La trêve estivale a pris fin. L’actualité va bientôt reprendre ses droits et avec elle l’activité d’Horizons. Il arrive parfois que dans la torpeur des mois d’été survienne dans l’indifférence générale des évènements à portée historiques, les médias continuant à s’intéresser à l’actualité sportive, aux accidents de la route et aux diverses morts violentes qui surviennent ici ou là. Déjà au cours de l’été 2004, les prix du pétrole avaient commencé à flamber et il avait fallu plusieurs mois pour que l’on s’en inquiète.
Au cours de l’été 2007, la crise des crédits à risques ("subprimes") a fait quelques unes, mais entre le discours rassurant des élites officielles et le dilettantisme des médias, l’affaire passe presque inaperçue ou elle est présentée sous un jour suffisamment technique pour être incompréhensible au grand public. Pourtant, cette crise pourrait bien annoncer un Krach de grande ampleur de tout le système économique mondial. Elle était annoncée depuis plusieurs mois. On savait que les déséquilibres financiers ne faisaient que s’amplifier de part et d’autre du pacifique et que l’endettement américain était intenable sur le long terme. On savait que ça craquerait d’une manière où d’une autre. On ne savait par contre ni quand, ni comment cela se produirait.
La crise terminale du capitalisme mondialisé a peut-être commencé cet été avec l’affaire des « subprimes ».
Présentée hors de son contexte, l’affaire des subprimes apparaît comme une simple correction boursière comme le capitalisme en produit régulièrement. C’est en tout cas ce que les autorités voudraient bien nous faire croire. Replacée dans une perspective historique et dans le contexte des mouvements financiers qui caractérisent le système économique mondial de ce début de siècle, la crise apparaît beaucoup plus grave.
Pour comprendre ce qui se passe, il faut revenir en arrière. Avec l’effondrement du système communiste, les Etats-Unis sont devenus le centre d’un capitalisme désormais mondialisé. Cette nouvelle situation géopolitique a fait évoluer la nature des Etats-Unis. Comme l’a analysé Emmanuel Todd dans « Après l’empire », cette Nation qui était le phare du monde libre et le berceau de la démocratie est devenue un Empire prédateur et décadent qui vit au crochet du monde et qui a besoin de mettre en scène un « micromilitarisme théâtral » pour perpétuer l’illusion de sa puissance.
Le déficit de sa balance commerciale a commencé à explosé à partir de 1998. De 150 Milliards en 1997 elle a atteint le niveau hallucinant de 763 Milliards l’année dernière. Cette hyperconsommation produit une dette extérieure grandissante ; une dette publique au travers du déficit budgétaire, mais aussi ce qui est moins connu, une dette privée au travers de l’endettement des ménages. Ces dettes sont financées par le reste du monde sous diverses formes : actions, obligations, acquisitions de bons du trésor, investissements directs, condamnations en justice, ce qu'Emmanuel Todd qualifiait dans "Après l'empire" de "tribut" payé à l'Empire par ses sujets. On estime que les Etats-Unis drainent vers leur économie 70 % de l’épargne mondiale !
Les investisseurs qui permettent aux Etats-Unis de maintenir leur surconsommation sont en premier lieu les pays asiatiques, principalement le Japon et la Chine, qui placent leurs excédents commerciaux en bons du trésor, mais aussi tous les épargnants de la planète qui placent leurs économies dans des produits financiers investis aux Etats-Unis.
Comme l’écrivait Emmanuel Todd en 2002 ce système est structurellement instable « compte tenu du fait que la majorité des biens et des services achetés à l’extérieur correspondent à une demande indéfiniment renouvelable à court terme, alors que le capital financier investi aux Etats-Unis devrait correspondre à des investissements à moyen ou long terme »
Cette double dépendance des Etats-Unis à l’égard du reste du monde (en marchandises et en capitaux pour les acheter), s’est considérablement renforcée au tournant des années 2000.
Avec l’éclatement de la bulle internet, puis surtout après le 11 septembre, la réserve fédérale a inondé l’économie d’argent frais en baissant ses taux d’intérêt à un niveau proche de zéro en termes réels afin d’éviter un Krach de grande ampleur. Parallèlement, l’administration Bush relançait considérablement son déficit budgétaire. Cet afflux d’agent frais a permis à la bulle internet d’éclater en douceur et à l’économie de repartir mais elle a aussi nourrit l’endettement public et privé ainsi que le déficit de la balance commerciale. La gestion de la crise en 2001 n’a fait que repousser dans le temps les conséquences de l'inévitable correction qui suit toujours une bulle spéculative ... et elle a créé les conditions d'un Krach encore plus violent encore en favorisant l'émergence de nouvelles bulles.
