L'an passé, l'horizons d'or avait été attribué à Emmanuel Todd pour ses interventions pendant la campagne présidentielle. Cette année encore, il concourait en position de favori avec la sortie de son essai « Après la démocratie » et les nombreuses interviews qu'il a donné à cette occasion, sur l'évolution du Sarkozysme, la présidentielle américaine ou le développement de la crise.
Pourtant Emmanuel Todd n'arrive cette année qu'en seconde position, devancé par Jacques Sapir. La crise financière a en effet fortement accentué la demande d'expertise en matière économique. Il fallait comprendre ce qui se passait, ce n'était pas toujours simple et on avait besoin de grands pédagogues.
Jacques Sapir fût probablement le meilleur pédagogue de la crise financière. Ces analyses écrites ou orales ont été précieuses à beaucoup pour comprendre les ressorts de la crise. Jacques généreux, Jean Luc Gréau ou Frédéric Lordon auraient également mérité d'être distingués à ce titre, mais Sapir avait en outre l'avantage de ne pas être qu'économiste. C'est aussi un expert en géopolitique ainsi qu'un fin connaisseur du monde russe, ce qui lui a permis également d'éclairer l'autre grande crise de l'année : le conflit entre la Russie et la Géorgie.
Jacques Sapir qui n'était jusqu'ici connu que des seuls protectionnistes et des amis de la Russie (ce qui revient souvent au même) s'est cette année fait connaître du grand public en pouvant accéder aux grands médias. Le microcosme des économistes en cercle commence à devenir réellement étouffant. Il est urgent que l'économie puisse de nouveau faire débat et pour cela les médias doivent apprendre à découvrir ses penseurs "dissidents" !
"Il est urgent que l'économie puisse de nouveau faire débat et pour cela les médias doivent apprendre à découvrir ses penseurs "dissidents" !"
Comment ne pas être d'accord. Mais il y a encore du boulot.
C'est pas demain qu'une émission comme celle de P.Fourier (qui a, entre autres, réalisé des interviews de Sapir) sera diffusée sur une grande radio à une heure de grande écoute.
Rédigé par : RST | 30 décembre 2008 à 21:38
"Le microcosme des économistes en cercle commence à devenir réellement étouffant."
==> oui. comme le cercle des économistes auto-proclamés et patentés qui s'autodésignent comme experts qualifiés pour intervenir sur les ondes où ils pontifient et monopolisent une bonne partie du discours sur le sujet. Par ailleurs, qui dit cercle laisse entrevoir l'existence d'une garde rapprochée autour de certains intérêts sensibles. N'était-ce pas à ce propos le but recherché lors de la création début 2007 je crois de ce collectif chargé de jouer les chiens de garde des dogmes de l'économie libérale pendant la campagne, constituant en quelque sorte un premier rideau défensif prèt à intervenir pour contrer doctement tout discours impénitent sur le sujet. Comprendre : les politiques qui feraient assault de démagogie auront affaire à nous. Nous ne laisserons pas dire n'importe quoi comme ce fut le cas par le passé ! Des fois que ces rigolos de politiques se mettraient à penser hors des clous démlimités par l'orthodoxie libérale ! C'est ainsi que Paul Jorion fustige sur son blog "la servilité des économistes stipendiés par les commanditaires de leur savoir" !
Rédigé par : Pascal | 30 décembre 2008 à 23:51
@ Pascal
Oui, d'ailleurs, si mes souvenirs sont bons, Elie Cohen et ses amis ont réagit dans une tribune publiée dans le Monde à la montée du thème du protectionnisme en réaction au lobbying de Todd et de El Karoui. Ce sont effectivement des chiens de garde.
D'une manière générale, il me semble que la caste des économistes est très sujette au phénomène de pensée unique, plus encore que n'importe quelle autre profession. Hier soir, j'entendais le jeune économiste à la monde Nicolas Bouzou. C'est incroyable comme son discours était convenu. Il ne faisait que de répété des poncifs mille fois entendus : il faut des réformes de structures, flexibiliser le marché du travail, réduire les dépenses publiques, l'euro c'est une belle protection sans lui on serait mal ...
A croire qu'il est impossible de faire carrière dans ce métier autrement qu'en disant la même chose que tout le monde.
Rédigé par : Malakine | 31 décembre 2008 à 11:19
"A croire qu'il est impossible de faire carrière dans ce métier autrement qu'en disant la même chose que tout le monde."
Faudra que je la replace dans la conversation celle-là. Elle résume bien la situation.
Rédigé par : RST | 31 décembre 2008 à 11:55
@Malakine
Ce n'est pas trés différent des journalistes. Et puis ne n'entend que les économistes que l'on veut que nous entendions, si on interrogeait nous même des profs de fac ou des chercheurs on aurait peut-être une autre vision des économistes. Disons que le libéralisme des économistes et leur pensé unique provient, à mon avis, surtout de la présélection médiatique exercé par les journalistes et les lieux de pouvoir. Les économistes qui touchent un point sensible de la société sont surveiller de près par ceux qui ont intérêts à ce que rien ne change. Imagine un peu l'angoisse des milliardaires si un économiste démontre scientifiquement qu'ils ne servent à rien et qu'ils ne sont qu'une bande de parasite inutiles. Sous cet angle il n'est guère étonnant que Keynes et ses théories d'euthanasie des rentiers fussent rapidement enterré et celle des néoclassique et de Friedman réhabilité dans les années 70. Les puissants exercent une pression sur ceux qui peuvent leur nuire, ils favorisent naturellement les idées qui les arranges.
Rédigé par : yann | 31 décembre 2008 à 11:56
@ Yann
Je ne dis pas que tu as tort, mais il me semble que tu sous estimes le conservatisme inhérent à toute corporation. Les corporations ça pense en meute !
Rédigé par : Malakine | 31 décembre 2008 à 13:44