Le lamentable débat sur l’identité nationale engagé l’an passé par le gouvernement, s’est déroulé sans problématisation préalable, ni perspective opérationnelle. Nul n’a jamais su s’il s’agissait d’inviter les Français à réfléchir au lien civique qui les unit à la République, ou à ce qui fait la spécificité de leur communauté culturelle dans le but de son unité et son homogénéité.
Dans un contexte de crispation anti-immigration et anti-islam, ce débat s’est assez logiquement traduit par une libération de la parole xénophobe. Et naturellement, il ne s’est conclu sur rien, comme à l’accoutumée dans le régime sarkozyste où le discours est un acte politique qui se justifie en lui-même.
Il ne saurait donc être question de reprendre ce débat dans l’état ou l’UMP l’a laissé, il est en revanche très utile pour la perspective qui nous intéresse, de faire parler la notion d’ethnicité française.
L’impossible débat sur l’identité nationale
Il était quelque peu grotesque de prétendre débattre de l’identité nationale. L’identité ne peut par définition faire l’objet de discussions. Elle se constate ou se revendique, mais ne se met pas en débat. Débattre de l’identité nationale revient à ouvrir la possibilité que chacun exprime l’identité de « sa France à lui » tant il est évident que la France des quartiers chantée par Diams qui vit à l’heure américaine et se converti à l’islam, n’est pas la même que celle des républicains férus d’histoire ou des catholiques traditionnalistes. Débattre de l’identité nationale revient inévitablement à fragmenter la nation, à affaiblir son unité et à rendre encore plus illisible son identité.
Il s’agissait clairement de définir l’identité culturelle (ou ethnique) de la nation et non du tempérament politique national, au sens des valeurs et principes politiques auxquels les Français sont majoritairement attachés, sujet aisément plus praticable mais à l’intérêt quasi nul dans la mesure où la démocratie a précisément pour objet de les exprimer à l’occasion de chaque scrutin.
Or, s’il existe des traits de caractère communs à tous les français, ceux-ci sont en réalité les plus mal placés pour les reconnaitre. On ne peut vraiment identifier les éléments constitutifs de la mentalité d’un pays qu’avec le regard décentré qu’offre l’expatriation ou l’immersion dans d’autres univers culturels, ce qui n’est naturellement pas le cas général. Quand bien même arriverait-on à recenser quelques traits caractéristiques de la francité, comme notre rationalisme ou notre attachement aux repas gastronomiques, encore faudrait-il que la population y voit des valeurs positives et attractives pour celles-ci puissent s’y identifier et ainsi produire de l’identité. Définir l’identité nationale, ne consiste pas simplement à en identifier les caractères spécifiques, mais davantage les caractéristiques dont la population va s’enorgueillir et qu’elle va chercher à cultiver. Or, il est fort douteux que la mentalité française, si prompt à la critique et à l’autodénigrement, soit propice à un tel exercice.
En tout état de cause, il est probable que l’exercice montre rapidement ses limites tant il n’existe pas d’âme française comme il existe une « âme russe » ou une « pensée juive ». On aurait même bien de peine à relever des clichés identitaires à l’image du flegme britannique, la rigueur allemande ou la dolce vita italienne. Sur le plan purement culturel, la France demeure une mosaïque, finalement très peu unifiée, de cultures régionales. Qu’on l’interroge le fait culturel sous l’angle de la gastronomie, de l’architecture ou des fêtes populaires, on identifiera aisément quelques cultures régionales mais aucun plat traditionnel, aucun style ou aucune tradition typiquement française. On pourrait même considérer que le principal trait constitutif de l’identité culturelle française est d’en être dépourvu !
Le politique comme exécutoire du culturel
On a tout de même entendu des propos intéressant au regard du débat qui nous occupe. Certains affirmaient que la France c’était la République et rien d’autre ou qu’était Français celui qui en avait la nationalité, caractérisant ainsi la conception purement civique de la nation. D’autres ont voulu exprimer l’identité nationale par la devise républicaine : liberté, égalité, fraternité, à laquelle certains croient bon d’ajouter le terme de laïcité.
Mais est-ce là une autre manière d’exprimer le lien civique en définissant le projet politique qui est sensé sous-tendre notre construction politique ou est-ce déjà une conception ethnique de la communauté nationale qui s’exprime par la définition des principaux trait de caractère de la mentalité nationale ? Cette maxime peut en effet être entendue, non pas dans son sens politique, mais dans un sens culturel en ce qu’elle nous dit de la conception des rapports entre l’individu et le collectif ou les individus entre eux.
