L’Appel du Net (A.D.N) à Nicolas Sarkozy, Ségolène Royal et François Bayrou.
Parmi les différents candidats qui se sont déclarés prêts à concourir la prochaine élection présidentielle, vous êtes les trois candidats les plus crédibles pour accéder à la magistrature suprême en raison de votre expérience, votre crédibilité ou des intentions de vote. Dans quelques mois, l’un ou l’une d’entre vous s’inscrira dans une longue lignée de dirigeants qui prend sa source avec Clovis. Du haut des sondages, quinze siècles d'histoire vous regardent. Vous allez présider aux destinées d’un pays de 60 millions de Français, et succéder à des noms prestigieux comme de Charles de Gaulle ou Napoléon, en passant par Henri IV, ou d’autres gouvernants dont l’action ne les a pas permis de passer à la postérité.
Nous sommes des membres anonymes de la blogosphère, cette communauté internet faite de citoyens intéressés par le monde et la politique. Nous nous efforçons par nos analyses et nos commentaires, d’éclairer les enjeux, d’apprécier vos propositions et de dégager le sens de cette campagne. La plupart d’entre nous ne sont pas engagés dans un parti politique. Nous sommes en revanche tous des observateurs attentifs et exigeants du débat public. Votre début de campagne, où chacun d’entre vous promettait, qui le changement, qui la rupture, nous a donné l’occasion de parler réellement de politique. Hélas, nous constatons que votre campagne perd chaque jour un peu plus en substance, et nous craignons qu’elle ne finisse par s’enliser dans la tourbe qui a perdu tant de précédents rendez-vous électoraux. Le débat se résume de plus à plus à des petites phrases, des dénigrement sectaires et systématiques de vos adversaires, et à une multiplication de discours catégoriels destinés à flatter vos clientèles supposées, tout en faisant l’impasse sur les grands enjeux de ce début de siècle.
Vous être en train de vous laissez aller à une « starcadémisation » de la compétition électorale, soigneusement entretenue par des médias, plus soucieux de stimuler leur audimat que de contribuer à la formation du jugement du citoyen.
Certes, vous pourrez probablement gagner en 2007, comme d'autres avant vous ont gagné en 1988, 1995 ou 2002, au terme d’une campagne d’image et toute centrée sur votre personne ou le rejet de l’adversaire. Ce ne serait cependant pas un service qui vous rendrez à votre Pays. 2007 n’est en effet pas une campagne comme les autres. En ce début de siècle, la France se trouve confrontée à d’immenses défis qui conditionneront son avenir, auxquels le nouveau président devra tôt ou tard faire face, et qu’il ne pourra pas traiter dans le dos du peuple qui l’a élu.
En 2007, la France est confrontée à une mondialisation qui transfère inexorablement le travail, y compris désormais le travail qualifié, dans les pays à bas coût, et organise l’évasion de nos capitaux. Notre modèle social est menacé par le libre-échange qui fait pression sur les salaires et la concurrence fiscale et sociale qui paupérise l’Etat.
En 2007, l’Europe est en panne depuis le non au référendum sur le projet de traité constitutionnel, sans qu’aucun dirigeant français ait jusqu’ici pu reprendre à son compte l’expression populaire et la traduire en projet alternatif.
En 2007, la France aborde le défi du vieillissement sans avoir prévu les sommes nécessaires, ni au financement des retraites du papy boom, ni au financement de dépendance, et avec une dette qui étrangle déjà toutes ses marges de manœuvre.
En 2007, l’école n’est plus le creuset républicain d’autrefois. Elle fabrique chaque année une armée de jeunes sans qualification ayant pour seule perspective de vivre toute leur vie de revenus d’assistance. Elle est l’école de la désintégration sociale, de la violence, et du repli identitaire. L’Enseignement supérieur délivre des diplômes dévalorisés qui ne permettent plus aux jeunes de s’insérer comme leurs aînés sur le marché du travail.
En 2007, la France voit sa petite agriculture péricliter, son industrie agoniser, ses villes moyennes et ses zones rurales se vider de leurs forces vives, ses banlieues s’enfermer dans une culture de la révolte, de la violence et de la haine de l’autre.
En 2007, la société française, tétanisée par l’angoisse et l’absence de perspective collective, se fragmente en une somme d’individus, de corporations et de communautés, chacun repliés sur leurs problèmes. Les classes populaires n’ont plus que le choix entre l’assistanat et la précarité. Les classes moyennes se sentent paupérisées par la pression fiscale et la hausse des loyers. Les cadres sont écoeurés et épuisés par les nouvelles règles du capitalisme financier qui exige d’eux toujours plus d’efforts au bénéfice exclusif d’actionnaires anonymes et apatrides. Les classes aisées font sécession et ne voient plus d’avenir que dans l’exil professionnel ou fiscal hors de nos frontières.