Les ménages américains poussés par des taux d’intérêts faibles ont investi dans l’immobilier, ce qui a produit aux Etats-Unis comme ailleurs, une forte augmentation des cours. Là où le mécanisme est devenu délirant, c’est qu’il s’est enroulé sur lui-même. Les crédits n’étaient pas gagés sur les salaires des emprunteurs mais sur une anticipation de la hausse de la valeur des actifs acquis avec l’argent emprunté. Ce mécanisme a naturellement donné lieu à des excès. Les banques ont non seulement prêtées à des ménages non solvables (les fameuses subprimes) mais aussi adossé des crédits à la consommation sur la hausse de la valeur des patrimoines (les crédits hypothécaires).
Ce qu’on qualifie aujourd’hui de « crédits à risques » n’a en fait été possible que compte tenu d’une croyance totalement irrationnelle des milieux bancaires dans une augmentation infinie de la valeur des actifs immobiliers et de la capacité de l’économie américaine de drainer vers elle toujours plus de capitaux pour soutenir cette hausse des cours. Aussi, le système était condamné à exploser dès lors que les cours se mettraient à baisser, notamment sous l’influence d’une remontée des taux.
Le besoin de financement sans cesse croissant de l’économie américaine a précisément conduit la Fed à remonter ses taux à partir de 2004, ce qui a enclenché l’engrenage de la crise. La hausse des taux a ralentit les acquisitions immobilières. La baisse des valeurs immobilières a commencé à se faire sentir à fin de 2006. Les défaillances des ménages américains ont commencé à se multiplier, ce qui a produit des incidents chez les banques prêteuses. En principe, l’éclatement de cette bulle immobilière aurait du entraîner une suite de faillites en cascade qui se serait rapidement propagée des ménages aux entreprises par l’intermédiaire du système bancaire. Cependant, contrairement à ce qui s’est passé en 1929, le risque a été dilué sur les marchés financiers.
Les Etats-Unis n’ayant quasiment aucune épargne, les emprunts des ménages américains ont été revendus par les banques sur les marchés internationaux après avoir été fractionné en petites parcelles sous forme de titres. Ainsi, la crise au lieu d’entrainer la faillite de quelques banques américaines s’est propagée sur l’ensemble du système financier mondial. Le risque n’étant plus circonscrit, il s’est répandu partout sans qu’on sache exactement où. Les organismes financiers sont incapables de dire si leurs placement est sûr ou totalement pourri. Ne sachant plus qui est exposé et à quel niveau, les banques rechignent à se prêter de l’argent sur le marché interbancaire. C’est pour éviter un blocage de ce marché que les banques centrales sont intervenues la semaine dernière en injectant 330 Milliards de liquidités sur les marchés financiers. Si cette intervention a permis d’éviter que la panique entraîne le blocage entre banques, elle n’a cependant rien réglé au fond. Les risquent de défaillance des emprunteurs américains demeurent, ainsi que les pertes qu’elles entraîneront pour les épargnants du monde entier.
Il va se passer la même chose que lorsque l’indice du Nasdaq a été divisé par deux entre Août 2000 et décembre 2001. Les épargnants qui ont eu foi dans les entreprises technologiques américaines ont perdu de l’argent. Ils ont investi dans du vent, un rêve marqué du sceau de la bannière étoilée, quelque chose de purement virtuel … A l’époque, on pouvait imputer cela à une folie collective qui avait accordé trop de valeur à des entreprises sans chiffre d’affaires.
La crise des subprimes est beaucoup plus claire dans sa signification. Elle aura tout simplement permis de drainer des capitaux vers les Etats-Unis pour alimenter la surconsommation de ce pays. Ici, le problème n’est pas lié à un excès d’enthousiasme dans une nouvelle économie ou de nouvelles technologies. Il ne réside pas davantage, comme notre président semble vouloir le croire, dans un déficit de transparence des marchés financiers ou dans une carence des organismes de notations dans l’appréciation du risque des obligations (1).
