Lors du débat récent sur la rémunération des grands patrons, le MEDEF avec l’aide des derniers propagandistes libéraux invoquait la figure de l’entrepreneur pour défendre le principe de totale liberté des rémunérations et de non ingérence de l’Etat dans la vie des entreprises. Cet amalgame entre les patrons-propriétaires de PME et les cadres dirigeants des multinationales n’a pas choqué grand monde, à commencer par la CGPME.
Pourtant, comme le signalait Philippe Trouvé dans une tribune parue dans le Monde le 7 avril dernier, les deux patronats forment deux groupes sociologiques distincts. Les premiers sont des patrons “réels”, “de terrain”, les seconds ne sont que des “gestionnaires” ou des “technocrates”.
Le débat a été lancé sur le terrain économique par Frédéric Lordon dans un article déjà ancien « le paradoxe de la part salariale » dans lequel il émettait l’hypothèse d’une exploitation du petit capital par le grand, thèse qu’un autre économiste-blogueur, Jean Peyrevade a récemment réfuté au motif que le capital ne peut se retrouver dans une telle situation de domination.
La question n’est pas sans enjeux concret. S’il apparaissait effectivement que le patronat des PME et celui des dirigeants managériaux des grands groupes formaient deux groupes sociaux distincts, vivant dans des univers différents et animés par des intérêts divergents, une fracture de type « lutte des classes » pourrait bien apparaître, ce qui pourrait favoriser un vrai renversement de logique.
Les thèses en présence :
Frédéric Lordon cherche une explication à la stagnation du rapport entre la part des salaires et des profits dans le partage de la valeur ajoutée depuis le début des années 90, alors que depuis cette date les salaires ont été à la fois exposés à la concurrence des pays émergents et à la pression du capitalisme actionnarial dans une mondialisation qui tourne désormais à plein régime.
L’explication pour Lordon est à re chercher dans le jeu des relations client-fournisseur.
Pour n’être pas aussi directement soumis que leurs donneurs d’ordre à l’impératif de rentabilité des capitaux propres, les sous-traitants non cotés n’en sont pas moins sommés d’apporter leur contribution aux objectifs actionnariaux de leurs commanditaires. Aussi sont-ils harcelés pour extraire toujours davantage de valeur, sans la moindre chance de la conserver pour eux, mais avec l’obligation de la passer à leur donneur d’ordre, qui, lui-même fournisseur d’un client plus haut que lui, la fera passer à son tour en y ajoutant ses propres gains de productivité, et ainsi de suite jusqu’au sommet de la chaîne de sous-traitance, là où s’établit le contact direct avec le pouvoir actionnarial, à qui la somme agrégée des contributions ainsi « remontées » est finalement remise.
Ainsi, la pression actionnariale se diffuse dans tout le tissu productif, comprimant l’ensemble des salaires mais aussi mettant à contribution le niveau de profit du capital dans les étages intermédiaires, les PME et notamment les entreprises sous-traitantes. Selon ce modèle explicatif, si le partage de la valeur a été grandissant en faveur du profit dans les entreprises cotées, le mouvement se serait opéré en sens inverse dans les PME, les entreprises ayant été contraintes de prendre sur leurs marges pour satisfaire aux exigences de réduction des coûts des donneurs d’ordre.
Ce schéma ne convainc pas du tout Jean Peyrelevade. Dans sa réponse, il indique en préambule que, les éléments statistiques n’existant pas, nous sommes réduits aux conjectures sans rien pouvoir démontrer ou infirmer avec certitude. La théorie de Lordon lui semble "peu plausible" car :
Si le “taux de profit brut” est supérieur dans le grand capital et stable sur l’ensemble, il est forcément inférieur dans le “petit capital”. En bref, la part salariale de la valeur ajoutée devrait avoir augmenté au sein des sociétés non cotées ! Nous passons d’un paradoxe à l’autre : le “grand capital” exploiterait le “petit capital” plus durement que les salariés du même “petit capital”. Par quel miracle ? L’histoire ne le dit pas.
En revanche, il en propose une autre théorie :
Dans l’ensemble des pays développés, la part de l’excédent brut d’exploitation dans la valeur ajoutée a sensiblement augmenté depuis une quinzaine d’années, au détriment de la part salariale. Partout, ou presque partout. Sauf en France, où elle est restée stable.
