La polémique autour des propos de Georges Frèche sur la composition de l’équipe de France de Foot m’amène à réagir. Est-ce vraiment raciste de dire qu’ « il y a 9 blacks sur 11 en équipe de France. La normalité serait qu’il y en ait 3 ou 4. Ce serait à l’image de la société française » ? ….
Quelle différence de nature y a t-il vraiment entre cette déclaration et les revendications visant à accroître la proportion de minorités visibles dans les médias ou au parlement ? Dans les deux cas, il s’agit d’espaces de représentation de la Nation. Dans les deux cas, la demande vise à organiser une représentation fidèle de la société française compte tenu de sa diversité.
La République a validé cette conception communautaire de la représentation avec la loi sur la parité. Elle a un ministre au gouvernement dont la mission essentielle consiste à revendiquer plus de place dans la société française pour les ressortissants de sa communauté. On accepte avec bienveillance les revendications des minorités visibles, quand on ne les appuie pas en dénonçant la discrimination et le racisme dont se rendrait coupable la société française. Mais on s’offusque quand un blanc considère anormal que sa communauté ne soit presque plus représentée au sein de l’équipe de France de Foot ?? Un peu de cohérence !!
Soit la Nation française est composée de citoyens égaux quelque soient leurs origine, leur religion ou leur couleur de peau, et la composition de toutes les instances représentative ne doit être déterminée par d’autres motifs que leurs mérites et leurs talents. Soit la Nation française est désormais considérée comme diverse et agrégeant plusieurs communautés disposant chacune de leur identité, et dans ce cas, il faut veiller à une juste représentation de toutes les communautés dans toutes les instances représentative. C’est l’un ou l’autre, mais la conception de la Nation ne peut pas être communautariste quand il s’agit de promouvoir la place des minorités et unitaire quand il s’agit de respecter l’importance de la majorité !
Je l’ai déjà écrit. Il n’y a pas de voie moyenne entre le modèle unitaire républicain et le communautarisme. Entre les deux, la France doit choisir un modèle et s’y tenir.
Idéologiquement, je penche pour le modèle unitaire. Je suis contre la parité. Contre les quotas. Contre le concept de minorités visibles. Contre les revendications communautaires. Contre l’enfermement des minorités dans une logique de victimisation. Contre l’auto-flagellation, la repentance et la culpabilisation permanente. Néanmoins l’autre thèse se défend aussi, à condition d’être cohérent et d’en accepter toutes les conséquences. Cette polémique montre deux choses.
- Le modèle communautaire n’est pas pleinement accepté par les minorités. Sinon, elles n’auraient pas hurlé au racisme. Le seul commentaire mesuré que j’ai entendu sur cette polémique fût celle non pas celle d’un raciste mais d’un tenant du modèle communautaire. Lui, considérait sereinement qu’il fallait faire l’effort d’assurer une juste représentation des communautés. Normal, il s’agissait d’un journaliste américain invité à « on refait le monde » sur RTL.
- La France n’est pas un pays de discrimination. Elle accepte très bien que son équipe nationale ne soit composée que de Blacks. Cette polémique en apporte la preuve.
Considérer que l'Equipe de France de football doive être un reflet de la population française masculine, c'est se fourvoyer. Elle ne l'est pas, ne l'a jamais été, et il n'y a aucune raison pour qu'elle le soit.
C'est une illusion, une forme d'idéalisme que je comprends et que jusqu'à un certain point je partage, mais une illusion quand même.
Elle est peut-être la marque des années Platini ou, par hasard, elle paraissait, plus qu'à aucune autre période, un échantillon représentatif de la société, avec une forte charge affective (voir le livre de Pierre-Louis Basse "Séville France-Allemagne le match du siècle") ?
Il n'y a aucune raison pour que l'Equipe de France soit un échantillon représentatif de la population française. C'est une sélection des meilleurs, qui peuvent l'être :
1) parce qu'ils ont plus de volonté ou plus de persévérance (notamment parce qu'issus de milieux plus pauvres ils verraient dans le sport un débouché méritant une plus grande implication que celle des fils de classes plus aisées) ; ou :
2) parce que la nature du sport en question requiert des caractéristiques physiques particulières (certaines morphologies sont ultra-dominantes dans le sprint ou dans les courses de fond, par exemple).
Si cela était démontré, on aurait les explications respectives de la sur-représentation (à vérifier) de fils d'immigrés en Equipe de France à différentes époques (Piantoni-Kopa, Platini-Fernandez-Tigana, Zidane pour les plus illustres) d'une part et d'autre part de celle, récente, de joueurs noirs dans un contexte où l'exigence physique s'est beaucoup accrue en dix ans.
Par conséquent si je rapproche fils d'immigrés et noirs, c'est uniquement à cause des réactions également détestables qu'ils ont subies ou subissent encore. Je crois qu'il serait peu lucide de feindre d'ignorer l'association qui se crée immédiatement chez les esprits mal éclairés que les ressassements lepénistes influencent. Or il me semble que les propos de Frêche ont à voir avec cela.
L'ancien maire de Montpellier serait autrement plus intéressant s'il se préoccupait de la marchandisation du sport en général et du football en particulier. Son impact médiatique serait mieux utilisé !
Rédigé par : Playtime | 23 novembre 2006 à 19:24