Le problème est fondamentalement lié à un excès de confiance des milieux financiers dans l’économie américaine. Pour la première fois, le caractère virtuel de la première économie du monde apparaît au grand jour. Sa richesse n’est assise que sur sa capacité à drainer vers elle les capitaux du monde entier et à faire flamber les indices que cet afflux de capitaux mesure. Au passage, les établissements financiers prélèvent leur dîme pour faire tourner une délirante économie-casino, et la société américaine, obèse et décadente, se charge de dilapider ces fonds dans sa folie de surconsommation.
La crise des subprimes touche le système économique mondial en plein cœur : la confiance dans les l’économie américaine et son système financier. Aujourd’hui, l’enjeu financier est estimé à 300 Milliards de Dollars, ce qui à l’échelle du système financier mondial reste faible. Le volume de la défaillance des ménages américains sera toutefois fortement influencé par le niveau des taux d’intérêt outre atlantique et le cours de l’immobilier.
Toutes les conditions d’une crise systémique sont en vérité réunies. En voici le scénario :
Les financiers perdent peu à peu confiance dans la santé de la première économie du monde. Les Pays asiatiques rechignent de plus en plus à placer leurs excédents commerciaux en bons du trésor américains. Les banques d’affaires n’investissent plus dans les obligations gagées sur des emprunts immobiliers américains. Les flux des capitaux internationaux vers les Etats-Unis commencent donc à se tarir. Le crédit devenant plus rare, la FED est contrainte d’augmenter ses taux, ce qui accélère la chute des valeurs immobilières, augmente le nombre de défaillance des ménages américains et le montant des pertes pour les marchés financiers, ce qui renforce encore leur défiance à l’égard de l’économie américaine.
Cette crise de confiance dans l’économie américaine entraîne un effondrement du dollar, ce qui casse la consommation américaine si dépendante des importations. Les Etats-Unis entrent en récession. La crise se propage alors dans les pays d’Asie qui voient leur principal débouché mondial se fermer. La chine se retrouve dans une situation de surcapacité, ce qui entraîne des faillites. Les fameuses « créances douteuses » se révèlent au grand jour et impactent le secteur bancaire chinois …
Les deux plus grandes économies du monde, si dépendent l’une de l’autre, entrent dans une crise aussi simultanée que profonde. Personne ne peut prédire la suite …
Malakine
(1) je reviendrais prochainement plus en détail sur l’attitude de notre président pendant l’été et notamment sa lettre à Merkel, qui montre soit qu’il n’a rien compris à ce qui se passe, soit qu’il nous prend vraiment pour des cons.
Au sujet des crédits, je crois me souvenir que NS, lors de sa campagne, voulait importer en France ce type de crédit hypothécaire, ou alors j'ai peut être rêvé.
Je ne sais pas si il a encore l'intention de persévérer dans cette voie.
Je crois que NS ne comprend pas grand chose à l'économie, déjà il est juriste et ce n'est pas son emploi du temps éfréné depuis plusieurs décennies qui aura pu lui laisser le loisir de se former. La nomination d'une juriste à Bercy est aussi une drôle d'idée. Je suis toujours étonné de voir que pour le moindre emploi, il est demandé toutes sortes de diplômes et expériences aux postulants, mais qu'au sujet de dirigeants publics ou privés ça ne semble pas avoir d'importance. Il y a quand même un problème de compétences dans tout ça.
Rédigé par : olaf | 17 août 2007 à 13:09
Le Président et sa ministre font preuve d'une parfaite incompétence ce qui n'est pas rassurant, surtout quand on lit dans Marianne que madame Lagarde considère Nicolas Sarkozy comme le plus grand ministre de l'économie des dix dernières années et pire quand on entend ses déclarations, il faudra qu'elle pense plus avant de parler pour ne rien dire.
Rédigé par : GED | 17 août 2007 à 14:55
C. Lagarde a un grand talent, c'est celui de la brosse à reluire et de la finition par jet de salive sur le pauvre cuir qui retrouve ainsi une fierté temporaire.
Là où elle est, comme ailleurs, c'est l'essentiel des courtisans qui réussissent. La courtisanerie est un des plus vieux métiers du monde et il se porte à merveille. Une valeur sûre que j'vous dis.
Rédigé par : olaf | 17 août 2007 à 15:16
La Bourse de Paris a brusquement bondi en début d'après-midi alors que la Fed a pris les marchés par surprise en abaissant d'un demi-point son taux d'escompte, un de ses taux directeurs.
Le CAC 40, qui progressait de 0,5% environ avant cette annonce intervenue à 14h15, gagne 2,54% à 5.399,31 points vers 14h30.
