La suspension, probablement temporaire, du mouvement social qui s’est manifesté à travers l’opposition au projet de réforme des retraites du gouvernement ouvre ce que l’on peut appeler la « grande » année électorale. Désormais, il est clair que tous les acteurs vont avoir les yeux rivés sur les échéances de 2012. Cela ne signifie pas que tout se réduise à cette forme de lutte politique. Cependant, pour tenter de prolonger le mouvement social dans ce nouveau contexte il faut tirer les leçons de ce que nous venons de vivre depuis septembre, et se projeter au-delà.
La première leçon est, incontestablement, que si le gouvernement a remporté une victoire tactique contre le mouvement social il l’a payée d’un prix exorbitant. Cette victoire pourrait se transformer en une défaite stratégique.
Nul ne peut contester que ce mouvement se soit soldé par une défaite tactique. La reprise du travail, dans le secteur pétrolier et dans les ports, le confirme. Cette défaite est en partie due à l’attitude des syndicats qui n’ont pas préparé les travailleurs à la brutalité de ce gouvernement et à l’emploi de la réquisition des travailleurs comme arme pour casser la grève. En dépit des discours des dirigeants syndicaux, il était évident qu’il y avait différentes stratégies à l’œuvre dans le mouvement. De ce point de vue, la CFDT apparaît bien comme le « maillon faible » du front syndical, comme cela fut constaté depuis 1995.
Cette défaite est aussi, pour partie, le produit du poids que commencent à exercer les échéances électorales sur l’opinion. Pourquoi entrer dans une grève longue, aux redoutables conséquences financières pour les travailleurs, quand on pense qu’un changement de majorité est très probable en 2012 ? Pourtant, cette défaite n’a pas entamé la combativité des salariés. En ce sens, le succès du gouvernement est purement tactique.
Tous les éléments qui permettent de penser que l’on est en présence d’une défaite stratégique du gouvernement et du Président sont en effet présents. Tout d’abord, la légitimité du mouvement est restée est restée très forte dans l’opinion, même vers la fin de ce dernier. Il est ainsi significatif que les acteurs politiques, de droite mais aussi de gauche, sortent affaiblis alors que l’image des syndicats est très largement positive.
Ensuite, l’usage de la force – les réquisitions de travailleurs – ont fait toucher du doigt à une génération de salariés la violence de la lutte des classes. Ce souvenir ne s’évanouira pas. Le sentiment d’une injustice profonde va rester, et avec ce dernier la volonté de prendre une revanche. Ici, c’est toute une nouvelle génération qui a fait l’expérience de la lutte collective.
Enfin, qui n’a pas constaté l’accumulation des rancoeurs et des griefs contre ce gouvernement et contre le Président ? La liste est longue qui va du bouclier fiscal aux retraites en passant par le népotisme assumé (l’affaire de Jean Sarkozy à l’EPAD) aux multiples preuves de collusion de ce pouvoir avec les plus riches. Ce qui s’est joué dans ce mouvement, c’est la transformation de l’image de Nicolas Sarkozy d’un Président « volontariste », courrant d’un incendie à l’autre avec des « solutions », à celle d’un Président qui parle mais n’agit pas. Sauf, bien entendu, quand il s’agit de défendre les intérêts d’une classe, voire d’une caste quand on considère le nombre réel des bénéficiaires de sa politique.
Il reste à analyser un élément important. À l’issue du mouvement, le discrédit ne touche pas que le Président et son camp mais il affecte aussi les principaux responsables du PS. Si près de 68% des Français ont une opinion défavorable de Nicolas Sarkozy, ils sont près de 55% pour Martine Aubry ; les autres dirigeant écopent de scores similaires. Pourtant, on a pu voir les différents ténors du PS participer aux manifestations, qui – elles – ont eu l’assentiment d’une large majorité des Français. D’où vient alors ce qui apparaît comme une incohérence ?
On peut penser que les Français reprochent en fait au PS l’incohérence de ses réponses. Ce ne sont pas les propositions faites au début du mois d’octobre sur le commerce international, la risible conversion au « juste échange » qui fut justement dénoncée par Laurent Pinsolle1, qui pourrait les faire changer d’avis. La régression sociale que nous connaissons depuis des années, et dont la réforme des retraites n’est que l’une des facettes, a trois causes : le libre-échange, la financiarisation de l’économie induite par le refus des contrôles des capitaux et le fonctionnement de la zone Euro. Un ancien du PS, passé au Parti de Gauche, Jacques Généreux pour ne pas le nommer, identifie nettement ces trois causes dans un ouvrage qui vient de sortir2.
À refuser de prendre à bras le corps les problèmes réels, à vouloir substituer l’accompagnement social (comme on parle d’un accompagnement thérapeutique) du néolibéralisme à la lutte pour la souveraineté et le progrès social, le PS a perdu lui aussi toute légitimité. Il en paye aujourd’hui le prix.
Tel est donc la situation alors que nous ne sommes plus qu’à quelque dix-huit mois de l’élection présidentielle et des élections législatives. La victoire sur le mouvement n’a fait que nourrir et renforcer l’esprit de résistance, quand ce n’est pas celui de vengeance, voire de haine, à l’égard du pouvoir. Mais, ceci ne profite nullement à l’adversaire prétendument naturel de ce dit pouvoir. Le PS a décidément trop partie liée au « système » pour prétendre représenter une véritable alternative. Il est cependant possible que, par défaut comme l’on dit en informatique, il finisse par profiter de cet état de fait. À moins que cette situation ne profite a un quelconque démagogue que les grands médias audio-visuels auront indirectement fait germer.
L’issue de la crise ouverte par le mouvement social, et que la victoire tactique du pouvoir n’a pas fermée, dépendra largement de la capacité à faire émerger une véritable alternative.
De la nécessaire rupture et de ses risques de dévoiements.
Aujourd’hui plus que jamais, une rupture est nécessaire avec les politiques mises en œuvre à gauche comme à droite depuis le tournant de 1982-1983.
Nicolas Sarkozy s’était fait élire sur ce thème en le dévoyant totalement. Son échec est aujourd’hui patent. Ce ne sont pas les surenchères dans l’européisme ou l’atlantisme qui arriveront à le masquer.
