En Janvier 2007, le groupe Arena annonçait la délocalisation de son usine de Libourne et le licenciements des 196 ouvrières. A l'époque, la classe politique avait accueilli la nouvelle avec fatalisme, tant elle est acquise à l'idée de l'inéluctabilité de la désindustrialisation.
Pourtant, cette semaine, le tribunal des prud'hommes de Libourne vient de condamner l'entreprise à verser aux plaignantes 50 000 € chacune, estimant que «le transfert d'activité dans des pays à protection salariale et sociale inférieure aux normes françaises est susceptible d'entraîner une diminution des coûts de production, ainsi qu'une augmentation des marges, cette circonstance ne saurait à elle seule constituer un motif économique de licenciement suffisant »
La justice qui s'exprime avec le langage de l'extrême gauche pour condamner les fameux « licenciements boursiers ». Quel pavé jeté dans la marre de la bien pensance sociale-libérale !
Cette décision de justice, plutôt étonnante, a donné lieu à un silence assourdissant des politiques comme des éditorialistes. On sent comme un malaise, à droite comme à gauche.
La droite libérale craint de devoir légiférer pour revenir sur une jurisprudence exagérément « régulatrice » et autoriser toutes les délocalisations au nom d'une sorte d'absolutisme capitaliste. Difficile ...
La gauche gouvernementale, de son coté, se sent certainement piteuse. Elle ne peut se réjouir d'un principe jurisprudentiel qu'elle s'est toujours refuser à faire sien, elle, qui a toujours traité par le mépris les revendications d'extrême gauche tendant à « l'interdiction des licenciements boursiers ». Simple, démago, populiste, irréaliste, antiécononomique...
A l'époque des faits, la gauche, représentée par Ségolène Royal et son exégète Jean Louis Bianco, avait réagit (sur place pour faire des images et montré sa "solidarité") avec une proposition inepte "d'interdiction de la délocalisation des marques », qui visait en réalité surtout à protéger les fameux emplois de l'économie de la connaissance.
Parce qu'ils pensaient ne pas être légitime pour le faire (le fameux « l'Etat ne peut pas tout » de Jospin), parce que leur foi aveugle dans le libéralisme les amenaient à penser que les délocalisation n'étaient que le versant négatif d'une grande mutation économique qui conduirait la France vers le paradis de l'économie post-industrielle, ou parce qu'il était plus pratique de nier le phénomène en minimisant son ampleur, les politiques se sont toujours abstenu d'introduire dans le droit positif la moindre règle pour encadrer le mouvement de délocalisation.
Or, comme la nature, le Droit a horreur du vide. Il n'y a rien qui ne puisse être laisser à un pure pouvoir discrétionnaire. Aucune liberté, ni aucun droit ne s'exerce sans limite. Voilà ce que les politiques ont oublié.
La question de la légitimité des délocalisations, qui n'a jamais été sérieusement débattue sur le plan politique, devient donc à présent une question juridique. C'est au juge qu'il va revenir de fixer la limite entre la délocalisation légitime et celle abusive. On lui souhaite bon courage ... Il est probable d'ailleurs qu'il renonce devant la difficulté de l'exercice et se replie vers une solution au cas par cas.
Il est peu vraisemblable que le monde économique apprécie que les éventuelles indemnisations des salariés soit laissée à l'appréciation a posteriori des Juge des prud'hommes.Il est vrai qu'il n'y a rien de pire que l'insécurité juridique.
Il y a, à l'évidence, un besoin de règles, ne serait-ce que pour faire accepter aux salariés concernés et à l'opinion publique la fermeture de sites (encore) rentables. La distinction proposée par le juge des prud'hommes entre la délocalisation destinée à accroître les marges et celle destinée à les maintenir, n'est pas absurde, même si elle sera délicate à appliquer et toujours sujette à contestation.
Le gouvernement est désormais au pied du mur. Il va devoir devra donc donner sa définition des cas où la République pourra accepter qu'une entreprise supprime des emplois en France pour en créer ailleurs. Je dis bien la République et non pas les lois de l'économie mondiale dérégulée. Ca change tout et c'est presque une petite révolution.
Malakine
Les faits (JT du 9 septembre)
Ségolène Royal proposant l'interdiction de la délocalisation des marques
Cette mesure consiste à appuyer très fort sur la soupape de la cocotte minute pour l'empêcher de tourner.
Bon moyen en effet de l’empêcher de tourner, mais au PS, les "courants" mal conseillés par les rêveurs, puceaux de l’entreprise style OBO et Liêm Hoang-Ngoc, ne pense évidemment pas à réduire le gaz sous la cocotte, (pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?).
Pour les entrepreneurs la situation serait comique si la survie de la France et de leurs savoirs faire n’était en jeu.
Comme le disait Malakine chez Toreador : "Les dirigeants du P.S. se contentent du monde tel qu'il est" et laissent crever les acteurs de l'économie. Normal leurs amis profs dans les écoles d'économie et de commerce leur dispensent leur logorrhéique haine viscérale de l'entreprise, à longueur d'années (ce qui fait le bonheur de Julien Dray) !