La Fed a abaissé à 5,75% son taux d'escompte tout en laissant son principal taux directeur, le taux des Fed Funds, inchangé à 5,25%. Le taux d'escompte régit les prêts accordés par la banque centrale aux banques commerciales. Les autorités monétaires, qui ont souligné le caractère temporaire de cette baisse, ont en effet estimé que les risques baissiers pour la croissance ont sensiblement augmenté en raison de la crise financière. (Reuters)
Rédigé par : Ozenfant | 17 août 2007 à 15:22
Trés bon texte Malakine je mettrais ma petite touche personnelle quand j'aurais le temps.
Sur le rebond d'aujourd'hui il faut dire que certain attendaient un rebond technique, mais il est incroyable de voir la stupidité moutonnière des agents de la bourse. La baisse des taux de la FED est extrèmement riqué étant donné les risques liés au carry trad avec le Yen. En baissant ses taux la FED risque de renforcer la fuite vers l'euro et le Yen provoquant une véritable catastrophe pour le dollars. Entre la peste et le colérat la FED a choisi le colérat de la dévaluation monnétaire. Certes les marchés d'actions sont remontés mais si le dollars sombre face à l'euro en plus de son fort recule face au Yen, ce n'est pas des petits recules que nous auront prochainement mais un effondrement pure et simple de la devise américaine. La Chine va-t-elle accepter la dévaluation de ses réserves exprimer en dollars? Et il n'y a pas que la Chine presque tout les pays du monde ont d'énorme réserves en dollars comment vont-ils réagir en voyant la FED baisser ses taux alors les USA ont déjà un problème de surendettement et un risque d'inflation rampante, on verra. Tout ceci n'est peut-être qu'un aléas suplémentaire dans la gestion de l'empire.
Rédigé par : yann | 17 août 2007 à 20:41
Dedefensa et la crise systémique:
http://www.dedefensa.org/article.php?art_id=4330
Un trés bon texte qui aborde la crise économique sous un angle plutôt original comme à leur habitude.
Rédigé par : yann | 17 août 2007 à 21:00
Terrible ce site dedefensa. Je sais pas qui écrit là dedans.
L'article en question dit en résumé : multicrise => out of control => trouille => clivages des consciences, à suivre...
Rédigé par : olaf | 18 août 2007 à 01:27
Yann,
je suis fan de De.Defensa.org... domage que leur "système" de blog soir si rébarbatif pour communiquer avec eux.
Boréale,
Voilà ce que j'ai retenu cette fois-çi:
"La chute de la République Romaine est due à de nombreuses raisons, mais trois d’entre elles valent la peine que l’on s’en souviennent: Déclin des valeurs morales et politiques de la cité, excès de confiance et excès de dispersion des forces militaires de conquêtes et irresponsabilité fiscale du gouvernement central. Ça vous semble familier ? De mon point de vue, il est temps d’apprendre les leçons de l’histoire et de prendre les mesures pour s’assure que la République Américaine soit la première à faire face au test de l’histoire."
David Walker (US Comptroller General).
Rédigé par : Ozenfant | 18 août 2007 à 15:48
Sarkozy est très compétent en économie, tout comme Lagarde.
Mais son savoir n'est pas mis au service du bien commun, c'est tout. Il est au service d'une caste qui l'a porté où il est et qui entend bien en toucher les dividendes
Rédigé par : Benjamin | 18 août 2007 à 22:58
Ah bon ! C'est aussi simple que ça alors.
Rédigé par : olaf | 18 août 2007 à 23:04
@Benjamin
Je sais que c'est dur à croire mais les élites dirigeantes ne sont pas forcement compétentes autrement il n'y aurait jamais de crise ou de catastrophe. En disant que Sarkozy défend une catégorie sociale je crois que vous vous trompez, vous raisonnez en marxiste exessif là. Le seul intéret qui compte pour notre président c'est le sien, son image, son égo, pour rester au pourvoir il a plus besoin du soutient de la population que celui des quelques grandes familles qui le soutienne. Si l'on pense ainsi on ne peut en déduire qu'une chose les décisions de Sarko sont plus le fruit de croyance (celle en vogue effectivement dans les hautes sphère de notre civilisation) que l'action dans un intérets purement de classe. A mon avis les marxistes se trompent sur notre temps et surestiment en général la qualité intellectuelle et les motivations réelles des individus de pouvoir. Sarko croit simplement à ce qu'il dit, il pense vraiment que les riches sont plus intelligents, plus brillants et qu'accroitre leurs "libertés" au dépend du reste de la population permet d'accroitre le bien être général accroché au mythe libérale (et marxiste) de la croissance.