La rupture est nécessaire pour éviter le piège de la déflation européenne qu’organisent tant les apôtres de l’équilibre budgétaire que les partisans d’une gouvernance européenne qui se réduirait à un contrôle sur les dépenses. Or, on sait bien que le plein-emploi et la première des variables en ordre d’importance pour l’équilibre du régime des retraites. Toute politique de déflation nous condamne à répéter le scénario dit de la « réforme ». Ajoutons, ensuite, qu’il y a une grande malhonnêteté à utiliser l’argument de « l’allongement de la durée de vie moyenne ». Compte tenu des différences suivant les catégories socioprofessionnelles la moyenne ici n’a guère de signification autre que mathématique. L’espérance de vie médiane serait un critère déjà plus réaliste. Au-delà, il faudrait ajuster l’age de départ aux conditions de pénibilité telles qu’elles se reflètent dans l'espérance de vie par profession, voire par métier. Telle est le sens de la revendication des syndicats sur la pénibilité, à laquelle le gouvernement a répondu de manière stupide par la notion de « handicap », ce qui ne peut que provoquer une montée des pressions sur les médecins pour accorder les taux de « handicap » requis. Notons encore que ainsi on va créer un nombre important de maladies psychosomatiques, qui viendront s’ajouter à celles déjà provoquées par le stress au travail. Quand on sait que dans des pays aux structures relativement comparables à celles de la France (Suède et Suisse) le coût de ces maladies (dites stress-induites) est de l’ordre de 3% du PIB, on voit que l’on a fait que déplacer le problème du déficit d’une caisse à l’autre.
La véritable rupture consisterait à mettre en place des écluses au niveau des échanges, qu’il s’agisse des doits de douane pour les pays hors UE ou de montants compensatoires pour certains des pays de l’UE, afin de compenser les écarts entre les niveaux de productivité et ceux des salaires globaux (en y incluant les charges). Le libre-échange ne fait qu’organiser la concurrence entre salariés, et entre systèmes sociaux dans le sens du « moins coûtant, moins disant » alors que la véritable concurrence devrait être celle entre les projets entrepreneuriaux. Elle s’accompagnerait du retour à un système de contrôle des capitaux, afin d’éviter les pratiques de concurrence fiscale et l’extension de la financiarisation. Elle se complèterait, pour les pays de la zone Euro, de la prise en compte de la différence des régimes d’inflation structurelle, ce qui nous conduirait à passer de la monnaie unique à la monnaie commune, et au retour à la souveraineté monétaire, protégée par le contrôle des capitaux mais réglementée par une coordination propre justement au régime de la monnaie commune.
Ces mesures ne constitueraient que le début d’une chaîne, une condition nécessaire mais pas encore suffisante, dont la cohérence ne serait atteinte qu’avec un accroissement des investissements dans le domaine des services publics et des biens collectifs et une véritable politique industrielle menée ici encore dans le cadre d’une coopération interétatique. Il faudrait alors suspendre et réviser une partie des directives européennes.
Notons ici qu’en l’absence de mécanismes organisant l’expulsion d’un contrevenant hors de la zone Euro ou de l’Union Européenne, un gouvernement résolu à la rupture disposerait de marges de manœuvres importantes. Quand on dit «on ne peut pas », c’est en réalité qu’on ne veut pas.
Cependant, il est clair qu’en l’absence d’une alternative clairement constituée, les risques de dévoiements dans de fausses ruptures sont aujourd’hui importants. Pour ne donner qu’un exemple, l’élection d’un Dominique Strauss-Kahn avec son auréole de directeur du FMI serait le type même de « fausse rupture ». La menace de cette candidature, dont on voit bien qu’elle commence dès à présent à être orchestrée dans la presse, est bien réelle. Ceci ne ferait que consolider les tendances déflationnistes actuelles. La pression exercée par les grands médias audiovisuels est importante. Elle crée l’équivalent du « framing effect » ou « effet de contexte » qui amène, inconsciemment, les individus à changer l’ordre de leurs préférences et, de cette manière indirecte, conditionne leur choix3.
Il y a deux façons de se prémunir contre pareil dévoiement. La première consiste à ce que les partis de la gauche de la Gauche expriment publiquement leurs réticences contre la présence parmi les candidats d’un homme qui a présidé à une organisation coupable de répandre la misère et le dénuement dans bien des pays. Dans la mesure où, pour être élu, il faudrait à notre possible candidat rassembler toutes les voix de gauche, une pression même marginale est capable de le faire réfléchir. Cependant, pareille démarche ne saurait être répétée systématiquement sous peine de perdre de sa crédibilité et par là de son efficacité. La seconde façon consiste à constituer dès à présent et sur la base de la mobilisation que l’on vient de connaître, des Comités d’Action et de Résistance. Largement ouverts à tous les participants du mouvement social, délibérément unitaires, ces comités pourraient être des structures ayant trois fonctions. Elles permettraient tout à la fois de sortir militants et sympathisants de leur isolement qui les rend vulnérables aux campagnes d’opinion et au « framing effect », de continuer à faire vivre la mobilisation en ces longs dix-huit mois qui précèdent les élections, enfin de servir de caisse de résonance pour la préparation de nouveaux combats.
Ces Comités d’Action et de Résistance peuvent être le moyen de garantir que la nécessaire rupture ne sera pas dévoyée. Ils seraient la meilleure réponse à apporter à la victoire tactique du pouvoir en indiquant que les salariés sont en mesure d’inscrire leur protestation dans la durée.
Légitimité, Légalité et Démocratie à l’épreuve.
L’une des leçons les plus claires que l’on puisse tirer du mouvement social de ces dernières semaines est qu’il a bénéficié d’une très forte légitimité, chose qui va de pair avec le discrédit qui frappe une bonne partie des élites politiques. Le gouvernement et le Président ont voulu opposer à cela la légitimité qu’ils tirent de l’élection. Le conflit de légitimité ne saurait pourtant exister que dans la tête de quelques-uns. Il relève en fait de l’ignorance dans laquelle se trouvent nombre de commentateurs.
L’élection ne garantit pas en effet la légitimité pour la totalité du mandat, ainsi que le prétendent tant les portes paroles du gouvernement que ceux du Président. Ceci revient à oublier, ou à ignorer, la différence qui existe entre le « Tyrannus absque titulo » et le « Tyrannus ab exertitio ».
Dans le premier cas, on appelle « Tyran », ou frappé d’illégitimité, celui qui arrive au pouvoir par des voies injustes. Ceci n’est pas le cas du pouvoir actuel et nul n’a contesté les élections tant présidentielles que législatives, ni leurs résultats. Mais, et l’on voit ici que la légitimité ne se confond pas avec la légalité, nous avons un second type de « Tyran », celui qui est « arrivé au pouvoir par des voies justes commet des actes injustes ». Tel est le cas devant auquel nous sommes confrontés aujourd’hui.