La liberté serait entendue au sens de rejet de toute forme d’autorité que pourrait faire peser le groupe sous forme de morale contraignante, de code culturels ou de traditions, l’individu libéral n’acceptant que l’autorité extérieure de la loi républicaine.
L’égalité ; au sens de refus de toute forme de particularisme culturel dans une affirmation d’un individu universel dépourvu de toute particularité et d’identité. L’égalité véhicule aussi le rejet de toute forme d’emprise personnelle et psychologique d’un individu sur un autre, n’acceptant que des formes (limitées) de subordination économique et hiérarchique dans les relations de travail.
La fraternité, définit la forme des liens qui unit les individus entre eux dans la société. Ceux-ci ne sont pas liés de manière naturelle et automatique par l’appartenance à un même peuple, mais par un lien interpersonnel d’ordre affectif, donc relatif et révocable, qui tient plus du devoir civique que de l’évidence.
Enfin la laïcité selon l’acception prise par ce concept de nos jours signifie non plus la séparation de l’Eglise (au singulier) de l’Etat dans une logique de rivalité entre deux institutions autrefois en concurrence, mais un état de neutralité religieuse et culturelle de l’espace public, traduisant un refus général et absolu de tout code culturel susceptible de régir l’organisation de la société ou de se manifester dans l’espace public.
Une ethnicité dominée par une culture farouchement individualiste…
Ce système culturel correspond à ce qu’Emmanuel Todd décrit comme le système familial « nucléaire égalitaire » dominant en France dans la mesure où il est celui du bassin parisien. Selon l’anthropologie toddienne, les deux valeurs structurantes de ce système sont la liberté et l’égalité, qui historiquement décrivent les rapports entre parents et enfants ainsi qu’entre frères dans les structures familiales de la paysannerie traditionnelle.
L’individualisme exacerbé de ce système – et en particulier son refus farouche de toute approche holistique qui réduirait l’individu au statut de membre d’une communauté – lui donne l’apparence de nier la dimension ethnique du collectif. Il s’agit bien pourtant d’un système culturel, comme un autre, produisant une certaine vision du monde et une certaine conception du vivre ensemble.
Sans faire un cours d’anthropologie toddienne, il peut être utile de décrire quelques caractéristiques de ce système culturel produites par la combinaison des valeurs de liberté et d’égalité.
L’individu dans ce système se définit comme universel : il n’existe pas de différence de nature entre un Français et un non-Français, et a fortiori entre les Français eux-mêmes. Cet universalisme agit pour le meilleur et pour le pire.
Pour le meilleur, quand la France entend organiser le monde ou l’Europe comme s’il s’agissait d’affaires domestiques ou quand elle se montre accueillante et propose à chacun d’intégrer sa communauté nationale quelle que soit « ses origines, sa race ou sa religion ».
Pour le pire, lorsque l’universalisme confine à la xénophobie par son refus radical de tout ce qui peut distinguer les individus. Comme toute ethnicité, l’ethnicité française cherche à s’affirmer contre tout code culturel étranger. Cependant, plus que n’importe quelle autre, l’ethnicité française en raison de son universalisme ne souffrira pas la moindre exception. Toute différence, dès qu’elle sera trop visible ou trop assumée, sera alors rejetée et combattue jusqu'à l'annihilation. On la dénoncera sous des vocables aussi variés que l’égoïsme national, le repli communautaire, l’éthnicisme identitaire ou le régionalisme archaïque. Mais on dénoncera aussi avec la même force celui qui va souligner les différences et entendra combattre ces particularismes ! Celui-là sera ostracisé comme xénophobe, homophobe, raciste ou antisémite. Les injures ne manquent pas… L’universalisme français n’est vraiment à son aise que dans un contexte d’indifférenciation absolue des individus et des groupes sociaux.
Ce modèle rejette logiquement toute forme de communauté infranationale, qu’elles soient régionales ou religieuses. Celles-ci seront immédiatement perçues comme une menace pour l’unité nationale voire un risque potentiel de séparatisme et de guerre civile. L'appartenance à une communauté culturelle minoritaire n’apparait d’ailleurs jamais sous un jour positif comme un vecteur de socialisation ou de culture. Elle sera toujours perçue insupportable soumission de l’individu à une norme contrainte et contraignante, voire pour les communautés de type religieux, comme un enfermement communautaire, une aliénation morale et mentale et la perte de tout libre arbitre !