Voilà ce que disait David Mourey, prof d’économie à Pontaut-Combault et qui est conscient de la nécessité de faire rentrer la micro et l’entreprise dans le cursus :
-"Comme le dit le délégué général de l’Institut de l’entreprise, Jean-Damien PÔ, la microéconomie ne fera pas plus aimer l’entreprise mais elle la fera mieux comprendre et ce n’est pas rien. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles je défends l’idée de développer l’enseignement de la microéconomie au lycée."-
Les acteurs qui voudraient pouvoir développer leur entreprise CONNAISSENT LES BLOCAGES FISCAUX DEPUIS 30 ANS. Depuis trente ans les profs de macro refusent les évidences nées de l’expérience : d’où cette haine de l’entreprise dans les écoles, dont le rôle principal devraient être au contraire la faire aimer.
Incroyable, oui, mais c’est la triste réalité du monde du travail.
Tourner la tête pour ne pas voir cette réalité est la solution de la bullocratie.
Si cela dure encore longtemps, les savoirs faire auront disparu.
Comme en 1936 les autruches médiatico-politiques se voilent la face au lieu de s'attaquer aux racines du mal. Une fois de plus chacun défend ses certitudes à 2 balles ou lieu de poser des questions aux principaux acteurs : L'histoire n'en finit pas de se répéter.
Rédigé par : Ozenfant | 15 septembre 2008 à 11:14
La marque est un signe distinctif qui permet au consommateur de distinguer le produit ou service d’une entreprises de ceux proposés par les entreprises concurrentes. La marque constitue un repère pour le consommateur et éventuellement une "garantie". (définition).
Cette marque résulte le plus souvent d'un savoir-faire collectif. Les employés ne peuvent divulguer le "secret de fabrique" sous peine de sanction pénale or l'entrepreneur peut, lui, priver de manière tout à fait légale ses salariés de leur compétence et de leur emploi tout en conservant l'usage de la marque déposée car les transferts de technologie ou sous-traitance sont parfaitement légaux.
Est-ce forcement "inepte" de vouloir s'y attaquer ?
Certes, j'admets que si ma prochaine "CLIO" vient à être commercialisée sous le nom de RENAULT-Espagne ou RENAULT-Slovénie cela ne change rien à la situation des salariés de Flins, mais c'est déjà plus clair pour le consommateur.
Alors proposition "insuffisante" plus que "inepte" ! ^^
Rédigé par : PeutMieuxFaire | 15 septembre 2008 à 11:57
Putain, ,les lois qui défendent les intérets de l'état?
Mais ou vat'on ?
Moha qui croyais que les lois sèrvaient les intérets de finaciers intèrnationeaux ? :-(
Rédigé par : UN chouka | 15 septembre 2008 à 13:44
Je trouve votre article un peu confus. En fait de quoi s'agit-il ?
Vous exposez les faits (rien à dire ) et je vous cite « Pourtant, cette semaine, le tribunal des prud'hommes de Libourne vient de condamner l'entreprise à verser aux plaignantes 50 000 € chacune, estimant que «le transfert d'activité dans des pays à protection salariale et sociale inférieure aux normes françaises est susceptible d'entraîner une diminution des coûts de production, ainsi qu'une augmentation des marges, cette circonstance ne saurait à elle seule constituer un motif économique de licenciement suffisant »
Pour aider à la compréhension vous auriez du citer le texte de loi du code du travail « Tout licenciement pour motif économique doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ». C'est sur cette phrase qu'ont du travailler les juges du tribunal des prud'hommes.
En effet c'est à partir de là qu'il faut répondre ou tenter de répondre à la question suivante « qu'est ce qu'un motif économique ». Et c'est ici qu'intervient l'appréciation des juges. Il y a 2 réponses possibles :
1) L'entreprise est-elle en difficulté financière
2) Si non, peut-elle le devenir si sa compétitivité doit être remise en question en ne procédant pas à des licenciements.
A la première question il était simple de répondre et les juges ont répondu « non ». En effet Areva dégages des bénéfices. La deuxième question est plus complexe car ce n'est pas aux juges d'apporter une réponse. La loi prévoit qu'il revient à l'entreprise donc à l'employeur de démontrer (en droit d'apporter la preuve) que si elle ne procède pas à des licenciements alors sa compétitivité risque d'être remise en question et c'est alors aux juges d'apprécier les arguments apportés par l'employeur. Comme dans tout procès les juges vont-ils être ou pas sensibles aux arguments ainsi développés ou le seront-ils par les arguments de la défense.
Par le jugement apporté on peut penser que les juges n'ont pas été sensibles à l'argumentation d'Aréva qui consistait à démontrer la réponse 2 « La compétitivité de l'entreprise serait remise en question si l'on ne procède pas à des licenciements ». Ils ont probablement été plus convaincus par l'argumentation de la défense qui visait à démontrer le contraire à savoir qu'il s'agissait « d'une opération purement financière dont le seul but était d'accroitre les bénéfices »
Dans ce jugement je ne vois pas très bien où est le langage d'extrême gauche. Vous dites ensuite et je vous cite à nouveau « Or, comme la nature, le Droit a horreur du vide. Sachez que les entreprises aussi.
