catastrophistes se réalisent, l’humanité saura toujours s’y adapter. Il ne s’agit après tout que de climat.
Nul se sait quand se produira le Pick-oil. Dans 40 ans, 20 ans ou l’année prochaine ! Il est clair que nous ne sommes pas actuellement prêt, mais si on accélère pas les choses, nous n’y serons pas d’avantage préparé dans 20 ans … Il est vraiment tant de nous préparer au changement d’énergie.
Perspectives pour l’après pétrole.
Quelles sont les alternatives actuellement envisagées aux énergies fossiles ?
Les économies d’énergie
Cela semble une idée bébête d’écolo déconnecté des réalités. Cela ne l’est pas. Améliorer l’efficacité énergétique des transports, de l’habitat, du commerce mondial réduira la croissance de la consommation et retardera l’arrivée du Pick oil. Réduire la progression de la consommation pour qu’elle ne dépasse jamais brutalement de celle de la production pourrait suffire à une adaptation lente du système. Moins on consommera d’énergie, plus l’adaptation aux nouvelles énergies sera facile.
Je ne vais pas réciter le bréviaire écolo, mais il est vrai qu’il existe des gisements importants d’économies. Je n’en citerais que deux.
Il est aujourd’hui possible, par de nouvelles méthodes de construction et de nouvelles technologies de faire des habitations à énergie nulle voir positive, le bâtiment produisant lui-même l’énergie qu’il consomme. Si ces techniques sont au point et accessibles financièrement (il semblerait que ce soir déjà le cas), il faudrait alors lancer un gigantesque plan de renouvellement de l’Habitat fondé sur de nouvelles normes de construction. Les programmes de renouvellement urbain en offriraient déjà une belle opportunité.
L’autre point c’est les véhicules hybrides. Ils sont plus efficaces sur le plan énergétique, ne serait-ce que parce qu’ils organisent une récupération d’énergie au moment du freinage. Il faut être plus ambitieux et plus normatif en la matière en s’attaquer au gros du transport routier, celui des véhicules utilitaires, d’autant plus que bus et les camions, par leur poids et leur puissance, pourrait permettre de mettre en place des systèmes « hybride-série » où le moteur thermique n’est réduit qu’à une fonction de groupe électrogène, le reste étant entièrement électrique. J’ai déjà vu un tel prototype fonctionner. Ce n’est pas de la science fiction. Il faut privilégier cette technologie car elle préparera la génération suivante, celle des véhicules à pile à combustible.
Sur ce domaine également, on attend des nouvelles normes applicables à l’industrie des transports. L’union européenne serait bien inspirée de prendre une directive rendant ce type de véhicule obligatoire à échéance 5 ou 10 ans.
L’électricité d’origine nucléaire
L’électricité nucléaire est à ce jour, la seule source d’énergie électrique qui ne rejette pas de CO2. Elle connaît encore trois problèmes, celui des déchets, celui du risque de dissémination des armes atomiques en cas de généralisation de cette technologie sur la planète, et surtout le fait que l’énergie électrique ne se stocke pas, ce qui empêche de l’utiliser pour les transports. C’est tout l’enjeu de l’hydrogène et de la pile à combustible.
La technologie de la Pile à Combustible (PAC) n’est pas encore au point. Elle est encore trop chère passez assez fiable, ni durable. Lorsque la technologie sera au prête pour une industrialisation, il sera alors possible de stocker l’énergie électrique sous forme d’hydrogène. Les centrales alimenteront des installations d’électrolyse de l’eau permettant de fabriquer l’H2 en quantité industrielle. Resterait alors à réorganiser tout le système de transport (via des gazoducs par exemple) de distribution (remplacer l’ensemble des stations services) et des équipements (PAC embarquée pour les véhicules, PAC Stationnaires pour l’habitat isolé)
L’aire de civilisation qui maîtrisera la première cette technologie dans toute sa chaîne deviendra le nouveau cœur du système économique mondial. C’est un formidable enjeu pour l’Europe.
Les énergies renouvelables
Le principal problème posé par les énergies renouvelable est, au-delà de leur potentiel, leur raccordement au réseau électrique. Celui-ci est en effet construit dans une logique descendante (de la production à la consommation) et non dans une logique décentralisée. De plus, contrairement aux centrales thermiques ou nucléaire, les éoliennes et le solaire ne produisent pas en continu, ce qui complique considérablement l’organisation de la distribution.
L’avènement de l’âge de l’hydrogène permettra de stocker l’énergie électrique sur le lieu de production leur donnera de nouvelles perspectives de développement. Il sera alors possible de faire de la production électrique propre loin de toute consommation. Dans les océans pour des installations marémotrices ou éoliennes, dans les plaines de Sibérie et le grand nord pour l’éolien, dans les déserts d’Afrique pour le solaire ou dans les zones tropicales d’Amazonie pour l’hydraulique.
Enfin, pour finir ce panorama, j’évoquerais le bois, énergie qui semble ringarde car ancestrale mais qui garde tout son intérêt, notamment pour le chauffage collectif. Certes, elle rejette du carbone, mais celui-ci a été capté dans l’atmosphère par la pousse des arbres. Le bilan fait semble t-il plus que s’équilibrer, dans la mesure où l’exploitation d’une forêt stimule la croissance végétale et réduit ses émissions naturelles de Co2. Et là, aussi, l’humanité dispose de ressources importantes et inexploitées. Pourquoi pas d’ailleurs développer de nouvelles essences végétales OGM à croissance rapide ?