Nous avons affaire à des croyances de type religieuses, des mythes, des phénomènes de foules et folies collectives qui pour l'instant n'ont pas fait de camps de concentration (enfin sauf dans certain pays du moyen orient). Saint Smith, Saint Ricardo et Saint Hayek sont les nouveaux guides de l'humanités leurs écrit sont infaillibles puisque tout le monde le dit.... La bourse apporte la prospérité puisque c'est en terre sainte Anglo-saxonne qu'elle est nait.
Rédigé par : yann | 18 août 2007 à 23:36
@Yann,
Je suis bien d'accord avec ce que vous dîtes, mais aussi avec Benjamin quand il dit:
"Il est au service d'une caste qui l'a porté où il est et qui entend bien en toucher les dividendes"
Par contre cette assertion là:
"Sarkozy est très compétent en économie, tout comme Lagarde. Mais son savoir n'est pas mis au service du bien commun, c'est tout." est pour le moins osée !
Enfin l'opinion de Benjamin a le mérite d'être claire et courte... ce qui satisfait l'admirateur de Boileau en moi.
Rédigé par : Ozenfant | 19 août 2007 à 09:07
Pour prendre une image simplette, il semblerait que le serpent se morde la queue... Est-ce vraiment surprenant ? Le système économique mondial est fondé sur le paradoxe, le plus grand d'entre eux étant sans doute que la production n'est pas fonction du besoin mais du profit. J'ai l'impression qu'il s'agit là d'un noeud central à beaucoup de problèmes.
Un autre point intéressant est que la richesse actuelle se construit en lien avec le crédit. Naïvement, on pourrait au contraire penser que la richesse c'est une valeur - ses crédits. Mais dans ce cas, les Etats-Unis seraient pauvres. Le système économique est allé tellement loin dans sa contradiction qu'il permet à un pays d'être riche vituellement mais pauvre effectivement. Mieux, il permet à un pays pauvre effectivement de devenir riche matériellement en fonction de la richesse vituelle qu'il possède. Mais qu'on se le dise : le virtuel ne résiste jamais longtemps aux faits. C'est, je crois, ce que l'empire américain découvre.
Rédigé par : Nunavut | 19 août 2007 à 11:03
Nous sommes toujours, contrairement à ce qui est dit concernant le passage du XIX éme au XXéme siècle, dans une économie de l'offre et pas de la demande, en particulier celle des démunis.
L'offre actuelle s'adresse aux solvables et de plus en plus aux solvables virtuels et symboliques( capital de signes sociaux selon Bourdieu ), ce que n'ont pas les défavorisés. Le capitalisme actuel dans sa grande générosité utopiste a voulu étendre sa virtualité aux ménages moyens à pauvres mais en leur faisant payer la note de ses erreurs.
Rédigé par : olaf | 19 août 2007 à 13:09
Vivement un prochain article sur l'économie française, ce ne serait pas superflu pour un inculte de mon calibre qui regrette toujours, presque vingt ans après, de n'avoir eu que des profs d'éco qui renvoyaient la matière au même niveau d'intérêt que l'étude de la composition chimique des déjections de bigornau. :)
Rédigé par : Poliblog | 19 août 2007 à 14:28
Je ne dis rien pour ne pas, pour cette fois-ci, faire partie des éternels contradicteurs compulsifs, chers à Devos, car:
"Qui prête à rire, n'est pas sûr d'être remboursé."
Mais je n'en pense pas moins... et sourît, en attendant les réponses de Malakine !
Rédigé par : Ozenfant | 19 août 2007 à 17:17
@ Yann
Il me semble que tu dis exactemement la même chose que Benjamin. ce que tu appelles l'idéologie en vigueur dans les hautes sphères n'est-ce pas tout simplement la même chose que les intérêts des puissants ? Oui, il y a de l'idéologie mais on a jamais vu une idéologie produite par une classe sociale qui n'allait pas dans son intérêt.