Le système nucléaire-égalitaire a l’inconvénient d’être très peu intégrateur. Il produit une société civile atone, peu organisée et dynamique, qui attend tout de l’Etat, conjugué à un sentiment d’appartenance très faible. C’est pourquoi ce système a besoin d’un Etat fort, interventionniste sur le plan économique, autoritaire sur le plan pénal et même de plus en plus rigoriste sur le plan moral afin de maintenir une société atomisée en l’état de fonctionnement.
Ce sont donc les caractéristiques-même de l’éthnicité française dominante : individualiste, libérale–égalitaire et universaliste qui la conduisent à rejeter à la fois les idées même d’ethnicité (systématiquement réduite à sa dimension raciale pour mieux la discréditer), de communautés et même d’identité. C’est aussi ce code culturel si particulier, si la conduit à surinvestir la dimension politique de la communauté et à sacraliser l’Etat. L'idéologie républicaine et la théorie de la nation civique apparaissent donc être des produits de ce système culturel particulier.
… tempérée par une culture minoritaire privilégiant l’appartenance à une communauté culturelle
L’anthropologie toddienne nous apprend également que le système nucléaire égalitaire, s’il est dominant en France par le truchement de la centralisation politique et de l’impérialisme culturel parisien, n’est pas exclusif. A sa périphérie se trouve un système dit "souche" défini par les valeurs d’autorité et d’inégalité, ou d’autorité et d’égalité (formelle), système dit "souche incomplet", présent dans les zones de transition.
Il ne semble pas possible de rendre compte de ce système tel que Todd le décrit dans les pays où celui-ci est dominant voire exclusif (Belgique, Allemagne, Scandinavie…) car en France, les tenants de cette culture ont appris à penser dans le cadre du système individualiste-égalitaire. Il ne se manifestera alors que de manière très atténuée. On en constatera l’expression dans l’attachement aux particularismes régionaux, au respect de certaines traditions populaires, souvent facteur de lien social et de sentiment de fraternité et d'identité locale ; ou sur le plan purement politique par un attachement à la cohésion nationale, un sens du compromis ou une approche plus volontiers systémique.
Une étude anthropologique(1) réalisée en 2001 rend bien compte de la survivance de cette culture plus holistique en distinguant deux formes de « citoyenneté », la première correspondant à celle précédemment décrite et la seconde étant définie ainsi :
« Cette citoyenneté-là, est une identité en ce sens que se disant citoyen français, celui qui parle dit effectivement qui il est : il est le produit particulier d’une histoire qui s’est déroulée à un endroit particulier, sur un sol défini par des frontières. Le citoyen est bien sûr individuellement particulier au sens où il a une histoire personnelle qui le distingue de tout le monde, mais le fait d’être inscrit dans une histoire collective le rend à la fois suffisamment semblable à ceux qui sont inscrit dans la même histoire et suffisamment différent de ceux qui ne le sont pas pour qu’il puisse considérer que cette différence entre lui et les autres, entre nous et les autres nous, est une différence naturelle. Cette particularité ne lui pèse pas, il en est fier, voire il s’en enorgueillit. Elle lui donne une consistance, une force qui le dépasse et qui le protège. Le national dans ce modèle-là, tire sa force de l’identification à sa nation »
L’étude ayant été réalisée dans le bassin parisien, l’auteur évoque le sentiment national, ce tempérament s’exprimera dans la France périphérique plus volontiers sous une forme régionaliste non exclusive d’ailleurs du sentiment d’appartenance national : Fier d’être Chti, Alsacien, Breton, Basque ou Catalan (autant de régions de culture souche)
***
Cette dualité s’article naturellement avec la précédente, ce qui peut faire la joie des typologistes, surtout si on ajoute encore une autre ligne de fracture entre les républicains, qui croient en l’Etat-Nation, et les libéraux qui ne croient qu’à l’individu et à leurs interactions dans le cadre du marché. Voire une quatrième qui considérait que l’on peut ou non combiner la dimension culturelle de la nation et sa dimension politique, ce qui décrirait des type « civique pur » et un type « éthnique pur ».