De fait, et exprimés en termes modernes, ceci revient à dire qu’un candidat ne saurait à la veille de son élection tout prévoir et faire des promesses couvrant la totalité du champ des possibles. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le législateur a, fort justement, proscrit le mandat impératif. Quand le candidat désormais élu doit faire face à des éléments imprévus, ou doit prendre des décisions par rapport auxquelles il ne s’est engagé que de manière très vague, il doit nécessairement faire la preuve de nouveau de sa légitimité et ne saurait la tenir pour acquise du simple fait de son élection.
Or, nous avons typiquement sur la question des retraites un débat sur la « justice », qui renvoie aux principes mêmes de notre Constitution, tels qu’ils sont exprimés dans son préambule. Notons, d’ailleurs, que ce débat fut précédé par quelques autres, qui ne plaidaient pas franchement pour le gouvernement.
En cherchant à passer « en force », en refusant le débat sur le fond, le pouvoir a été contraint d’exercer des moyens qui, étant dès lors dépourvu de légitimité, sont devenus par eux-mêmes des facteurs de trouble et de désordres. Il se propose désormais de doubler la mise en jetant en chantier le projet d’un nouveau traité européen qui sera probablement appelé à être ratifié en contrebande par des majorités de circonstance.
La constitution de ce pouvoir en « Tyrannus ab exertitio » se révèle dans ses actes présents comme dans ses desseins futurs.
Ceci ne fait que révéler la crise de la Démocratie que nous vivons de manière particulièrement intense depuis 2005 et qui s’est révélée au grand jour par l’abstention phénoménale lors des élections européennes. Dans une telle situation, les trajectoires que peuvent décrire les mouvements sociaux dépassent, et de très loin, leurs objectifs immédiats. Certains ont remarqué la dimension « anti-Sarkozy » qu’avait revêtue le mouvement. Mais nul ne s’est interrogé sur son origine. Dans ce mouvement s’est exprimée très profondément l’illégitimité du pouvoir et le refus de cette illégitimité par le peuple.
La Tyrannie appelle alors la Dictature. Ce mot ne doit pas être ici entendu dans son sens vulgaire, qui en fait un synonyme du premier, mais bien dans son sens savant. La Dictature est en effet une partie intégrante de la Démocratie. Il s’agit de la fusion temporaire des trois pouvoirs (exécutif, législatif et judiciaire) dans le but de rétablir les principes de la Démocratie. C’est bien un pouvoir d’exception, mais dans le cadre des principes de l’ordre démocratique.
Il faut donc poser la question de savoir si, pour rétablir la Démocratie et par là la souveraineté du peuple, compte tenu des dérives que nous connaissons depuis certaines années, il ne nous faudra pas en passer par l’exercice de la Dictature. Cette dernière n’aurait alors pas d’autres buts que de rétablir dans son intégralité les principes de notre Constitution, tels qu’ils sont inscrits dans son préambule où l’on affirme le principe d’une République sociale. Quand j’ai évoqué, il y a quelques semaines, la possibilité de gouverner par l’article 16 pour mettre entre parenthèses certains des traités qui font obstacle à l’accomplissement des principes contenus dans le préambule de notre Constitution, je ne pensais pas à autre chose.
Il est certes possible que l’on puisse éviter encore d’y avoir recours, et que l’on puisse sauver notre démocratie si malade et si mal traitée. Mais, ce sera par la combinaison des formes actuelles avec une organisation permanente d’une partie de la population dans les Comités d’Action et de Résistance et par le recours, sur des questions précises et avec un libellé clair, au référendum.
Cependant, plus nous avançons et nous éloignons des principes de la Démocratie et plus la Dictature apparaîtra comme la seule issue qui nous reste possible. Tel est, aussi, l’enjeu de ces dix-huit mois qui nous séparent des échéances électorales de 2012.
Jacques SAPIR
Directeur d’études à l’EHESS
1 L. Pinsolle, « Le juste échange du PS : un alibi », sur Marianne 2, le 10 octobre 2010.
2 J. Généreux, La Grande Régression, Le Seuil, Paris, 2010.
3 Les lecteurs trouveront l’explication des mécanismes du « framing effect » dans J. Sapir, Quelle économie pour le XXIè siècle, Odile Jacob, Paris, 2005, chapitre I.
Article très intéressant, qui à mon avis part d'une analyse correcte pour aboutir à une recommandation erronée. Cela en choisissant d'apporter à un problème de fond une réponse de forme.
Quand on reconnaît, mais à demi-mot, que la plus grande difficulté qui cloue la France au sol est l'Union européenne, on devrait en conclure qu'il faut sortir de cette institution.
Ne souhaitant pas aller jusque là, Jacques Sapir, sans doute pour préserver une position "internationaliste" (comme si l'Union était en quoi que ce soit internationaliste), cherche une voie moyenne. Qui consisterait, par exemple, à déclarer que l'on s'affranchit de certaines directives.
On voit bien que, même si l'UE ne prévoit pas d'expulsion de ses membres, des moyens de plus en plus nombreux de rétorsion se mettent en place.
De fait, un élu "sapirien" placerait d'emblée le pays en position d'accusé permanent au regard de l'Union européenne et du monde.
Pire, conscient de cette difficulté, Jacques Sapir fait appel à la notion de dictature pour remettre de l'ordre dans un chaos que l'élu sapirien aura créé lui-même !
Je crois sincèrement que la situation d'un tel élu (celle d'un NDA s'il devait parvenir au pouvoir par exemple), serait intenable dans la durée.
Il convient, pour établir une stratégie viable, d'être un peu plus audacieux dans l'analyse stratégique : c'est l'appartenance à l'Union européenne qui nous englue chaque jour un peu plus. Il faut donc en sortir.
Avec une stratégie ainsi un poil plus audacieuse, plus besoin d'une tactique dictatoriale. L'élu qui rendrait à la France sa liberté passerait douze mois à sortir de l'UE sans avoir besoin de pouvoirs exceptionnels, après quoi il serait libre de redonner au pays des structures économiques plus social-démocrates, ou participatives, selon que l'on adopte un vocabulaire de "gauche modérée" ou gaullien.
Tel que le comprends, l'appel à la dictature à la romaine est un effet rhétorique qui vient comme compenser le léger manque d'audace dont on fait preuve dans les conclusions tirées d'une analyse pourtant juste...
Rédigé par : edgar | 04 novembre 2010 à 14:22
Très bon papier. La question des « comités d’actions » est intéressante. Ces comités rappels étrangement les CAL (Comités d'actions lycéens), un groupe très actif en mai 68 qui agrégeait les jeunesses communistes. L’utilisation de ce terme est assez « marquée » et expose à la critique.