@ Poliblog (Pascal)
Je vais essayer de faire quelque chose bientôt sur la situation économique de la France. Mais il ne faut pas croire que je sois économiste. A la base je suis juriste, ce qui risque de décevoir Olaf. je n'ai jamais eu un seul cours d'économie de ma vie ! Mais bon ... A force de s'intéresser aux problème auquel on ne comprends rien, on finit par saisir deux trois trucs.
Sinon, je signale l'excellent dossier fait par Marianne cette semaine sur la crise des subprimes. Vraiment cet hebdo depuis quelques mois se surpasse chaque semaine !
Assez curieusement, le point de vue de Marianne n'est pas de souligner les limites de l'économies US, mais de stigmatiser les délires de la finance moderne, un peu d'ailleurs comme notre président.
Il semble bien après lecture, que les nouvelles pratiques de la finances ne soient pas pour rien dans l'affaire. Ce délire de vouloir toujours plus de rendement pour le capital a conduit les banques à ranconner les ménages les plus pauvres et à leur faire payer des intérêts prohibitifs. Forcément ça pouvait pas durer ! De plus, ce mécanisme de la titrisation est en lui même quelque chose d'affolant dans la mesure où il dissous totalement le lien entre celui qui emprunte et celui qui prête.
La finance moderne pose un vrai problème. Cet été j'ai été très marqué par les interviews de Frédérique Lordon que l'on peut écouter sur le site "des Sous et des Hommes" Je conseille et (encore une fois, merci Yann de m'avoir fait découvrir ce site). Sa thèse en la schématisant est que la finance moderne est une espèce de Diable dont la puissance est aujourd'hui sans limite. Rien n'arrête plus sa domination.
On savait déjà que la tyrannie des fonds d'investissements - qui réclament toujours plus de rendement pour les actionnaires - finissait par se retourner contre la logique du capitalisme industriel classique (en comprimant les salaires donc la demande et en limitant les investissements) On découvre aujourd'hui avec cette affaire des subrimes que la banque est elle même devenu folle.
Dans un schéma classique, c'est aux banques qu'il revient de s'assurer de la viabilité d'un investissement pour que la création de monnaie qui est la conséquence d'un crédit de long terme corresponde bien à une création de richesse future. Si une banque peut se défausser de sa responsabilité de prêteur sur des marchés financiers anonymes et apatrides et se démerder pour empocher des commission sans encourrir le moindre risque, le système est vraiment devenu fou.
Malheureusement la question de la régulation du capitalisme financier est toujours sans réponse. Sarko en parle mais je doute qu'il ait la moindre idée de comment faire pour revenir à un système capitaliste beaucoup plus raisonnable.
Heureusement, reste le PS ... Je suis vraiment très impatient d'entendre ce que les barons du socialisme, et en particulier leur ancienne candidate, auront à dire lors de leur prochaine université sur la crise des subprimes ... LOL
Rédigé par : Malakine | 19 août 2007 à 17:35
Malakine,
Tu dis:
"On savait déjà que la tyrannie des fonds d'investissements - qui réclament toujours plus de rendement pour les actionnaires - finissait par se retourner contre la logique du capitalisme industriel classique (en comprimant les salaires donc la demande et en limitant les investissements) On découvre aujourd'hui avec cette affaire des subrimes que la banque est elle même devenu folle."
Tu semble soutenir la thèse qu'il y aurait encore des gens qui ne s'en seraient pas encore apperçus ?
Rédigé par : Ozenfant | 19 août 2007 à 18:16
Malakine,
Ne pas avoir suivi des cours d'économie n'empêche pas de s'informer et d'y réfléchir. Bien des théoriciens de l'économie n'étaient pas initialement diplômés en économie. Mais une formation d'économiste n'est pas obligatoirement un handicap. Ce que j'ai dit dans un commentaire précédent, c'est que ni NS ni C. Lagarde, à mon avis, ne s'étaient donné du temps et du recul pour méditer sur l'économie, ce qui comme tout sujet important ne se fait pas en appuyant sur un bouton, ça demande du temps.
Défendre les intérêts de sa classe sociale n'est pas une garantie de compétence économique, mais plutôt l'inverse, sauf à avoir une conception réductrice de l'économie. Pour favoriser sa clique, quelques talents de financier ou de gestionnaire de patrimoine suffisent mais l'économie est un domaine, j'ose l'envisager, plus vaste qui est de l'ordre de la politique.