Nous nous intéresserons dans le chapitre suivant plus particulièrement aux Républicains, en distinguant les « républicains civiques » et les « républicains ethniques ». Les premiers témoignent d’une fidélité sans faille confinant au dogmatisme, à la théorie républicaine et à ses mythes : La république est une construction politique indifférente aux origines, aux races, aux religions et aux cultures. Les seconds défendent prioritairement le modèle de l’individu-universel, substrat culturel de l’idéologie politique dite « républicaine ».
Malakine
(1) « La citoyenneté en France entre particularisme et universalisme » Sophie Duchesne, Horizons philosophiques 2001
Je pourrais être d'accord avec beaucoup de choses de ce que tu dis dans cet article, mais je suis toujours aussi peu convaincu par ton utilisation du qualificatif ethnique.
Si tu y tiens tant, c'est, si je ne me trompe pas, parce que tu repères (à juste titre mais c'est aussi une banalité dans un sens) que l'universalisme français a un côté "ethnocentré" qui s'ignore et qu'il repose sur des bases anthropologiques particulières et non sur de pures abstractions philosophiques ou sur des choix historiques parfaitement conscients comme ses défenseurs aimeraient souvent le croire. Tu as évidemment raison en cela mais cela ne rend pas ton usage du mot ethnique plus clair, ni plus efficace.
Faudra-t-il ajouter à chaque fois que tu l'utilises: "ethnique dans le sens de Malakine"?
Rédigé par : Emmanuel B | 03 mai 2011 à 17:59
Je commence à intégrer que l'ethnie corespond à un ensemble de caractères culturels et je retrouve bien l'attitude de beaucoup de commentateurs de Causeur.
Tu ne mets pas dans les défauts de l'ethnie du Bassin parisien un aveuglement à la différence des autres pays et une volonté féroce d'enlever les frontières?
Je suis du Nord et, à chaque fois que je vais voir mes proches compagnons en ethnicité, je suis émerveillé par la luminosité qui se dégage de la grande majorité des visages. Cela devrait être un de leurs caractères officiels mais je suppose que nos élites haïssant le peuple, cela ne peut ressortir. Une confiance en l'homme, un bonheur de vivre, ne pourrait-on pas caractériser ainsi l'éthnie du centre? Cela est d'ailleurs autorisé pour les pays de la Loire.
Ce qui m'attriste est que tu aboutis à la nécessité d'un état fort et j'ajouterai, dont l'efficacité et une partie des effectifs ne peuvent être fournis par le système souche. Pas de solution miracle, pas de refondation absolue en perspective.
Rédigé par : Jardidi | 03 mai 2011 à 19:45
Désolé, ce n'est pas très constructif mais je tenais à vous dire que je vous supporte à 100% dans votre pari. Parce que au moins, vous faites avancer le schmilblik. Cela dit, je ne voterai jamais pour un projet politique associé au FN, c'est viscéral, on ne se refait pas.
Rédigé par : RAS | 04 mai 2011 à 03:00
> Emmanuel
Je t'ai déjà dit, j'utilise ethnie au sens du dictionnaire. Le mot a été dévoyé par le code culturel de la France de l'intérieur, pas par moi.
> jardidi
Si, t'inquiète le bonheur est envisagé après.
La suite ce soir :
> RAS
Pitié ! Pas ici. Ce n'est pas le sujet, pas du tout.
Rédigé par : Malakine | 04 mai 2011 à 07:12
Oui, tu me l'as déjà dit mais tu ne m'as pas convaincu ni répondu à aucune de mes objections.
Ta définition du dictionnaire avec tout son vague ne permet pas de distinguer clairement quel est l'objet dont tu parles. Regarde seulement le commentaire de Jardidi qui distingue ethnie du Nord, ethnie du centre, ethnie du Bassin Parisien, parlez-vous de la même chose? Y a-t-il en l'occurrence une ethnie française ou plusieurs ethnies sur le territoire nationale? Selon quels critères pourrait-on faire le partage?
De même quand tu évoques une réduction de l'ethnie à la question raciale. Si on peut réduire l'une à l'autre, c'est bien que la seconde est généralement incluse dans la première. Comment te débrouilles-tu avec ce problème? Tu l'évacues d'un revers de la main en indiquant que c'est un piège sémantique des affreux républicains (pardon républi-clanistes)?