Aussi, les montagnes de dividendes des sociétés cotées proviendraient exclusivement de leur développement à l’international. En aucun cas d’un surcroît d’exploitation du travail ou du petit capital français. L’explication est bien pratique et devrait ravir les représentants du MEDEF car elle revient à dire « Pas touche à mes profits. Ils sont faits à l’étranger pour mes actionnaires étrangers. Ils ne nuisent à personne. C’est tout bénef pour le pays »
N’ayant pas bien compris par quel argument Peyrelevade a pu aussi facilement écarter la théorie Lordon, je suis revenu à la charge dans les commentaires, ce qui a permis à Peyrelevade de livrer enfin le fond de sa pensée :
Il est plausible que le “grand capital” cherche à augmenter son taux de profit en pesant sur ses propres salariés et sur ses sous-traitants. Il est peu plausible que le “petit capital”, pressuré par le grand, accepte une diminution de son taux de profit sans chercher d’abord à faire supporter le sacrifice par ses propres salariés. Le déplacement du partage de la valeur ajoutée au profit des salaires au sein des PME est donc, à mes yeux peu, plausible.
Une fracture sociale au sein du patronat ?
Peyrelevade, un homme qui a toujours évolué dans l’univers du capital, pense que le taux de profit est une exigence intangible non susceptible de restriction, et que l’on peut pressurer sans limite le travail pour délivrer la rentabilité voulue. Lordon, lui, semble supposer que le grand et le petit capital ne vivent pas dans le même monde. Le petit, au contraire du grand, doit composer avec les limites de l’économie réelles : Lorsque les salaires sont déjà au plus bas et que tous l’essentiel des gains de productivité ont déjà été réalisés, il faut, si nécessaire, prendre sur le taux de marge pour servir les prix demandés par les donneurs d’ordres.
Puisque les statistiques ne permettent manifestement pas de conclure définitivement ce débat passionnant, appelons-en donc à l’expérience de nos lecteurs. Après tout, peut-être certains patrons ou cadres de PME pressurés par les exigences du capitalisme actionnarial ont-ils le loisir de consulter les blogs ! La question est d’importance car elle fait apparaître l’hypothèse d’une divergence d’intérêts entre les petits patrons et les dirigeants des grands groupes.
Si la thèse de Lordon était confirmée par les faits, l’ennemi pour les petits patrons ne serait plus (seulement) l’Etat qui les écrase de taxe et les étouffe par trop de règlementations, mais les règles du jeu imposées par les conseils d’administration des grandes firmes qui s’avèrent impraticables et qui les pressurent comme de la petite main d’œuvre.
C’en serait alors finit des beaux discours du MEDEF qui prétendent représenter l’ensemble du patronat, de l’artisan à la multinationale, tous réunis dans la figure mythique de l’entrepreneur. Les revendications du MEDEF pour toujours plus de liberté pour les entreprises, pour un monde toujours plus ouvert et concurrentiel, pour légitimer les profits et les rémunérations sans limites, apparaîtraient alors, non plus comme l’expression de l’intérêt des entreprises en général, mais comme l’expression de simples intérêts de classe des grands gagnants du système, ceux qui se trouvent à la jonction entre les sphères productives et financières.
Si les patrons de PME arrivaient à penser que leur intérêt se situe moins dans l’approfondissement infini du libéralisme et de la mondialisation, mais dans une concurrence mieux régulée et une pression actionnariale moins contraignante, le rapport de force pourrait sérieusement être modifié et la capitalisme aurait quelque chances d’être réellement “refondé”. Le débat quitterait le terrain idéologique et l’opposition liberté-interventionnisme pour se déplacer sur le terrain strictement économique autour de nouvelles questions comme : Qui profite réellement du système actuel ? Comment assurer le développement des vraies entreprises ? Comment mieux rémunérer les vrais entrepreneurs ?
Malakine
Source :
Frédéric Lordon “le paradoxe de la part salariale” 25 février 2009 dans la pompe à Phynance
Jean Peyrelevade “Du partage de la richesse (4)” 31 mars 2009 dans “la refondation du capitalisme”
Tiens j'ai bien envi de poster un commentaire mais je préfère en faire un billet car j'ai une petite théorie perso sur la question.
On en a déjà parlé ici du reste :)
Débat trés intéressant aux multiples conséquences.
Rédigé par : Seb de CaRéagit | 16 avril 2009 à 10:19
« S’il apparaissait effectivement que le patronat des PME et celui des dirigeants managériaux des grands groupes formaient deux groupes sociaux distincts, vivant dans des univers différents »
Je ne connais que le monde des multinationales, mais instinctivement il me parait évident qu’il est fondamentalement différent de celui des PME.