Donc l’objectif serait de profiter de la dynamique du mouvement social, en créant un autre « framing effect », à même de contrer la pression exercée par les médias audiovisuels. Mais :
- un « framing effect » pour en remplacer un autre… c’est un peu court…
- quid de leurs organisations. Ce type de structure va être amené à se politiser très rapidement, quel intérêt à devenir l’antichambre du PS (et/ou comment l’éviter).
- faire vivre la mobilisation et faire caisse de résonance. Ces comités auront’ ils, le moment venu, plus d’impacts sur la population que les syndicats et les mouvements d’opposition, probablement pas…
- lutter contre la victoire tactique du gouvernement. Mais précisément, ce type de victoire n’a par construction aucune tenue dans la durée.
- quelle « utilisation » finale des comités. Contrer Sarkozy, mais De Villepin fera tout pour le bloquer dans l’hypothèse ou il viendrait à se représenter. Faire passer la gauche… mais qui… Ce mouvement a discrédité la plupart des représentants politiques. Ce qui pose la question de l’exercice d’une dictature bienveillante.
Sur la question de l’exercice de la dictature (fusion des trois pouvoir) pour rétablir la démocratie, on en revient assez rapidement à la notion d’homme providentiel, au sens de quelqu’un dépositaire de l’intérêt de tous, un serviteur de l’état capable de réveiller cette grandeur nationale… Qui aujourd’hui peut tenir ce rôle, peut-on le confier à un comité de sage plutôt qu’à un seul homme. La question reste récursive : à qui donner ce pouvoir et comment le borner, le contrôler dans ses effets et dans le temps.
Rédigé par : GeoRad | 04 novembre 2010 à 16:34
Bonjour,
J'ai posé la question chez Marianne2 et je la repose ici:
"Juste une précision SVP car ce n'est pas explicite: l'article 16, ça serait avec ou sans Sarko aux manettes ? "
Rédigé par : 4 Août | 04 novembre 2010 à 17:42
Jacques Sapir inlassable pédagogue de la résistance à la grande régression.
L’argumentaire est percutant. L’idée de faire vivre le mouvement social, de le prolonger par des comités d'action et de résistance est particulièrement novatrice et nous devons la mettre en œuvre sans tarder. Il faut en parler lors de la manif de samedi, en discuter avec les syndicalistes les plus en pointe, et les militants des partis de gauche qui rejettent ce système barbare auquel Sarkozy, la droite extrême et les sociaux libéraux veulent nous soumettre.
Jean Bachèlerie
Rédigé par : jean Bachèlerie | 04 novembre 2010 à 21:46
L'article 16 instaure effectivement une certaine dictature, qui n'est cependant pas tout à fait celle des Romains. Son application permet d'assurer la continuité de l'Etat en cas de défaillance des institutions, juste le temps de remédier aux désordres.
Pourquoi parler de « mettre entre parenthèses » les traités ? Il s'agit de redéfinir complètement et définitivement nos modalités d'association et de coopération avec les autres Européens. La condition nécessaire et suffisante dans le cadre de nos institutions, en théorie du moins, est que le Président de la République et le Parlement veuillent la même politique. Cela ne peut résulter que d'une puissante volonté populaire en faveur de cette autre politique.
Le désir de changement existe et se renforcera sans doute dans l'année qui vient ; mais cela suffira-t-il ? On ne peut pas attendre des partis extrémistes qu'ils brisent durablement le système en place. C'est au centre qu'il faut construire une force de renouveau. Seul un centre nationiste et républicain serait susceptible de désagréger le PS d'un côté et l'UMP de l'autre (et d'écrabouiller le MODEM en passant). Encore faudrait-il le construire, ou du moins en accélérer la construction.
Rédigé par : Marsault | 04 novembre 2010 à 21:49
@Jacques SAPIR
La question est bien posée mais, un peu comme edgar, je me demande pourquoi ne pas proposer directement la sortie de l'Union Européenne et d'autre part de l'€uro groupe sous réserve d'une réponse positive à ces 2 questions lors d'un référendum national qui aurait lieu juste après la présidentielle.
L'option de rester dans l'UE tout en sortant de l'€uro (Cf la Grande-Bretagne) serait une 3ème option.
Gérard Schivardi, le "candidat des maires" (ex PS), qui représentait le PT en 2007 devenu POI entre temps avait bien proposé un tel changement radical dans son programme.
Cependant vu son score liliputien de 0,34% au 1er tour il faut croire que soit :
1) les électeurs ont d'abord vu chez ce candidat l'ombre de l'internationale Marxiste & Trotskiste
2) les électeurs s'opposent à la tutelle de Bruxelle mais souhaitent quand même rester dans les institutions de l'UE.
Il me semble qu'à ce jour seul le FN prends position en ce sens. DLR si j'ai bien compris proposerait de sortir de l'€uro groupe en cas d'échec des négociations pour réviser les statuts de la BCE mais ne propose pas de rupture franche avec l'UE.
Rédigé par : Santufayan | 05 novembre 2010 à 08:02
Bonjour à tous,
En ce qui concerne la sortie de l'UE je ne pense pas qu'il faille poser cette issue comme une solution mais comme une possible conséquence devant laquelle nous ne reculerions pas.
Les arguments pour une coopération, économique, monétaire, sociale et fiscale sont très forts. Assurément, l'UE est aujourd'hui un "machin" bureaucratique et neo-libéral. Mais prenons garde de ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain.
Je maintiens que la position nous offrant le plus de marges de manoeuvre dans le court et le moyen terme ets de prendre une série de mesures unilatérales, mettant nos partenaires devant le faut accompli et prenant acte de ce qu'il n'existe aucune clause pour l'expulsion d'un pays de la zone Euro ou de l'UE. Pour cette dernière les seuls sanctions prévues sont les amendes, mais que l'on peut parfaitement refuser de payer.
Il est clair que chez certains de os partenaires il y aurait des propositions de mesures de rétorsion. mais, si les allemands proposent de taxer les produits français, cela veut dire qu'ils reconnaissent la nécessité des taxes quand ils en éprouvent le besion. Nous aurions beau jeu de dénoncer leur hypocrisie. D'ailleurs, le commerce franco-allemand étant déficitaire toute surenchère dans ce domaine péaliserait bien plus l'Allemagne que la France (et je rappelle que l'excédent que l'Allemagne fait sur la France est supérieur non seulement à celui de tout autre pays de la zone Euro mais même à celui qu'ils font sur les Etats-Unis...).