De quelque manière qu'on le prenne, le terme déborde sans cesse de la case délimitée (mais comment on l'ignore encore) dans laquelle tu pourrais l'utiliser sans inconvénient.
Et puis, l'objection historique persiste. Si le qualificatif ethnique est resté marginalisé dans la réflexion politique française ce n'est pas pour rien, mais bien parce qu'il pose plus de problèmes qu'il n'en résout.
Rédigé par : Emmanuel B | 04 mai 2011 à 10:14
PS : Si tu préfères poursuivre le plan que tu as prévu sans tenir compte pour le moment de mes objections, je comprendrais très bien. On peut tout à fait reporter ça à la fin de la série.
Rédigé par : Emmanuel B | 04 mai 2011 à 10:18
> Emmanuel
J'ai compris que ce terme te posais un problème, mais j'avoue que je n'arrive pas à comprendre exactement de quelle nature est-il. Je maintiens que j'utilise le terme ethnique au sens du dictionnaire à savoir les traits de civilisation (culture, langue) qui fabriquent le sentiment d'appartenance à un même peuple.
Malgré mon incompréhension, je vais tout de même tâcher de répondre à tes questions pour ne pas donner l'impression que je me défile.
S'il y avait plusieurs ethnies en France, on parlerait d'Etat multinational. Or tel n'est pas le cas, donc non. Il n'y a qu'une ethnie en France, même si elle comporte des sous-composantes régionales ou mêmes culturo-religieuses. Je ne vois d'ailleurs pas où est le problème. Les Suisses où les Allemands sont réunis par un sentiment d'appartenance à une même sphère culturelle, ce qui n'exclue pas des différences fortes en son sein.
Je ne vois pas davantage ou est le problème avec la race. Les Français sont tous des individus de race européenne. Après si tu veux distinguer des types ethniques au sein de la race européenne, on retombe dans le cas précédent.
Si le qualificatif d'ethnique est marginalisé dans la réflexion politique française et si tu as tant de mal à l'appréhender, c'est juste que cette notion est incompatible avec la pensée universaliste à laquelle manifestement tu te rattaches.
Mais pour moi, vu que tout le monde n'a pas une vision du monde universaliste et que cela ne correspond en réalité qu'au code culturel de la France du centre, je considère qu'il s'agit d'un trait ethnique.
Est-ce que tu peux au moins m'accorder ça ?
Rédigé par : Malakine | 04 mai 2011 à 10:47
Mon dictionnaire indique que le Canada français et la Suisse francophone font partie de l'éthnie française...
J'allais écrire, pas de conscience de soi ni des autres quand ils ne sont pas considérés comme menaçants, l'éthnie du Bassin parisien semble également incapable de se défendre.
Rédigé par : Jardidi | 04 mai 2011 à 11:14
Je conteste l'utilisation du terme ethnique d'abord parce qu'il est source de confusion comme tu le constates dans son utilisation divergente de la tienne par Jardidi.
Ensuite tes explications contiennent elles-mêmes des sources de confusion. Tu dis : "S'il y avait plusieurs ethnies en France, on parlerait d'Etat multinational" - Non, en toute logique, on devrait dire Etat multi-ethnique. Ou alors quelle est la différence entre ethnie et nation? Et pourquoi parler d'ethnie si nation est synonyme?
L'exemple de la Suisse est intéressant. Comment pourrais-tu m'expliquer de manière cohérente la distinction entre ethnie et nation dans ce cas, et ensuite dans le cas de la Belgique, puis dans celui de la France? Les Genevois sont-ils plus ou moins français que les Wallons? Au sens ethnique? Au sens national? D'après quels critères?
Pour la pensée universaliste, évidemment que je m'y rattache. En passant je te fais remarquer que dans la mesure où le singulier est un moment de l'universel, être universaliste n'empêche absolument pas de penser la singularité. Le différentialisme, lui en revanche, empêche le plus souvent de penser l'universalité. Mais te considères-tu vraiment comme différentialiste?
D'autre part, si l'universalisme est un trait typique de la pensée française, la France n'a certes pas le monopole de l'universalisme. L'église catholique est universaliste, l'islam est une religion universaliste, la plupart des empires se sont considérés comme universels, le communisme fut une idéologie universaliste, etc., etc. Et même le nationalisme dans sa première diffusion au début du 19e siècle est conçu comme un concept à portée universelle. Le monde n'a pas attendu que la famille nucléaire-égalitaire du bassin parisien trouve son expression idéologique adéquate (le jacobinisme?) pour expérimenter l'universalisme, qui est tout de même une dimension possible de la pensée politique universelle (encore!) avant d'être l'expression politique d'un certain type familial précis.