L’humanité va connaître au 21ème siècle un autre défi majeur auquel elle n’est pas préparée, à savoir le vieillissement de la population avec, non pas le, mais les chocs démographiques. Arrivée de la génération du baby-boom d’après 45 à l’age de la retraite et arrivée du baby boom d’après 18 à l’âge de la dépendance. Ces chocs suffiront à faire exploser tous les systèmes sociaux. Malheureusement ces chocs étaient inscrits dans la démographie depuis des décennies, et au lieu d’avoir sagement provisionner les sommes nécessaires, les sociétés arrivent au moment d’y faire face, déjà étranglées par les dettes et les déficits !
La perspective du choc énergique est plus encore qu’un enjeu économique, un enjeu de civilisation. Il devra mobiliser des sommes encore plus importantes pour faire face à cette gigantesque mutation, en terme de recherche comme un terme d’infrastructures. Cela renforce encore la nécessité et l’urgence d’assainir les finances publiques pour permettre aux Etats de retrouver rapidement des capacités d’interventions. C’est la première mesure à prendre.
La deuxième mesure à prendre c’est effectivement de mettre en place une taxe carbone, seule mesure de nature à intégrer dans le jeu du marché le coût de cette mutation. Renchérir artificiellement le coût des énergies fossiles pour en dissuader l’usage et rendre progressivement plus compétitives les solutions alternatives.
La troisième c’est d’engager dans le cadre de l’Union, un ambitieux programme de recherche sur les énergies renouvelables, sur le nucléaire de 2ème génération, sur le stockage de l’hydrogène, les véhicules hybrides et la pile à combustible.
La quatrième c’est de nouvelles normes dans l’habitat et les transports applicables dans une échéance raisonnable, déterminant ainsi un calendrier impératif pour la sortie de l’âge du pétrole.
L'énergie nucléaire produit du CO2
L'énergie nucléaire contribue à l'effet de serre en produisant du CO. Elle en produira de plus en plus à mesure que la teneur des minerais en uranium est de plus en plus faible.
Dans la production d'électricité à partir de centrales nucléaires, il ne faut pas se limiter à la dernière étape, qui ne produit pas de CO2, mais prendre en compte l'ensemble de la filière depuis l'extraction du minerai.
Dans les exploitations à ciel ouvert, cette extraction utilise des pelleteuses et des camions, aux dimensions impressionnantes et aux consommations de produits pétroliers à la mesure de ces dimensions. Dans les mines souterraines, le résultat est identique avec d'autres moyens. Le concassage de ce minerai utilise les mêmes énergies productrices de CO2. Le transport depuis les mines, par camions ou par trains à locomotives diésel, puis par voie maritime fait de même.
Les étapes ultérieures utilisent aussi une grande quantité d'énergie, quelle qu'en soit la source.
Au total, chaque kilogramme d'oxyde d'uranium utilisé dans une centrale nucléaire à demandé des quantités considérables d'énergie fossile pour sa production. Cette consommation à produit du CO2 en proportion et c'est en cela que l'énergie nucléaire est elle aussi émettrice de CO2.
A l'heure actuelle, avec les minerais les plus riches (teneur élevée en uranium), l'utilisation d'énergies fossiles est encore modérée. Mais cette consommation augmente à mesure que les minerais disponibles ont une teneur de plus en plus faible en uranium. Pour obtenir la même quantité d'oxyde d'uranium, il faudra consommer deux, puis dix ... fois plus d'énergie fossile en produisant deux, puis dix ... fois plus de gaz à effet de serre (CO2).
En fin de compte, la même quantité d'électricité produite par une centrale nucléaire produira plus de CO2 qu'une centrale électrique au gaz naturel.
Rédigé par : Hervé | 28 janvier 2007 à 17:48
A hervé
Toutes activités mobilise une consommation énergétique; à ce petit jeu on pourrait même dire que la fabrication des moyens de transports en commun produit du CO2....
L'énergie nucléaire n'est pas condamnée, sauf si on abandonne cette filière, à en demeurer au technique actuelle de production.
les perspectives offertes par les réacteurs de nouvelles génération et demain par la maitrise de la fusion permettront de corriger certains défauts.
Encore faut il envisager l'avenir sans lui tourner le dos.
Rédigé par : chavinier | 29 janvier 2007 à 15:34
Sur le fond, Hervé a raison d'aborder le problème de façon globale, puisque c'est ainsi qu'il se pose.
Si une voiture hybride consomme moins, mais pollue beaucoup plus à la création et pour son élimination, le bilan n'est pas nécessairement positif, même si l'automobiliste aura pollué moins entre son achat et la remise de sa voiture à la casse.
Quant aux chiffres, je ne les connais pas, et vais donc m'empresser de me taire. Je serais curieux de les connaître.
Rédigé par : Djam | 24 août 2007 à 17:49
En plus de ses dangers et des nombreux problèmes qu'il pose, le nucléaire n'est pas une solution viable, tout simplement à cause des limites de la production d'uranium, comme cela est montré ici : http://futura24.site.voila.fr/nucle/uranium_reserv_product.htm
Un autre article du dossier sur l'énergie nucléaire est encore plus intéressant, qui explique que les réacteurs nucléaires de 4e génération sont une illusion pour l'énergie (avec d'autres informations sur la production d'uranium).
Rédigé par : Bonobo | 28 mars 2008 à 12:59