J’ai essayé de lire les réponses de Peyrelevade à Lordon : trop compliqué pour moi ! Je ne sais pas quels rapports ce type entretient avec la réalité dans son bureau douillet de Natexis mais le schéma des relations client-fournisseur décrit par Lordon qui ne le convainc pas, je le vis personnellement à l’international tous les jours depuis 20 ans ! Mon boulot consiste effectivement à pressuriser les sous-traitants et à faire profiter les donneurs d’ordre, les clients finaux (les compagnies pétrolières dans mon cas) de toutes les réductions obtenues. Et avec la crise, c’est carrément devenu un mot d’ordre relayé par les plus hautes autorités de l’entreprise.
Rédigé par : RST | 16 avril 2009 à 10:29
@ Seb
Reviens nous déposer le lien quand tu l'auras fait.
@ RST
Le point de débat entre Lordon et Peyrelevade, c'est de savoir si tes sous traitants peuvent répercuter la pression que tu leur mets sur leurs salariés ou si tu aspires leurs profits.
Rédigé par : Malakine | 16 avril 2009 à 10:34
Les 2 mon capitaine !
Rédigé par : RST | 16 avril 2009 à 10:36
J'irai voir ensuite les liens, mais je peux déjà témoigner qu'il existe au moins un patron de TPE relevant apparemment de la fracture sociale selon Lordon.
- il 'est affiché brutalement et récemment anti-sarkozyste. Il s'était séparé de biens propres pour sauver son entreprise. Transformant des produits de bas de gamme, la crise joue en faveur de sa production en ce moment et il a donc pu donner une prime "égale pour tous", lui compris, suite à des résultats enfin améliorés.
- ses commanditaires : la grande distribution. J'essayerai de sonder son avis sur le MEDEF !
Rédigé par : PeutMieuxFaire | 16 avril 2009 à 10:40
@Malakine,
Je sors d'une journée passée avec le contrôle de gestion de ma (grande) entreprise et suis toujours interloqué par la volonté de faire rentrer les clients dans une relation binaire (rentable/non rentable). Que ce soit un client industriel ou tertiaire, les contrôles de gestion demandent un ratio de rentabilité fixe ou à atteindre, sans se demander une seule fois si la prestation effectuée est jugée bonne.
La différence avec un patron de PME est que celui-ci à un "amour" du travail bien fait, des relations profondes et amicales avec son client. Les grandes entreprises diffusent l'anonymat des relations, privilégie l'indifférenciation des situations, le rapport constant à l'argent dans la nécessité de faire ou pas telle action.
Le choix entre les TPE et les grandes entreprises revient à choisir l'humanité à l'inhumanité, la différence à l'indifférence. Le culte de l'argent reste donc une finalité pour beaucoup...
Rédigé par : Feelgood | 16 avril 2009 à 20:02
Il y a un mois environ, un reportage sur Arte montrait, en vrac: un débat PME/Sarkozy où un patron a déclaré qu'ils étaient traités en esclaves; une PME sommée de réduire ses coûts de 3% chaque année; une autre incitée à délocaliser; des acheteurs témoigner qu'ils exerçaient une pression permanente pour faire baisser les prix. La plupart des PME concernées ont un gros client qui fait l'essentiel de leur CA : c'est bien sûr ce client-là qui exerce la pression.
Dans son article, Peyrelevade joue les imbéciles. Il sait bien que cette pression existe, elle doit donc avoir un effet, lequel ne peut être qu'en faveur de celui qui l'exerce.
Rédigé par : dmermin | 16 avril 2009 à 20:56
Je crois qu’en cette affaire, le côté moins impersonnel des relations humaines joue un grand rôle au sein des PME, surtout les plus petites d’entre elles. L’aspect psychologique est donc essentiel.
A priori le petit patron est tenté dans tous les cas de préserver son profit personnel. Les contraintes imposées par le donneur d’ordre seront donc obligatoirement répercutées sur le salaire soit en maintenant la pression à la baisse (ou à la stagnation) soit en « tirant » sur la contre partie du salaire, c'est-à-dire le travail fourni. Le patron réclamera alors un effort supplémentaire à la fois dans la quantité de travail et dans sa diversité (toujours plus de polyvalence avec souvent une surqualification des tâches). C’est ici que la psychologie intervient, car il arrive toujours un moment où le patron « sent » qu’il ne peut pas plus demander à son salarié en regard de ce qu’il lui paie. A ce point, il aura tendance effectivement à rogner sur son profit d’une manière ou d’une autre. J’ai surtout observé, dans le cadre de mon expérience personnelle ces dernières années, une tendance notable de mon employeur à « montrer l’exemple » c'est-à-dire à en faire toujours plus aux yeux de son personnel.