En France, il y a certes affinité entre un substrat anthropologique particulier et une conception du monde, mais je ne vois pas pourquoi on qualifierait cette conception d'ethnique - "anthropologiquement déterminée" me parait amplement suffisant et surtout plus rigoureusement juste.
Enfin la race, rassure-moi vite. Tu écris : "Les Français sont tous des individus de race européenne." Que veux-tu dire par là? Un mec a la peau noir ne peut pas être français, ou quoi?
Rédigé par : Emmanuel B | 04 mai 2011 à 11:49
D'habitude on désigne les francais comme un peuple pourquoi changer de terme subitement ?Ethnie francaise c'est pas courant dans le discours politique et scientifique.
les 2 definitions se ressemblent beaucoup cela dit mais généralement éthnie est le terme utilisé par les anthopologues pour désigner les peuplades vivant en terre étrangère ,souvent les ex colonies.
Rédigé par : Damien | 04 mai 2011 à 12:04
> Emmanuel
Tu fais le mec qui ne veut pas comprendre mais je te sais trop intelligent pour ça.
Ce que je dis dans ce texte, c'est que ce que les républicains pensent être une idéologie politique est en réalité une production de leur code culturel et que celui ci n'est pas universel. Cela n'a rien d'extraordinaire, c'est du Toddisme à l'état brut !
Il y a quelques mois, quand j'avais fait mon papier sur le Dhjihad laïque, je décrivais l'islamophobie comme la guerre en réalité contre-productive d'une idéologie contre un code culturel. Ici je vais plus loin. Je décris cette idéologie comme un code culturel à part entière, d'où le terme provocateur d'ethnique.
En outre, je rappelle que c'est le terme consacré pour caractériser le modèle de nation qui s'oppose à la nation civique. Ce n'est pas moi qui l'ai inventé.
Mais ne serait-il pas possible de parler du contenu de ce texte et non pas seulement de son titre ??
Autre remarque à l'attention d'Emmanuel, n'essaie pas de me piéger, je ne suis pas assez con pour ça, même si j'ai commis la bêtise de te répondre. C'est toi qui parle de race, pas moi. Moi je parle de code culturel !
Rédigé par : Malakine | 04 mai 2011 à 12:25
Je sais pas si le distingo a déjà été fait mais j'ai l'impréssion qu'il y'a confusion entre universalisme républicain et internationalisme socialiste et libéral dans le discours politique ,les républicains sont attaché au térritoir sans l'être à la race ou l'éthnie
Les républicains considérant que l'attachement à la nation proccéde par transmission et adhésion à des moeurs et valeurs communes,tandis que l'internationalisme ne reconnait pas les frontières mais les peuples , au sens ethnique du terme car il s'attarde sur les critères culturels.
En gros il y'a un attachement aux convergences dans un cas et une célébration des différences dans l'autre.
L'universalisme républicain francais autrement dit le républicanisme peut certes générer des tensions et de l'intolérance mais il semble le seul agent de pacification sur un sol ou se cotoient tant de peuples différents.
Rédigé par : Damien | 04 mai 2011 à 12:29
Juste un truc, Xavier, je n'essaie pas de te piéger mais au contraire de t'alerter sur le fait que tu utilises un terme piégé en lui-même. Je n'ai aucun intérêt ni aucune envie de te mettre en porte à faux, mais pour moi, il paraît gros comme une maison, que tu risques, toi comme tes commentateurs, de te prendre les pieds dans le tapis avec ce "terme provocateur d'ethnie" qui mène presque automatiquement (la preuve! bon dieu! la preuve!) plus loin que là où on souhaiterait aller.
J'ai très envie de creuser le fonds du texte comme tu m'y invites, mais comme le mot que tu mets en avant me paraît impropre, je ne crois pas inutile de prendre d'abord des précautions.