Dans le domaine monétaire, une monétaisation d'une partie de notre dette ne laisse pas d'autre choix à l'Allemagne et à ses alliés (Autriche et Pays-Bas) que de sortir de la zone Euro ou de négocier avec nous.
Voila pourquoi je pense qu'un gouverement et un Président doivent pousser le système dans ses derniers retranchements avec comme perspective soit de provoquer une prise de conscienc chez certains de nos partenaires, sur la base de laquelle une réforme de l'UE et des mécanismes de la zone Euro sera possible, soit de provoquer l'explosion. Mais, dans ce dernier cas, nous aurions une bonne longueur d'avance et, comme l'on dit en droit nous "plaiderions saisi".
Maintenant, en ce qui concerne le volet "politique" de mon texte, je voudrais dire ici plusieurs choses.
(1) Lisez le texte attentivement. je parle d'une "dictature" (et non d'un dictateur, car la dictature peut être exércée par un gouvernement) qui serait légitime si elle avait pour objet le retour aux principes énoncés dans le Préambule de notre constitution (qui nous vient de la IVème république). Croyez-vous sérieusement que Nicolas Sarkozy ferait cela? Par ailleurs, je fais référence à "l'ordre démocratique" qui est défini avec précision das mon ouvrage de 2005 cité dans le texte.
(2) Les CAR sont ici une métaphore, qui s'inspire en fait des comités de Front Populaire mis en place après le 6 février 1934. Peu importe leur nom. Ce qui est important c'est la mise sur pied de structures unitaires de masse pour construire une alternative. Aujourd'hui, certains syndicats me semblent bien placés pour lancer un tel mouvement (La CGT, SUD, FO...) mais il peut (et même doit) provenir aussi d'initatives citoyennes (au sens émanant des citoyens...).
(3) L'effet de contexte joue essentiellement sur des individus isolés. Je vous renvoie à la litterature présentée dans mon ouvrage de 2005 (cité dans le texte). À partir du moment où l'on est en groupe et ou l'on interagit cet effet tend à disparaître.
Votre
J. Sapir
Rédigé par : sapir | 05 novembre 2010 à 09:33
> Sapir
Je ne pense pas que les syndicats puissent réellement faire plus que ce qu'ils font actuellement. Ils me semblent relativement largué sur le plan doctrinal, incapable de porter le débat sur les ruptures politiques et économiques qui seraient nécessaires au maintien des acquis sociaux. Ils restent dans la dénonciation des conséquences sans en percevoir les causes.
Ces CAR peuvent être autre chose qu'une métaphore ! Comme vous le dîtes très justement dans ce texte, il existe un vrai besoin pour beaucoup d'entre nous de pouvoir sortir de derrière nos écrans pour s'investir dans des structures ou des réseaux à finalité militante.
En ce qui me concerne, je suis prêt avec quelques uns à tout faire pour que ces réseaux voient le jour.
Au fait, c'est quoi le "framing effect" ??
Rédigé par : Malakine | 05 novembre 2010 à 09:54
@Jacques Sapir
Bonjour
Question assez "technique" ..
Serait -il possible de "jouer" sur l'article 123/2 de Lisbonne (ex 104/2 de Maastricht) qui est ainsi rédigé:
" Le paragraphe 1 ne s'applique pas aux établissements publics de crédit
qui, dans le cadre de la mise à disposition de liquidités par les banques
centrales, bénéficient, de la part des banques centrales nationales et de la
Banque centrale européenne, du même traitement que les établissements privés
de crédit."
Il serait aussi possible de proposer à l'UE l'adjonction d'un 123/3:
"Dans le but de supprimer les obligations de paiement d’intérêts sur les dettes publiques de chaque pays de la zone euro, les dettes de ceux-ci seront remboursées aux échéances aux détenteurs actuels par monétisation de nouveaux titres achetés par la Banque Centrale Européenne dans la limite annuelle de X % de la dette initiale."
... auquel il faudrait rajouter un 123/4
( Nouveaux besoins d’investissements nécessaires (transition énergétique) )
"Dans le but de soutenir l’économie des pays membres, et par exception au paragraphe 1, soit le Trésor Public, soit un établissement de crédit nommément désigné pour chaque État, peut obtenir de la part de la Banque Centrale Européenne les fonds correspondants aux obligations d'État déposées en contrepartie, pour une utilisation exclusive d'investissements reconnus d'utilité publique, collective ou écologique, dans des domaines d'application dont la liste aura été préalablement définie et votée par le Parlement de chaque État. Le taux d'intérêt appliqué à cette émission monétaire sera celui dit "de refinancement" appliqué aux établissements de crédit privés."
Cordialement
Rédigé par : A-J Holbecq | 05 novembre 2010 à 14:57
@ Jacques Sapir
Concernant la sortie de l'UE, je ne vois pas bien de quel bébé vous parlez. Jusque-là il m'avait semblé que le machin était particulièrement stérile.
Par ailleurs je ne vois pas pourquoi nous aurions besoin d'un tel machin pour développer des coopérations économiques. Et je ne vois pas non plus pourquoi il serait plus important et plus judicieux de développer de telles coopérations avec des pays européens plutôt qu'avec les pays francophones ou avec les pays arabes (je pense en particulier aux anciennes colonies françaises), ou avec des pays asiatiques, ou avec les pays latino-américains, ou avec la Russie, ou avec les Etats-Unis, etc. La France n'a-t-elle pas vocation à être universaliste à l'intérieur, et internationaliste à l'extérieur ? Et dans ce cas, quel sens cela peut-il avoir de privilégier a priori les relations avec les pays européens ? Que ceux-ci soient nos voisins géographiques ne me semble pas être un argument de grand poids.
Du coup, je ne vois pas pourquoi on écarterait l'option consistant à sortir tout d'abord et unilatéralement de l'UE. En outre ce serait une attitude plus digne et plus transparente que celle consistant à renier l'esprit et la lettre de traités que nous avons signés.