En 2007, la France n’est plus seulement soumise à une fracture sociale entre ceux qui sont inclus dans le système économique et ceux qui en sont exclus ou en marge, elle est désormais aussi atteinte d’une fracture générationnelle, qui concentre le patrimoine, les hauts salaires et les revenus du capital dans les mains des seniors, pour réserver aux jeunes l’intégralité des coûts de l’adaptation au nouvel ordre économique, les maigres salaires, les loyers élevés, les diplômes dévalorisés, et la précarité de l’emploi.
En 2007, les fonctionnaires se sentent détestés, les professions libérales déclassées, les chômeurs stigmatisés, les populations d’origine immigrées discriminées, les chefs d’entreprises incompris, les ouvriers sacrifiés.
En 2007, l’Etat est à la fois obèse et impotent. Nos institutions ne parviennent plus à créer de la légitimité suffisante pour engager la moindre réforme de structure. La décentralisation est devenu un mille feuilles, opaque et dépensier où nul n’est responsable de rien. L’Etat-providence n’a jamais été aussi généreux pour des résultats jamais aussi faibles, quand ils ne sont pas contre-productifs.
.En 2007, la France cherche, s’interroge sur son avenir. Son salut se trouve t-il dans l’économie de la connaissance, dans l’accroissement des inégalités entre des emplois à haute valeur ajoutée et ceux qui survivront par la redistribution ? Entre quelques métropoles fortement tertiarisées et des territoires laissés à l’abandon ? Va-t-elle se contenter d’être une nouvelle Floride de l’Europe qui accueillera les retraités de tout le continent ? La France pourra t-elle maintenir son modèle social et son idéal égalitaire, ou devra t-elle céder aux vents dominants du chacun pour soi ?
La campagne électorale de 2007 exige un débat public sur la situation de la France, ce qui fait ses atouts et ce qui la menace. Elle exige un vrai débat sur le modèle de société auquel nous aspirons et celui auquel nous pouvons encore prétendre. Elle exige un débat sur les efforts que nous devrons faire, collectivement et individuellement, pour recréer un chemin vers l’avenir.
En tant que candidat à la magistrature suprême, il vous appartient d'affronter ces questions avec courage et lucidité et proposer un nouveau pacte pour la France pour que l’élection présidentielle puisse engager le pays sur la voie d’un nouvel horizon collectif et traduire un nouveau départ dans le 21ème siècle.
Nous vous invitons donc à prendre quatre engagements :
· Renoncer aux petites phrases, à l'exploitation systématique des micro-erreurs de vos adversaires, et de vous concentrer sur votre propre projet de société, vos propositions, votre vision de la France et de son avenir.
· Vous adresser aux citoyens en leur proposant un projet collectif pour l’ensemble de la Nation, et ne pas segmenter dans vos propositions la population en clientèles, en corporations, ou autres titulaires de créances réelles ou supposées à l’égard de la collectivité.
· Présenter un programme réaliste sur le plan budgétaire, compte tenu de l’état des finances publiques et des marges de manœuvre réelles ; Aborder les questions budgétaires et fiscales de manière globale, et non pas seulement sous l'angle de promesses plus ou moins tenables à l'égard de telle ou telle catégories de contribuables ou d’allocataires.
· Proposer une expression de la voix de la France à destination de l’international sur les sujets qui la dépasse mais sur lesquels elle ne peut pas rester silencieuse : La relance de la construction européenne, les déséquilibres financiers et industriels grandissant de l’économie mondiale, le libre échange et ses conséquences sur les pays européens qui ne peuvent lutter sans perdre leur âmes avec les géants démographiques d’Asie, l’essor du capitalisme financier qui accumule des montagnes de profits sans pour autant créer de richesses pour les populations ou les défis du changement climatique et de l’après pétrole.
Soyez à la hauteur de l’enjeu.
Soyez dignes de la charge à laquelle vous aspirez.
Faîtes vivre la République
Faîtes vivre la France !
Signataires de l’Appel du Net : (liste provisoire)
- Frednetick
- Dialogmismos
- Toréador
- Domi (rédacteur en chef de Politique Café)
- Charles de Touvabien
- Le Roi Bourdieusien de Pensées rebelles
- Malakine de Horizons
- Sébastien de Ca réagit
PS : Amis Blogueurs, vous êtes invités à vous associer à cette démarche en publiant le texte sur votre site, et en déclarant votre association à l'initiative à l'adresse [email protected] , ce qui nous permettra de tenir à jour les signataires. Pour les autres, vous êtes invités à diffuser par chaîne de mail le texte ci dessous en version PDF, et à l'envoyer aux médias de votre choix.