Et pour l'instant tu ne réponds jamais précisément à mes objections. Apparemment tu refuses même d'envisager qu'il puisse y avoir un problème avec ce mot. Or dès qu'on prend des exemples précis plutôt que de réfléchir dans l'abstrait (avec quelques arrières-pensées polémiques), on se rend compte qu'il y a TOUJOURS des problèmes avec ce mot-là. Si j'insiste tant, c'est entre autre parce que je me suis précisément intéressé à la question notamment en ce qui concerne l'Europe centrale et balkanique. Il y a bien quelque chose d'épidermique dans mon refus de laisser glisser la langue à ce propos, mais ce n'est pas le refus d'un républicain universaliste incapable de dépasser l'"ethnocentrisme" de ses propres codes culturels. C'est au contraire la réaction de quelqu'un qui s'est un peu frotté à des questions à la complexité souvent déconcertante, très susceptibles de rendre chèvre les tenants d'un tel universalisme dans sa version simpliste et réductrice (version caricaturale dont je ne nie pas du tout l'existence) et qui a une idée assez précise des dégâts que l'introduction dans le débat de ce genre de concept plus ou moins incontrôlable peut produire.
Par ailleurs, je trouve ton rapprochement toddien trop mécanique. Code culturel, l'expression même implique une simplification excessive. Non, l'universalisme français n'est pas seulement l'expression pure et simple d'un code culturel national (ou régional si l'on ne tient compte que de la région dominant l'ensemble). Il y a détermination, c'est vrai, mais il faut se garder d'associer un caractère automatique à cette détermination. En d'autres termes, je trouve que tu durcis exagérément les choses mais aussi que tu pointes à juste titre un angle mort d'une certaine vision universaliste. En ne saisissant pas exactement ses propres déterminations, on pourrait dire cependant que l'universalisme que tu mets en cause pêche surtout par défaut d'universalisme ou par universalisme incomplet.
Rédigé par : Emmanuel B | 04 mai 2011 à 14:36
On va prendre les choses autrement. S'il y a un mois, j'avais dit comme JPC "Marine Le Pen n'est pas républicaine parce qu'elle porte une conception ethnique de la nation" Tu aurais répondu quoi ? "Oui tu as raison" ou tu aurais crié "Au fou ! Il n'y a pas d'éthnicité en France !!"
C'est ça (notamment) qui a commencé à me faire réfléchir sur ce que peut être une vision ethnique de la nation française. Ma réponse est dans ce texte.
Et quand aux dégâts que cette conception peut causer, je suis bien d'accord ! Dois-je te rappeler la polémique qui m'a opposé l'an passé à Riposte Laïque ? Je regarde toujours ces gens là comme extrêmement dangereux et s'il sont aussi dangereux c'est précisément parce qu'ils portent une conception ethnique de la nation, tout républicain qu'ils se prétendent être. Et malheureusement cette pensée est en plein essor sous l'influence d'intellectuels médiatiques comme Zemmour, E. Levy ou Rioufol.
Moi je veux être bien clair : certes je suis souverainiste, certes je soutiens Marine Le Pen, certes je suis homophobe, machiste et j'en passe ... Mais le totalitarisme éthniciste et la guerre civile interculturelle, non vraiment non, ce n'est pas mon truc. Et je me battrais toujours contre ça !
Avec ce texte, ce que je cherche à faire, c'est amener les "nationaux-républicains" à bien réfléchir à l'idéologie qu'ils véhiculent. Non pas dans leurs conséquence - ça s'est déjà fait - dans leurs fondements théoriques.
Rédigé par : Malakine | 04 mai 2011 à 15:20
Remarque en passant. Le républicanisme attacherait plus d'importance à l'égalité tandis que le souverainisme se baserait sur la liberté et même s'il s'agit, je crois, d'un concept importé du Québec, il est pleinement en accord avec une partie du système culturel du Bassin parisien.
Rédigé par : Jardidi | 04 mai 2011 à 17:45
J'hallucine! Pas de spécificité de la France mais l'Italie en une, UK aussi, et certainement la république de San-Marin et oui, elle en une!)...
C'est juste un manque de culture; mais comme le dit le slogan je ne parle pas aux..., ça les rend intelligents!
L'anti-France se propage jusque dans les lieux recommandés pas des blogs que l'on pensait plus sourcilleux sur la bienpensance. Entre l'absence de culture, la volonté de na pas paraître "réac" et celle de vouloir faire moderne, on dépasse les sommets.
Rédigé par : Merveilleux! | 25 mai 2011 à 22:02