Il est impossible que ce type de situation n’ait pas des répercutions dans la manière du petit patron de se percevoir par rapport « aux gros ». L’animosité qu’il peut éprouver envers ceux-ci est d’ailleurs de nature indirecte, et passe par le véritable objet de vindicte : les banques (« EUX ont les moyens d’obtenir une rallonge de leur banque, pas moi »). Ce type de patron ne revendique pas non plus sa qualité de « patron », réservé pour lui « aux gros » mais emploie volontiers le terme « d’indépendant » pour s’en démarquer et mieux souligner combien il ne peut compter que sur lui-même. J’ai oublié de vous dire que je travaille dans une petite unité touristique de moins de 9 salariés, et que je serais bien en peine de vous préciser la nature exacte de mon poste : réceptionniste, serveur, secrétaire, bricoleur, et surtout comptable puisque je traite toute la comptabilité sauf les salaires (après avoir rédigé ce petit texte, je vais m’atteler à la TVA du mois et vous noterez l’heure !). La pression qui pèse sur la sous-traitance, nous la ressentons nous au niveau des forfaits d’hébergements de la clientèle professionnelle, lesquels souffrent eux aussi de la compression générale. Nous devons donc adapter nos prix pour cette clientèle là, sous peine de la voir partir vers les hôtels de chaîne qui ont plus les moyens de casser les prix et ne s’en privent pas par les temps qui courent.
Je termine sur une parenthèse. Qui se souvient, il y a à peu près un an et demi, d’une extraordinaire série d’émissions de Daniel Mermet (je précise que je prends le personnage avec des pincettes) sur la manière de percevoir la mondialisation par des petits patrons dans la métallurgie d’une vallée haute savoyarde ? La haine véritablement de ces gens vis-à-vis de leurs donneurs d’ordre, des « requins sans foi ni loi » qui les pressuraient « comme des citrons », était patente et vérifierait plutôt donc la théorie de Lordon.
Rédigé par : Daniel Dresse | 17 avril 2009 à 00:24
Même s'il est bavard, D.D. met toujours l'humain avant l'idéologie.
En ce qui concerne les "petits" patrons, leur haine vis à vis des donneurs d'ordre relève -t-elle plus de la jalousie de ne pas arriver à en faire autant ou bien d'en être la victime ?
Et qu'ils rognent sur leurs marges après avoir épuisé tous les moyens de survivre en pressurant leurs salariés, les fera-t-il basculer de l'autre côté d'une fracture des 'luttes des classes' , permettant un 'vrai renversement de logique' ?
Admettons que celà puisse déboucher sur quelques changements economiqco-politiques sur la base d'intérêts commun conjoncturels précis et limités , et sur pas mal de quipropos sur les suites à en donner et sur le fond des choses.
Lordon : Mickey au pays de l'alter-économie en Disney-Land, où les acteurs économiques sont des petits pions réagissant à des stimulis binaires.
Rédigé par : oppossum | 17 avril 2009 à 01:26
Bonjour à tous. Et merci à Malakine, dont je lis régulièrement les billets.
Il est difficile de trancher, lorsqu'une question comme celle-là est posée, si on n'est pas économiste.
Je me contenterai donc de constater que le recours à des figures mythiques, telles celle de l'entrepreneur, est a priori suspect. Elle me fait penser à l'expression de Jacques Sapir, lorsqu'il parle des "mythes de l'économie vulgaire". Les mythes sont toujours commodes lorsqu'il s'agit d'expliquer aux non-initiés qu'ils doivent avant tout croire à ce qu'on appelle pompeusement "les lois de l'économie". Croit-on encore à ces fameuses lois (les appelle-t-on encore ainsi) lorsqu'on connaît certains mécanismes?
