L’échec de la tentative de ces derniers jours des Banques Centrales à inverser le cours du Dollar américain, et l’impossibilité d’exercer des pressions efficaces pour une réévaluation du Yuan chinois, indiquent bien que la question des changes est aujourd’hui au-delà de ce que peuvent contrôler les pays du G-20. En particulier, rien ne semble pouvoir arrêter le processus de surévaluation de l’Euro. Les bribes de réglementation sur la question des rémunérations et des bonus qui ont été arrachées ne sauraient ici tromper qui que ce soit.
La crise du Dollar va donc continuer à s’amplifier dans les mois à venir, provoquant des ajustements qui – en raison de leurs poids cumulatifs – vont très probablement conduire à une crise ouverte du système monétaire international. Les marchés des matières premières – hydrocarbures mais aussi céréales et métaux – seront de plus en plus déstabilisés car ils deviendront l’un des refuges de la spéculation. Faute d’aboutir à une solution concertée, qui clairement n’est pas possible aujourd’hui, c’est bien vers des initiatives régionales que l’on s’oriente. Dans leurs formes actuelles cependant, ces initiatives ne sauraient constituer qu’un palliatif. Il est même douteux que pour certaines d’entre-elles, et l’on pense ici spécifiquement à l’Euro, il arrive à se constituer en réelle alternative.
Merci à Jacques Sapir pour cet article éclairant.
Sur l'Euro
Au moment où Jean-Claude Trichet exhorte d'ores et déjà les Etats à réduire leurs déficits et leurs dettes, Jacques Sapir nous rappelle que l'Europe demeure un nain politique et monétaire du fait des phénomènes de l'Eurodivergence.
De plus, l’évolution du taux de change de l’euro est toujours procyclique : lorsque la croissance ralentit en Europe, l’euro s’apprécie. L’euro est la variable d’ajustement des déséquilibres globaux. Cette appréciation de l’euro crée des dynamiques divergentes en Europe ; c’est un exemple de choc asymétrique.
Un autre exemple de choc asymétrique est la politique de modération salariale menée en Allemagne (qui fait toujours consensus même avec la Crise)et qui accroît la divergence interne.
L'Euro comme le dit J Sapir ne peut donc être un substitut au dollar.
Sur les USA
7 millions d'emplois dans le secteur non agricole ont été détruits depuis janvier 2008 selon les statistiques américaines.
Le taux de chomage pourrait être au-delà des 10% si l'on compte les travailleurs dit "découragés" (on évoque près de 16 % de chomage global) et je ne parlerai même pas des situations de sous emploi (intérim, temps partiel) qui ont bondi depuis le début de la Crise.
Quant à la bulle sur les bons du trésor américains, je la vois exploser mi-2010.
Sur le Traité SUCRE
Il ne fait pas de doute que le Président Zelaya avait l'intention de signer le traité SUCRE mais certains oligarques n'ont pas vu cela de cet oeil...
Rédigé par : René Jacquot | 09 novembre 2009 à 16:02
Exact .
La FED nous baigne de dollars et l'euro s'apprécie.
D'après les économistes, la RDA aurait perdu son industrie car elle a adopté le Deutsch Mark de l'ouest (manque de compétitivité).
Les grande entreprises allemandes comme VW ont préféré investir en Europe de l'Est (ex: Skoda) qu'en Allemagne de l'Est.
Voila ce qui attend l'industrie de beaucoups de pays de l'UE avec un euro à 1.5 $
Rédigé par : Abdel | 09 novembre 2009 à 23:06
@ Malakine
Merci de nous donner l’occasion d’échanger avec un spécialiste tel que Sapir.
@J.Sapir
Merci pour ce texte très clair qui brosse un paysage complet de la situation.
Quelques questions d’"économiste amateur" pour vérifier que j’ai bien tout compris:
1) Les pourcentages des tables 1,2 et 3 sont bien des pourcentages de PIB ?