Suspends ton texte svp ! c'est ce soir !
Rédigé par : toreador | 28 février 2007 à 08:47
Sans m'y associer par ma signature, je retranscris néanmoins l'appel in extenso
Rédigé par : Benjamin pour les RdG | 28 février 2007 à 11:35
Voilà un appel qui résume parfaitement les enjeux de cette élection, qui plus est rédigé en français et non dans une novlangue exaspérante, bravo !
Rédigé par : Xavier | 28 février 2007 à 12:29
Une seule remarque : pourquoi cet appel est-il uniquement adressé à trois candidats à l'exclusion des autres tels Le Pen, Dupont Aignan, Buffet, Voynet, etc ?
Rédigé par : Xavier | 28 février 2007 à 12:33
Le coup est parti comme ça. Je ne suis pas à l'origine de l'initative (c'est une idée du camarade Toréador). J'ai juste prêté ma plume pour finaliser le texte ...
Néanmoins je pense qu'il est logique de ne réserver cette interpellation qu'aux trois principaux, car ce sont essentiellement eux qui pratiquent une campagne d'image et de positionnement. Les petits pour se faire entendre cherchent généralement beaucoup plus à parler des sujets de fonds.
J'étais partisans pour ma part de cibler plus les médias que les politiques, car ils me semblent être les vrais et seuls responsables de la staracadémisation de la campagne. On en serait pas là si dans les émissions de débats (on refait le monde sur rtl, ou "n'ayons pas peur des mots sur Itv par exemple) les éditorialistes débattaient des propositions des candidats au lieu de commenter les sondages et d'anticiper sur leurs évolutions en fonction des positions des uns et des autres. Mais, si l'affaire fait du bruit, je pense que les médias auront l'intelligence de se sentir concerné par l'interpellation.
Rédigé par : Malakine | 28 février 2007 à 13:08
100% en accord!
Elles et ils vont tous répondre que c'est éxactement ce qu'ils font.
En clair continuer à se moquer du peuple, car c'est leur intérêt de le faire.
Ceci étant cela vaut effectivement le coup d'être tenté.
Rédigé par : chavinier | 28 février 2007 à 15:29
Socialiste mais pas « Désir d’avenir », je suis fort étonné que vous n’ayez pas pris la peine de lire les « 100 propositions de Ségolène Royal ».
Pour ne prendre que les relations avec les pays de l’U.E. les propositions sont claires et concrètes:
1. Une Europe de la recherche, de l’énergie et de l’environnement
2. L’inscription dans les statuts de la Banque Centrale Européenne de l’objectif croissance-emploi et la création d’un gouvernement de la zone euro
3. Une protocole social pour tirer vers le haut le niveau de vie et la protection sociale dans tous les pays européens.
4. Un traité institutionnel soumis à référendum pour que l’Europe fonctionne de manière plus démocratique et plus efficace.
5. Une initiative européenne pour la paix au Proche-Orient.
6. Une défense nationale à la hauteur des risques nouveaux et la relance de l’Europe de la défense.
7. Le co-développement avec les pays du sud permettant la mise en place d’une immigration partagée.
8. Une coopération euro-méditerranéenne accrue.
Il y a 92 autres propositions.
Si on limite l’analyse à ce qui peut être entendu dans les médias audio-visuels, les animateurs et aussi les journalistes recherchent plus le scandale (le prix d’achat de l’appartement de SARKOZY à Neuilly ou l’ISF de ROYAL) ; la faute (le nombre de sous-marins tant pour Royal que pour Sarkozy) ; les micro-trottoirs où sont évoqués des problèmes du quotidien ; les réunions « passage d’examen » de lobbys tel celui des chasseurs par exemple, etc..
Les candidats n’ont eu que peu l’occasion de s’exprimer oralement sur leur projet. Il faut se donner la peine de lire.
Si vous attaquez les politiques ainsi, il faudrait aussi, dans un souci d’équité lancer quelques vérités à tous les acteurs des médias journalistes, animateurs d’émissions radio et télé pour qu’ils changent leur façon de médiatiser la politique.
Rédigé par : Constantin | 28 février 2007 à 23:08
Trés bien
Je fais passer, je publie..