Rédigé par : archibald | 17 avril 2009 à 01:44
@ Opossum
Non ! Je passe plutôt pour taciturne. Il est vrai que j’écris à un peu tout le monde, la nuit de préférence. Ca ne mange pas de pain vous en faites ce que vous voulez (et puis j’ai la conscience tranquille, j’ai fini ma TVA)…
- Même si je fais passer les hommes d’abord (il y a peut-être une mine ?) toutes les explications économiques ou historiques mettant en avant « la jalousie » m’apparaissent peu performantes. Ce doit être mon vieux fond d’éducation chrétienne forcée et qui ne m’a pas laissé que des bons souvenirs : je me méfie viscéralement de tout ce qui traîne dans le décalogue. Il est bien trop facile de faire disparaître tout ce qui a trait à l’injustice derrière « la jalousie ». Vous pouvez très bien expliquer la révolution française –comme la rancœur des petits patrons contemporains- par la jalousie mauvaise d’un peuple de ratés. Ce disant, je crois que vous risquez de passer à côté de l’essentiel…
- Je suis effectivement persuadé que le basculement d’une large fraction du petit patronat hors du giron du grand va être lourd de conséquences politiques (avatar du dépérissement en général des classes moyennes). Bien sûr qu’il y aura des illusions lyriques et des alliances sans lendemain, mais l’histoire n’est faite que de cela : alliances et mésalliances des couches sociales.
- « les acteurs économiques sont des petits pions réagissant à des stimulis binaires » C’est marrant vous venez de donner inconsciemment une définition de l’homo oeconomicus tel qu’il est consacré dans les théories économiques classiques (ouf ! j’ai failli dire un autre mot !). Je ne me souviens pas d’avoir lu ça dans les textes de Lordon, qui ne s’est d’ailleurs jamais revendiqué « alter » en quoi que ce soit mais tout simplement économiste. Revoyez vos définitions : moi, je suis bavard, d’accord ! Mais Lordon, lui, il est BRILLANT ! Quant au « Mickey de Disneyland », gardez ça pour l’Elysée…
Rédigé par : Daniel Dresse | 17 avril 2009 à 03:53
http://careagit.blogspot.com/2009/04/de-la-lutte-des-classes-entre-patrons.html
En espérant te lire en commentaires
A bientôt
Rédigé par : Seb de CaRéagit | 17 avril 2009 à 12:09
La confusion dramatique entre petis patrons et patrons est aussi dramatique que la confusion prolétaires et sous prolétaires à la différence près que lorsque il y a des incidents entre ces deux derniers (incivilités, voitures qui brulent et réaction démocratique souvent malheureuse) tout est vu sous l'angle "milieu populaire" qui ne correspond pas à la réalité sociologique !
Etrange....
Rédigé par : Magnin | 17 avril 2009 à 20:58
D Dresse,
Je bosse dans une grosse multinationale, pas mal de chaos mais une forme d'anonymat qui permet presque plus de liberté que dans des petites boites où la loi du chef écrase tout, surtout quand le chef est un peu borné, voire très con, Dieu le pardonne.
Une grosse société est un peu chaotique et la volonté du PDG est émoussée, chacun fait un peu sa vie hors du village de surveillance des petites boites qui sont souvent étouffantes par cette volonté de contrôle qui tue tout. Les grosses boites veulent tout contrôler mais savent que c'est impossible, alors on joue avec ça.
C'est déconcertant au début, mais on voit qu'on peut se débrouiller dans une grosse boite et slalomer administrativement bien plus que dans des petites structures. Sans compter que les revenus sont bien supérieurs du fait des leviers d'échelle qu'on peut y trouver.
Rédigé par : log | 18 avril 2009 à 01:32
@ Olaf
Merci pour l’aperçu de votre expérience. Attention de ne pas tout systématiser non plus. La qualité des relations est essentielle dans une petite structure, plus sans doute que dans une grosse boîte où, comme vous dites, les aspects négatifs peuvent être dilués (à ce sujet, j’ai connu des enfers en miniature). Mais il arrive que la bonne entente soit au rendez-vous autant horizontalement (entre les collègues) que verticalement (avec le chef). Si cette condition est remplie, alors « small maybe beautiful ». Pour la rémunération par contre, c’est effectivement une autre histoire…
Rédigé par : Daniel Dresse | 18 avril 2009 à 04:48
Politiquement, ce clivage entre petit et grand patron a déjà causé en France la tentative de représentation des petits patrons par Ségolène Royal lors de la précédente présidentielle (véritable sécurité sociale pour les patrons notamment).
On dit souvent qu'elle a une perception intuitive des bouleversements du corps social. Voila que Lordon théorise cette intuition.
La théorie semble crédible en tout cas.