Outre le fait que Aréva ait appel et donc que le jugement n'est pas définitif, les entreprises qui ne sont pas (contrairement à certaines croyances) dirigées par des imbéciles sont parfaitement au courant de cette situation et de la position de certains prud'hommes. C'est ainsi que comme Renault la semaine dernière elles essaient de trouver la parade à ce type de jugements. Qu'est ce que Renault est entrain de faire ? Tout simplement de négocier des départs volontaires qui apportent aux salariés des indemnités qui les incitent à na pas aller aux prud'hommes. Ca marche et c'est toute la difficulté face à laquelle se trouvent confrontés à leur tour les syndicats.
Rédigé par : Flamant rose | 15 septembre 2008 à 14:55
Très bonne nouvelle. Du moins dans ce cas précis.
Cela n'interdit pas toute les délocalisations.
Puis, avec la montée du baril, on peut espérer une vague de "relocalisation".
Rédigé par : Etienne | 15 septembre 2008 à 15:38
@ Flamant rose
Si je vous suis bien, cette jurisprudence est donc un non évènement ?
Bon, soit. Je ne sais pas. Il m'a semblé que la décision de sanctionner une fermeture de site pour accroître une "compétitivté" déjà bonne était un peu une nouveauté, mais je peux me tromper.
Je crois quand même que le cas de Renault n'a rien à voir. Ce n'est pas un cas de délocalisation mais en plan social tout ce qu'il y a de classique.
@ PMF
Je ne veux pas faire du Ozenfant, mais "si je comprends bien le pourquoi, j'aimerais qu'on m'explique le comment" :-) C'est inepte simplement parce que c'était une proposition improvisée et manifestement impossible à mettre en oeuvre.
@ Ozenfant
Il est pas protectionniste le Hiem Hoang Ngoc ? Tu es sûr ? OBO oui, on sait. Il est grave. C'est du genre à penser que plus il y aura d'ouvriers au chômage, plus il y aura d'ingénieur dans les tâches de "conception". Je ne crois pas avoir entendu Hoang Ngoc professer ce genre d'inepties lors de ses très nombreux passages à "des sous et des hommes"
Rédigé par : Malakine | 15 septembre 2008 à 15:45
@ Malakine
Vous dites « Si je vous suis bien, cette jurisprudence est donc un non évènement ? ».
Bien sur que c'est un non événement et ceci pour une raison bien simple c'est que cette jurisprudence existe déjà et on la connaît. D'ailleurs la société Sediver vient d'être condamnée il y a un peu plus d'une semaine par la cour d'appel de Riom pour des délocalisations en Chine et au brésil sans avoir pu justifier le motif économique ( à noter que Sediver avait gagné en première instance). Les salariés de Sediver étaient défendus par Jean louis Borie avocat au barreau de Clermont Ferrand. Je confirme donc que le jugement concernant Aréva était prévisible car conforme à la jurisprudence et que c'est donc un non événement sauf pour ceux qui le découvrent et croyez moi les chefs d'entreprises ne découvrent rien.
Vous me prenez au mot sur Renault et vous avez raison mais il n'empêche que la procédure pour les chefs d'entreprises reste la même que ce soit pour un plan social ou pour des délocalisations à savoir négocier individuellement avec les salariés une indemnité de départ et si cette procédure ne marche pas on procède alors à ce qu'on appelle une « ouverture de guichet de départs volontaires » C'est la procédure qu'a choisi le « Monde » pour son plan social prévoyant 129 suppressions d'emplois. Le guichet de départs volontaires a été ouvert le 4 avril et clos le 30 juin.Le Figaro a employé la même procédure:Le guichet de départs volontaires ouvert par le quotidien début mai a été accepté par plus de 80 personnes, dont plus de la moitié de journalistes et ce sur un effectif de 600, la direction n'en espérait pas tant. Même procédure chez wanadoo et on pourrait en citer d'autres.
Oui Aréva est un non événement. Les chefs d'entreprises savent s'adapter à l'air du temps que ce soit pour les délocalisation ou les plans sociaux.
Rédigé par : Flamant rose | 15 septembre 2008 à 18:15
ouais, bon, ok ... J'avoue avoir découvert cette jurisprudence avec cette affaire, et je crois que je ne suis pas le seul dans ce cas. Ceci dit, ça ne change pas grand chose aux questions posées : E
st ce que ne peut dire que cette jurisprudence n'interdit pas quelque part les licenciements boursiers ?
Est ce que le silence du léglistaleur qui laisse les juges trancher ces questions n'est pas choquant ?
Est ce qu'on ne pourrait pas imaginer une loi qui fixerait le cadre des délocalisations ?
Rédigé par : Malakine | 16 septembre 2008 à 11:10