Concernant la crise immobilière US, il est évident que des prêts abusifs ont été accordés par des banques qui n’ont respecté aucune règles de garantie. Il serait justifié que ces banques ou du moins leurs dirigeants soient impliqués dans la responsabilité de leur gestion. Que le feed back pénalise leur inconséquence, à eux d'estimer le risque prenable et d'assumer les conséquences de leurs égarements.
Rédigé par : olaf | 19 août 2007 à 18:27
D'accord avec tous. J'aurais volontiers cité le même passage excellent de Malakine que Gilbert reprend déjà plus haut, car il résume à lui seul ce dont je n'ose même pas m'émouvoir en public depuis de nombreuses années, attendu que tout le monde semble se moquer de savoir si le fonctionnement actuel de l'économie spéculative conduit l'ensemble des pays développés droit dans le mur ou pas...
Mon meilleur prof d'éco, pour revenir brièvement sur le sujet, n'était pas un prof d'éco mais un ancien banquier (issu d'un grand groupe) qui avait tout abandonné par dégoût et s'était reconverti ensuite dans l'enseignement, dans le développement commercial pour être précis.
En cours, à partir d'un cas de figure concret, il lui arrivait de faire des parallèles avec des situations vécues dans son ancien métier. Sur la banque, il nous disait grosso modo qu'il fallait éviter de se raconter des histoires pour ne pas être déçus, que les banquiers sont à 100% (et non pas 99%) des fumiers et des ordures dont le seul objectif, quelle que soit l'action que l'on envisage (il citait des exemples en veux-tu en voilà), était de ponctionner un maximum de pognon à leurs clients, que ce soient des entreprises ou des particuliers tirant la langue à chaque fin de mois.
Il avait une manière assez incroyable de nous parler des mentalités, des pratiques ordinaires dans lemétier, des raisonnements de tordus qui font que quand on examine de près le discours d'un banquier faisant une nouvelle proposition, on peut toujours arriver à trouver le détail, souvent bien caché, qui est en fait au coeur de l'ensemble du raisonnement.
Quelques idées répandues partout chez des banquiers qui ne diffèrent des traders que par leur appellation ? "Le pognon, le pognon, le pognon". "Mieux vaut un client riche que dix clients pauvres, cela représente moins de boulot pour le saigner". Ou dans le même ordre d'idées, "un client pauvre est un client qui n'a pas d'autre intérêt que celui-ci de pouvoir être plus rapidement saigné à blanc", etc.
Assez hallucinant. Je ne m'en suis pas encore remis.
Rédigé par : Poliblog | 21 août 2007 à 11:46
Bonjour poliblog, je rigole bien sur votre blog, c'est un peu les guignols de l'info en blog, donc je ne me prive d'y aller pouffer.
Continuez...
Quant aux banquiers, c'est vrai que j'imagine en étrangler quelques uns, service au client quasi nul facturé un maximum, font jamais ce qu'on leur demande de faire, faut toujours vérifier qu'ils l'ont fait et les engueuler parce qu'ils ont rien fait tout ça pour des benefs max dans leur poche. Par contre le moindre problème et ils vous mettent à la Bastille.
Des enfoirés puissance max. Des fils de je sais pas quoi, ça doit pas exister des mères de gens pareils.
Rédigé par : olaf | 22 août 2007 à 00:21
Bonjour Malakine,
Je suis un lecteur régulier de ton blog et donc un grand merci pour cette tentative d’explication de la crise su Subprime. Toutes les précisions que tu apportes avec Gizmo, Laurent Guerby, Olivier Bouba Olaga et quelques autres sur cette crise.
Ce qui est agréable dans ton billet est la mise en perspective de cette crise sur fond de déséquilibres financiers structurels. Pour autant, je te trouve bien pessimiste. Je ne crois pas que cette crise va vraiment dégénérer. C’est un phénomène normal et récurrent, cela ne veut pas dire qu’il ne faut rien faire pour que cela ne se reproduise plus.
J’ai moi-même rédigé deux premiers billets, en attendant d’en proposer d’autres sur cette question, en m’appuyant ce tout ce que j’ai pu lire mais en adoptant un autre point de vue pour éviter les redondances, ici :
Crise financière, crise du "subprime"
De la crise financière,… à la crise réelle ?
J’ai aussi présenté rapidement ton billet qui me semble intéressant pour les raisons évoquées plus haut
Voilà, à bientôt,
Bien cordialement,
David Mourey
Démocratie Economie et Société
http://democratieetavenir.over-blog.com/
Rédigé par : David MOUREY | 25 août 2007 à 14:16