A propos de la dictature, je ne vous ferai sûrement pas de mauvais procès d'intention, mais je suis sûr que d'autres ne s'en priveront pas… Alors je suggère plutôt d'adopter une idée que le P"G" a d'ailleurs mise en avant dans son nouveau programme : la convocation d'une Assemblée constituante. Personnellement, j'ajouterais volontiers un gouvernement provisoire, et un referendum préalable pour approuver le caractère constituant de l’Assemblée (et non pas seulement un referendum ultérieur pour approuver la nouvelle constitution). Je crois que l'on pourrait avec profit s'inspirer ainsi de la procédure suivie en 1945-1946, et même pourquoi pas y faire référence explicitement. Je précise que si je me suis intéressé à cette idée d'Assemblée constituante et de gouvernement provisoire, c'est d'abord parce que cela m'apparaissait comme le moyen le plus adéquat et le plus rapide de sortir de l'UE unilatéralement…
Rédigé par : Joe Liqueur | 05 novembre 2010 à 20:17
@ Malakine et JSapir
Malakine a partiellement raison, les têtes des syndicats demeurent complètement compromises dans le système... Raymond Soubie a bien fait son boulot et l'éminence grise de Bernard Thibault (JC Le Duigou) n'est pas connu pour son radicalisme.
CFDT, CGT adhèrent aux principes de libre-marché car ils sont membres de la Confédération européenne des syndicats. Force Ouvrière a une position plus critique (critique de Maastricht, du Consensus de Washington et de l'euro) mais n'ose franchir le pas. CFTC, europhile par héritage démocrate-chrétien, tente de faire du protectionnisme inversé avec la traçabilité sociale.
La renégociation possible du Traité de Lisbonne pourrait éventuellement apporter un angle de tir inédit afin d'en finir avec l'Europe oligarchique.
Rédigé par : René Jacquot | 05 novembre 2010 à 20:56
À A.J. Holbecq
Théoriquement c'est possible, mais il faudrait l'accord des 26 autres pays...
On peut cependant utiliser cet argument pour expliquer qu'une monétisation unilatérale est possible dans le cadre de l'UE.
Pour Joe Liqueur.
Ne nous y trompons pas. Nous faisons la plus grande partie de notre commerce en Europe. La coopération économique au sein de la zone a un sens plus fort que la coopération hors zone (même si cette dernière est souhaitable bien entendu).
Quand je dis "ne pas jeter le bébé" je pense aux principes d'une coordination des politiques économiques et monétaires. Cette coordination est utile si elle est au service d'une projet commun. Si c'est de la coordination pour de la coordination, la je suis d'accord avec vous c'est complètement stérile.
J'avoue que j'ai du mal à concevoir un scénario de type 1945/46. La "dictature" entendu au sens savant et non au sens vulgaire me semble plus praticable.
Votre
JS
Rédigé par : Sapir | 06 novembre 2010 à 01:00
Tiens, les commentaires sont ré-ouverts et personne ne m'a rien dit (non, je n'irai pas sur fessebouc)!!!
Je ne voudrais pas gâcher l’ambiance mais je ne crois pas une seconde à la possibilité de créer et de faire fonctionner efficacement, dans les 18 mois qui viennent, ces fameux "Comités d’Action et de Résistance". Il y a d’ailleurs déjà un type de structure équivalent en place en France c’est ATTAC et son influence est actuellement marginale. L’association peut certes se prévaloir d’un rôle non négligeable dans l’obtention du "NON" à la constitution européenne mais elle avait quelques années de fonctionnement et d’expérience derrière elle, quand elle s’est engagée dans ce combat.
Il y a aussi eu des tentatives de rassemblement pour certaines élections dans des comités ad hoc regroupant ATTAC, le PC et d’autres mais les résultats n’ont pas vraiment été à la hauteur des espérances.
Bref, à moins de voir surgir un véritable mouvement révolutionnaire qui chamboulerait tout et mettrait alors dans l’urgence des structures nouvelles en place, il est illusoire de vouloir créer à partir de rien de nouvelles structures. Illusoire et dangereux car cela détournerait des énergies qui pourraient être utiles ailleurs. Car je crois qu’il faut être pragmatique et utiliser les structures – certes imparfaites mais ayant l’immense mérite d’exister – en place si l’on veut être efficace. Alors à tous ceux qui ressentent le besoin de sortir de derrière leurs écrans pour s'investir dans des structures ou des réseaux à finalité militante, il n’ y a qu’une chose à faire : arrêtez de fantasmer sur l’organisation parfaite avec laquelle vous serez d’accord sur tout – elle n’existe pas – et prenez votre carte chez Dupont Aignan, chez Mélenchon, ou ailleurs (?) et agissez à travers ces organisations. Il n’y a pas d’autres solutions à court ou moyen terme.
Rédigé par : RST | 06 novembre 2010 à 10:39
@ JACQUES SAPIR
Le projet d'alternative économique et social que vous proposez n'a de chances d'aboutir que s'il y a un fédérateur comme l' a essayé JP Chevènement en 2002. Rassembler les Républicains des 2 rives de Nicolas Dupont-Aignan jusqu'à Jean Luc Mélenchon en passant par les royalistes de la Nouvelle action royaliste.
Rédigé par : cording | 06 novembre 2010 à 11:47
L'argument des coopérations utiles au niveau européen me paraît flirter avec le surréalisme. Chaqu jour qui passe montre à quel point le moindre consensus établi au niveau des 27 est toujours boiteux, fondé sur le plus petit commun dénominateur et débouchant sur rien.
Je trouve intéressant de mettre en balance de cette coordination future toujours hypothétique (une sorte d'équivalent rationalisé de l'ancienne promesse de paradis chrétien), l'analyse de Dani Rodrik (Capitalisme 3.0, conférence traduite sur mon site : http://www.lalettrevolee.net/article-capitalisme-3-0-de-dani-rodrik-entre-protectionnisme-et-libre-echange-60318392.html)
Il montre bien l'intérêt qu'il y aurait à une certaine refragmentation du monde.
Rédigé par : edgar | 06 novembre 2010 à 13:51
Les commentaires sont ouverts à titre exceptionnel, parce que le texte n'est pas de moi. Mais quand je lis vos commentaires de monomaniaques obsessionnels pisse-froid, enfermés dans leurs petites certitudes, systématiquement critiques et négatifs et ne sachant précher que pour votre microscopique chappelle ça ne m'incite pas à les réouvrir.
Rédigé par : Malakine | 06 novembre 2010 à 14:13
je dois me sentir concerné ?
Rédigé par : edgar | 06 novembre 2010 à 14:36
La coopération n'exclut pas le conflit...
Il y a eu plein de situation dans lesquelles la présence d'un conflit (y compris une guerre) n'a pas empêché la coopération entre pays qui y participaient. De même la coopération n'interdit pas le conflit (cf les relations entre les Alliés de 1941 à 1945...).
Il faut cesser d'opposer coopération et conflit. Aujourd'hui, il est clair que nous allons effectivement vers un re-fragmentation du monde. C'est même le thème de mon livre à paraître fin janvier "La Déglobalisation".Mais, cela ne veut pas dire que nous n'aurons pas de possibilités de coopération.