La pression sur les salaires se confronte tout de même aux seuils imposés par la législation (et heureusement !).
Bien sûr, il y a toujours la possibilité de délocaliser, mais pour un petit patron, ce n'est pas si simple. rien que le fait de devoir quitter son pays, ses proches, sa vie au final doit en dissuader plus d'un.
Bref, effectivement la psychologie et la sociologie doivent avoir une importance capitale dans les choix opérés à ce niveau. Mais seul un spécialiste de micro pourrait nous en dire plus.
Rédigé par : EtienneB | 18 avril 2009 à 06:54
Non, non non et non !! Ségolène Royal n'a aucune intuition. Elle cherche à faire parler d'elle et à cultiver une image. Pour cela, elle est capable de tout, y compris parfois de développer des idées justes !
Je conseille le billet de Seb. Il cite un sondage édifiant sur l'attitude des patrons à l'égard de la bourse. Mais j'ai tout de même des toutes sur sa véracité. Il faudrait vérifier la source ...
Rédigé par : Malakine | 18 avril 2009 à 08:43
La confusion des classes est symptomatique des certaines dérives du libéralisme qui est d'une part la confusion et dans un second temps de monter les uns contre les autres au sein d'un même espace économique. Quand à Royal, je suis en désaccord avec Malakine car elle a de bonnes intuitions mais le prblèmes c'est que cela reste des petites idées non exploitées à fond, comme un autodidacte qui fourmille de bonnes connaissances sans les ranger dans l'ordre.
Rédigé par : Magnin | 18 avril 2009 à 13:22
Les petits patrons vendent du travail, les grands brassent des richesses et des ratios.
Pas le même métier, effectivement !
La réponse de Peyrelevade, qui aura quand même beaucoup fait pour l'ultra-libéralisme, est à pisser de rire. Ce type est totalement sorti de la réalité et je lui conseille vivement d'aller faire un tour dans la rue…
:-))
Rédigé par : Monsieur Poireau | 19 avril 2009 à 09:09
@ Tous
Article et débat passionnant que mon nouveau statut de petit patron ne me permet de rejoindre qu'avec un temps de retard. Mon expérience des deux mondes me permet de dire :
1- qu'il y a clairement une différence d'appréhension du facteur humain entre les PME et les grandes entreprises. Dans une grande entreprise, on pressure les coûts de manière abstraite, souvent à l'extérieur de son entreprise, encore que les vagues de licenciements internes sont plus concrètes. Néanmoins, il y a un certain anonymat qui permet à l'état de nature de s'exercer plus facilement que dans les plus petites structures ou le lien social rend plus difficile les comportements plus "animaux".
2- le deuxième point que je peux apporter est un rapport à la concurrence. En général, les PME sont dans des situations de véritable concurrence (le magasin à côté), ce qui limite la hausse des profits. Les grandes entreprises, elles, ont les moyens de réduire le niveau de concurrence par les rachats de concurrents, ce qui leur donne un plus grand pouvoir sur le marché et leur permet d'extraire une plus grande part de profit.
J'ai le souvenir d'une mission quand j'étais consultant où nous avions trouvé que le niveau de profitabilité des filliales de notre client était complètement corrélée à la Part de marché des 3 leaders. Plus le marché était fragmenté, plus le profit était limité, plus le marché était concentré, plus le profit était élevé. Pourquoi croyez-vous que les grandes entreprises passent leur temps à se racheter les unes les autres dans des opérations d'une complexité aussi grande et dévoreuse d'énergie pour le top management ?
De manière pas complètement paradoxale, l'idéal des grandes entreprises est plutôt une concurrence limitée avec juste une poignée d'acteurs à la fois "too big to fail" mais également trop conscients de leurs intérêts communs, pas forcément une oligopole illégal, mais simplement des intérêts bien compris. Cela n'est pas possible quand il y a trop d'entreprises présentes sur le marché, ce qui rarement le cas pour les PME.
A dire vrai, je pense que la vérité est un peu entre les deux. Il y a bien une fracture. La pression des grandes entreprises se transmet clairement aux petites entreprises, mais je crois que les petits entrepreneurs ne répercutent pas entièrement la pression sur leurs salariés.
Rédigé par : Laurent, gaulliste libre | 19 avril 2009 à 12:19
Très bon angle. Là où on voit le schisme définitif entre grands groupes et petits patrons, là où on se dit qu'on est vraiment mal barre...
Rédigé par : b.mode | 19 avril 2009 à 14:27