2) « Ces émissions seront en partie financée par la Banque Centrale » : Cela signifie que les bons du Trésor vont être achetés directement par la FED (création monétaire) parce qu’il n’y aura pas assez de "clients" extérieurs intéressées par ces bonds du trésor ?
3) Que faut-il comprendre par « En l’absence de tout mécanisme de péréquation des revenus à l’échelle de la zone ». Serait-il possible de donner un exemple d’un tel mécanisme.
Et une question plus générale : l’idée de zone monétaire régionale semble être partagée par de nombreux spécialistes comme par exemple, ceux qui ont participé au dernier colloque de la fondation Res Publica. J’ai bien noté que le SUCRE n’avait pas pour ambition d’être une monnaie unique mais une monnaie commune (comme l’ancêtre de l’Euro, l’Ecu). Cela me parait une bonne chose. Néanmoins, ne pensez-vous pas que, compte tenu de la nature de la monnaie, l’aspect politique joue un rôle majeur et que pour qu’un système tel que le SUCRE fonctionne, il faut un minimum de coordination à ce niveau ? Sans parler de gouvernement commun, ne faut-il pas que ces pays mettent en commun un certain nombre de choses dans un modèle de confédération et quelles sont leurs chances d’y arriver ?
Rédigé par : RST | 10 novembre 2009 à 11:10
Je ne vais pas m'exprimer sur l'analyse économique que je trouve très éclairante. Je voulais introduire, tout comme Abdel, la dimension politique. Bien que cette initiative soit importante au niveau économique, il ne faut pas oublier le rôle et surtout la "perception" politique des pays engagés. J'habite en Amérique Latine (Costa Rica), et il est clair que les élites de ces pays voient de très mauvais oeil tout ce qui vient des pays de l'ALBA. Ceux-ci sont sans cesse qualifiés de "communistes", voire "terroristes". Dans une telle ambiance, et avec de prochaines élections en Argentine et au Brésil, quelles pourraient être les changes à long terme pour ce type de système régional? Peut-on, en plus, légitimer la participation de pays comme le Nicaragua ou même Cuba, dont le système politique restreint de plus en plus la participation démocratique?
à cela s'ajoute une dernière question: même si les US ne peuvent pas mener un "troisième front" en AL, il est clair qu'une telle initiative n'est pas bien vue depuis Washington. Que vont-ils faire? Je pense notamment à leur présence en Colombie, et à leur future installation au Panamá...
Rédigé par : Luis | 10 novembre 2009 à 15:35
Article très instructif, même si je n'en ai pas saisi toutes les subtilités.
par contre, je suis plus que sceptique sur l'application aux pays de l'ALBA. Cette association de pays sans continuité géographique, sans homogénéité économique ou politique fait plutôt penser à ce qu'était l'AELE au début des années 60.
Peut-elle être autre chose qu'une tribune des pays opposés à la politique des États-Unis.
Le Mercosur pourrait être au contraire l'embryon d'une telle zone.
Par ailleurs, la politique modérée et subtile de Lula semble autrement plus efficace pour s'opposer aux USA que les bouffonneries de H. Chavez.
Rédigé par : Aluserpit | 12 novembre 2009 à 01:12
Oups, le lien c'est vers l'AELE.
Rédigé par : Aluserpit | 12 novembre 2009 à 01:16
Toujours dans les problèmes de change, petite phrase lue au détour d'une interview dans Le Monde: "Dire que l'euro à 1,50 dollar n'est pas un problème pour l'Allemagne, comme l'a fait Karl-Theodor zu Guttenberg, l'ex-ministre de l'économie allemand, alors que ce cours est trop élevé pour presque tous les autres pays de la zone euro, c'est une manière d'annoncer le commencement de la fin de la zone euro."
Il n'y a pas une virgule à changer!
Rédigé par : Aluserpit | 12 novembre 2009 à 01:27
tu ne t'ennuies pas ... maintenant c'est copier coller de Jacques Sapir ! bravo !
Rédigé par : Adso de Melk | 18 novembre 2009 à 16:27