Si nous nous situons dans l'univers de la politique il convient de regarder non pas la solution "optimale" (bonne pour les modélisateurs) mais des solution "suffisantes" qui doivent être simples et robustes. C'est pourquoi je ne crois pas à la solution préconisée par le FG, non que je sois en désaccord avec elle, mais parce qu'elle me semple inutilement compliquée.
De même une décision de "sortir de l'Euro" me semble moins efficace qu'une solution consistant à pousser l'Euro dans ses limites (et à laisser nos adversaires/partenaires se prendre les pieds dans la tapis pour nous exclure...).
La comparaison des CAR avec ATTAC ne me semble pas pertinente en ce que ATTAC est une organisation aux visées très larges (éducation populaire). Je propose un cadre de réunion au niveau local afin de ne pas laisser les individus isolés. Si nous voulons que cela marche il ne faudra pas être trop exigeant. Ce n'est certainement pas l'amorce d'un nouveau parti.
Par contre, cela peut permettre à des personnes qui, autrement, auraient été isolées de se parler et de tester leurs capacités de convergence.
Votre
JS
Rédigé par : Sapir | 06 novembre 2010 à 16:33
question de tactique : si effectivement, l'idée est de décider de ne plus soumettre les décisions nécessaires en matière économique à nos "partenaires européens", le choix de ne pas sortir immédiatement peut se défendre. Intellectuellement je vous suit parfaitement. Politiquement en revanche, je ne voterais pas pour un politique qui défendrait un tel programme : il y a trop de risques pour que cette position finisse par une énième variation sur le thème l'europe est imparfaite mais nous allons l'améliorer.
5 ans, c'est court. Une forte tête qui déboulerait dans le jeu européen en expliquant qu'il va tout changer, s'il ne réussit pas à imposer ses vues en 6 mois, est perdu. Après, si ce politique a écarté d'emblée la solution de sortie unilatérale, il ne peut y avoir recours dans un deuxième temps.
Comment ne pas imaginer qu'un "dur" se ferait élire sur un programme de montants compensatoires par exemple et finisse par s'estimer satisfait 6 mois après parce qu'il aurait arraché l'équivalent d'une taxe carbone ? Après tout l'Union peut se prévaloir d'un certain protectionnisme avec l'interdiction des ampoules tungstène. Elle serait parfaitement capable de deux ou trois concessions provisoires à un président fraîchement élu, en attendant de le voir remplacer par un autre...
Je ne crois pas au mandat impératif, mais un candidat qui serait élu avec comme tête de programme la sortie de l'Union pourrait très difficilement faire autre chose. Un candidat qui serait élu sur le thème de montants compensatoires, de protectionnisme européen ou autre projet soumis à interprétations multiples aurait beaucoup moins de mal à se satisfaire de peu...
Dans le domaine du change, par exemple, une mesure de type : on compense par une taxe les écarts de change par rapport à la PPA me semble similaire à une sortie de l'Union. C'est clair et ne peut facilement être détourné en truc filandreux.
Intellectuellement je vous suis parfaitement, sur le plan pratique je crains que l'excés - apparent -soit de rigueur.
Rédigé par : edgar | 06 novembre 2010 à 18:09
Assez d'accord avec "edgar"
Les prochaines élections se joueront, je crois, entre "souverainistes" et "européistes"
Le risque est celui d'un candidat souverainiste qui aurait tendance à essayer d'obtenir des "aménagements" avec l'U.E., par la négociation.
Il faut donc un candidat (et un parti) qui considère son mandat comme "impératif" (bien que la Constitution l'interdise). Ce sera en tous cas mon vote.
Rédigé par : A-J Holbecq | 06 novembre 2010 à 19:39
Je ne dirais rien sur les spéculations politiques ou sur la stratégie à mettre en oeuvre une fois au pouvoir. Je crains que ces discussions soient sans objet dans l'immédiat. Je voudrais me concentrer sur ce qu'on peut faire ici et maintenant.
Je soutiens à 200 % le projet des CAR. C'est d'aileurs une idée que je nourris depuis plusieurs mois. J'ai déjà créé un groupe sur Facebook pour réunir ce qui voudraient que ce projet se réalise et je ferais tout ce que je peux, avec eux, pour qu'il voit le jour.
Si Jacques Sapir veut bien accorder sa caution à ce projet, nous pouvons essayer de lui donner un caractère militant et politique. Si ce n'est pas le cas, on pourrait se passer de la dimension militante pour ne conserver que l'objectif de sortir les "dissidents" de leur isolement en créant du réseau sur le plan local. Cet objectif suffit à se mobiliser.
Il y a là un vrai besoin. Les partis politiques (à supposer qu'il en existe de notre sensibilité actifs sur les territoires, ce dont je doute fort) ne sont pas des lieux de fraternisation et de socialisation, mais surtout des lieux de rivalités et de satisfaction des ambitions personnelles.
Les échanges sur internet non seulement ne produisent rien mais se révèlent destructifs pour ceux qui produisent, comme si notre esprit critique finissait par se projeter prioritairement contre les plus proches de soi.
Si je n'avais comme retour que les commentaires que je lis en réaction à mes articles, de plus en plus mécaniquement critiques et négatifs, chacun venant pour souligner son petit point de désaccord ou sa petite réserve, jouissant de déposer sa "petite crotte" j'aurais tout arrêté depuis bien longtemps. Ou plutôt je n'aurais pas repris l'an passé. Parce que franchement, c'est de pire en pire !
Si j'ai pu reprendre, c'est qu'une personne de mon réseau FB m'a invité en Juillet dernier à une réunion des "patriotes du grand est", une journée amicale et conviviale consacrée à l'échange d'analyses et à faire connaissance. Par la suite, toujours grâce au même réseau, j'ai vécu d'autres moments similaires. Aujourd'hui, c'est ce qui me donne l'énergie de continuer.
Créer du lien social est un objectif politique, d'une manière générale pour aider à la refondation d'une nation "post-invidualisme", mais aussi d'un point de vue pratique pour que chacun puisse parvenir à conserver ses analyses et son engagement.
Je n'ai toujours pas compris la notion du "framing effet", mais s'il s'agit de dire que les individus isolés finissent toujours pas être conditionnés par leur environnement ou bien dépriment et renoncent à leurs convictions, je suis bien d'accord ! Les alternatifs ont besoin d'un écosystème relationnel pour continuer à l'être. A mon avis, c'est la première fonction des CAR.