J'ai cependant l'impression que cet appel pourrait s'adresser autant aux médias qu'aux hommes politiques concernés. Est ce que çà fait partie de la stratégie de l'envoyer aux grands médias?
Rédigé par : Chevillette | 28 février 2007 à 23:21
@ constantin
Attention, ce commentaire est limite proche du spam politique. les propositions que tu cites sont parfaitement creuses. C'est au mieux un emballage dont on ne sait rien du contenu. Et, tu ne peux pas nier que ta candidate est la première à succomber à la tentation de la campagne d'image. Qu'a t-elle fait hier à Clichy ? Elle est passée dans les médias pour dire "J'aime les jeunes. Ils vont voter pour moi, et comme ils m'aiment aussi, ils vont s'aimer et faire la paix et ne plus faire d'émeutes"
Si ça c'est pas le degré zéro de la pensée politique !!
@ chevilette
Oui, je l'ai dit, l'appel est aussi indirectement destiné aux médias. La différence, c'est que les médias n'ont pas intérêt à élever le débat. Leur intérêt c'est juste l'audience. Les politiques, oui, ils devraient avoir intérêt à élever le débat. Sinon, ils s'exposent à une forte réaction de mauvaise humeur du corps électoral, et ensuite à une france ingouvernable. C'est pourquoi on a voulu en appeler d'abord au sens de la responsabilité des politiques.
Rédigé par : malakine | 01 mars 2007 à 13:20
Je crois que le candidat que je soutiens réalise déjà ces 4 objectifs (que je partage) et se tient à cent lieues de la staracadémisation dont l'appel l'accuse avec les autres.
Alors désolé, je ne peux signer ce texte.
Rédigé par : FrédéricLN | 01 mars 2007 à 13:22
Je crois que le candidat que je soutiens réalise déjà ces 4 objectifs (que je partage) et se tient à cent lieues de la staracadémisation dont l'appel l'accuse avec les autres.
Alors désolé, je ne peux signer ce texte.
Rédigé par : FrédéricLN | 01 mars 2007 à 13:24
Excellente initiative, je suis signataire !
Rédigé par : lløRān | 01 mars 2007 à 16:57
@ Réponse à MALAKINE
Sur le premier point :
La question qu’il faut se poser avant de critiquer le niveau de précision du programme des candidats c’est : Quel est ce le rôle du président de la république ?
Faut-il qu’il soit omniscient et soit tour à tour premier ministre, ministre des finances, etc..
Ou faut-il qu’il fixe les grands objectifs de la politique qu’il propose et sache s’entourer de personnes qualifiées pour la mener.
Attention au danger de dérive vers un despotisme éclairé ou pire que ça !
Sur le passage de Ségolène Royal à Clichy-sous-bois :
Quand Nicolas Hulot a fait le tour des candidats à la présidentielle pour qu’ils signent son « pacte écologique », personne n’a fustigé les candidats.
Quand le lobby des chasseurs et pécheurs ont invités les candidats à plancher devant eux, pas un écrit pour trouver cela scandaleux.
Quand Ségolène Royal se rend à Clichy-sous-Bois à l’invitation de ACLEFEU pour signer des engagements avec cette association, crier au scandale relève d’une bonne dose de démagogie. Est ce parce que cette association se refuse de recevoir Nicolas Sarkozy tant qu’il restera ministre de l’intérieur ? Je ne le pense pas mais je trouve choquant cette façon de critiquer. Pourquoi ne pas stigmatiser aussi le « candidat et ministre » quand il se rend dans une ville de province pour consoler la veuve et l’orphelin, et tous les candidats qui iront caresser la croupe des vaches au salon de l’agriculture.
Pour en revenir au passage de Royal à Clichy-sous-Bois.
Ce déplacement avait pour objet de rencontrer le collectif AC Le Feu, qui a invité tous les candidats à la présidentielle à venir signer son "pacte social et citoyen" en faveur des habitants des banlieues. Il est prévu qu'elle prenne "position" sur ce contrat mais à ma connaissance elle a émis des réserves sur bien des points (pas si démago que ça la candidate !)
AC Le Feu (Association collectif liberté, égalité, fraternité, ensemble, unis) avait été créée après les émeutes dans les banlieues en novembre 2005, en partie déclenchées après la mort des deux jeunes garçons à Clichy sous Bois. C’est pour cette raison qu’elle a déposé une gerbe devant la stèle érigée en mémoire des deux victimes. Elle n’y a pas fait de commentaires. Olivier Besancenot et Marie-George Buffet ont déjà promis de le signer.
Rédigé par : Constantin | 02 mars 2007 à 23:04