A ce propos, l'intitulé est peut-être inadapté car trop militant et évoquant trop l'idée d'un parti politique en gestation. Il y a certainement place pour l'émergence d'une nouvelle formation, mais compte tenu du pessimisme ambiant et de l'hostilité généralisée, je suis persuadé qu'il serait contre productif d'afficher cet objectif trop clairement d'emblée.
Rédigé par : Malakine | 06 novembre 2010 à 20:58
@ Malakine
A mon avis, et sans être pessimiste, nos idées ne triompheront pas en 2012 puisqu'il y a fort à parier que le vainqueur sera soit le candidat du PS, soit celui de l'UMP.
En revanche, l'élection présidentielle peut représenter une tribune afin de médiatiser davantage ces idées.
Concernant les CAR, l'idée semble intéressante et doit être développée. Il est clair que la tâche n'est pas aisée mais rien n'est infaisable. D'ailleurs, quelqu'un n'a-t-il pas dit un jour que "ensemble tout devient possible" ?
Rédigé par : Tomgu | 07 novembre 2010 à 01:29
@ Malakine
Je suis OK moi aussi pour m'investir dans une association ayant une vocation politique(je n'ai pas dit un parti politique) à condition que celle-ci ait des objectifs concrets.
Par exemple, un 1er objectif pourrait être de créer les conditions nécessaires (on parle de facilitateur dans l'entreprise) à la constitution d'une plate-forme pour une candidature souverainiste unifiée en 2012, ce qui supposerait au préalable de définir quel est le plus grand dénominateur commun.
Dans un 2ème temps, il s'agirait de prendre contact avec les partis politiques concernés dont DLR, MRC, RIF, ... pour affiner cette plate-forme.
Je suis d'accord avec toi qu'internet sous la forme de blogs / forums ne permet pas d'agir directement sur le réel par contre c'est utile pour échanger des points de vue avant d'aller plus loin. C'était le but des commentaires sur Horizons et je vois cela aussi comme très positif.
Rédigé par : Santufayan | 07 novembre 2010 à 11:04
Des propos très intéressants et qui restent rarement entendus chez les intellectuels.
Sur l'Europe je vais cependant rejoindre edgar pour dire que le temps est plus que venu de donner un coup d'arrêt à cette construction qui s'enferme purement et simplement dans une idéologie et une impasse.
Cela ne veut pas dire qu'il faille se couper du monde ou cesser toute coopération avec nos principaux partenaires économiques, rien de tel. Ce sont avec les institutions qu'il faut se couper pas avec les peuples.
Pour changer l'Europe, il faut d'abord sortir de cette Europe et de sa philosophie supranationale qui entend construire un véritable Etat-unique. Ce ne sont pas quelques directives qui sont à revoir mais le système dans son entier, la primauté du droit européen, car sinon, comment pourrait-on à nouveau parler de souveraineté et de démocratie ? Bruxelles est la capitale mondiale des lobbys, comment en faire la capitale des intérêts des peuples européens et en l'occurrence, de la France ? Et comment tout en restant dans ce système ne pas aboutir, in fine à la prochaine étape logique ?
A quoi sert l'assemblée nationale face à un exécutif fort qui est le véritable auteur des textes ? Surtout dans le cadre du "fait majoritaire" et du quinquennat ? Elle est déjà réduit à quelques amendements et à un rôle de contrôle.
Et maintenant, à quoi sert le Parlement dans un système où la quasi totalité de notre droit vient d'une échelle supérieure ? Chambre d'enregistrement. Les directives, par ailleurs, dont l'esprit initial était de laisser une marge de manœuvre aux Etats-Membres sont de plus en plus précises et du fait de la jurisprudence de la Cour de justice de l'union et de la pratique des Parlement (le copié-collé) elles ont d'avantage les traits d'un règlement.
Comment empêcher qu'une fois constatée l'inefficacité d'un tel empilement structurel et de l'inutilité du Parlement national on ne décide sa suppression pour un dialogue privilégié entre l'UE et des régions aux compétences élargies ?
Ces mouvements de fonds sont ceux de l'Union européenne actuelle.
Et bien elle devra à présent se confronter aux leçons de l'Histoire qui est que - comme le dit Roland Hureaux - « On ne gouverne pas hors d’une forme ou d’une autre de consentement », le consentement à l'impôt est en effet à la source des révolutions anglaises, américaines et française.
La légitimité démocratique de l'Union européenne, par delà l'enchevêtrement des institutions qui est censé la garantir, a à peu prêt autant de substance que la légitimité théocratique de Louis XVI en 1789.
« Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la Nation. » Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen du 26 août 1789, article 3.
Cela n'est plus respecté mais reviendra à l'ordre du jour tôt ou tard.
Rédigé par : Eurokritik | 07 novembre 2010 à 22:28
A Jacques Sapir,
Le projet des CAR (ou équivalent sous quel nom que ce soit) est tout à fait
intéressant. Durant toute la période de mobilisation, je me suis senti
extrêmement frustré au moment de la dispersion des manifs. Des organisations de
ce type auraient alors eu une fonction très positive. Les choses seront
peut-être plus difficiles à mettre en place une fois l'effervescence des
dernières semaines passée, mais le coup pourrait être tenté.
Je suis beaucoup plus réservé sur la proposition dictatoriale. "La dictature
fait partie de la démocratie", dîtes-vous or je ne vois guère à quoi vous faîtes
allusion.
En convoquant mes souvenirs d'histoire romaine je me rappelle bien la
magistrature d'exception de l'époque républicaine mais enfin la République
romaine était une sorte de démocratie extrêmement spéciale, plus exactement un
composé des différentes formes classiques de pouvoir (monarchie, aristocratie et
démocratie) à tendance impérialiste notable. On remarquera d'ailleurs que si la
dictature était initialement parfaitement légitime dans le cadre des
institutions républicaines et strictement limitée dans le temps (6 mois), elle
finit par être progressivement étendue jusqu'à dégénérer en une forme de pouvoir
personnel fatal à la République. Plus tard, les révolutionnaires français férus
d'histoire antique en ranimeront le souvenir dans leurs débats et polémiques
sans que cela ne se concrétise par une renaissance de la fonction (au contraire
du consulat). Depuis, le terme a connu une large extension et perdu en rigueur
tout en prenant une connotation extrêmement négative dans l'usage courant, mais
même si on se référait à l'usage classique, je ne vois pas vraiment comment on
pourrait l'intégrer au dispositif démocratique moderne.
Bien à vous,
Rédigé par : Emmanuel B | 08 novembre 2010 à 19:51