En France, beaucoup d’indicateurs sont au rouge. Il y en a un en revanche qui est au vert, c’est celui de la démographie. Et même de plus en plus vert, au point de faire de la France, la championne d’Europe toutes catégories. Voilà une nouvelle qui nous donne une occasion rare d’être fier d’être français.
Notre excellente démographie ne suffira pas à elle seule à régler le problème des retraites ou de la croissance, mais elle peut nous réconforter sur la viabilité de notre modèle social, sur la pertinence de nos valeurs et nous rassurer sur le dynamisme de la société française.
Comment cela est possible ce pays, que l’on dépeint régulièrement comme déprimé, frileux et angoissé par l’avenir, peut-il atteindre de tels résultats ?
Le bilan démographique 2006 que vient de publier l’Insee aujourd’hui fait apparaître plusieurs records. Un taux de fécondité qui vient pour la première fois de passer le seuil de renouvellement des générations avec deux enfants par femme, ce qui nous place en première place en Europe, devant même la très catholique Irlande, une espérance de vie parmi les plus élevée d’Europe et un taux de mortalité infantile parmi les plus bas.
Contrairement à ce que certains esprits chagrins affirment, cette démographie soutenue ne doit pas grand-chose à l’immigration. Les enfants nés de femmes étrangères ne représentant que 12 % des naissances. Les chiffres génération le taux de fécondité des femmes d’origine étrangère s’aligne sur celui des françaises (1) que la fécondité dans leur pays d’origine soit supérieure ou inférieure à celle de la France.
Ces chiffres montrent au contraire l’exceptionnel dynamisme de la société française. L’angoisse face à l’avenir est d’ailleurs intimement liée au « désir d’avenir ». Une société qui est profondément abattue et déprimée ne fait plus d’enfants et c’est bien parce que nous faisons encore des enfants que nous nous inquiétons pour leur avenir et du devenir du monde dans lequel ils grandiront !
Ils montrent également que notre modèle social fonctionne encore et n’est pas prêt à être jeté aux orties. Ces chiffres ne seraient pas possibles sans un système de santé performant, des modes de garde d’enfants variés et organisés par des services publics efficaces, des politiques natalistes ambitieuses menées avec constance depuis des décennies. Ils ne seraient pas non plus possibles dans une société duale qui comporteraient une importante et extrême pauvreté.
Mais plus encore que la qualité de notre modèle social, la performance française en matière de démographie est liée aux spécificités de notre système de valeurs libéral-égalitaire.
Contrairement aux pays de famille souche (monde germanique dominé par des valeurs inégalitaires) ou dans les pays encore très catholiques, le système de valeurs françaises permet aux femmes de concilier vie professionnelle et vie familiale. Il l’y encourage même en faisant de l’emploi des femmes un des objectifs constants de toutes les politiques publiques. En Allemagne ou en Italie, pour des raisons différentes, une femme qui travaille est perçue comme une mauvaise mère. Pour faire carrière, elle renonce souvent à avoir des enfants. En France, ce serait plutôt les femmes au foyers ou les femmes sans enfants qui seraient montrées du doigt.
Cependant, nos bons résultats dans une Europe en plein déclin démographique où le taux de fécondité moyen est de 1,5, et de 1,3 dans les grands pays (Allemagne, Espagne Italie) ne vont pas sans engendrer quelques tensions. Nous avons chaque année beaucoup plus d’emplois à créer chaque année pour occuper un nombre plus important de jeunes qui arrivent sur le marché du travail. Nous avons donc besoin d’une politique économique beaucoup plus dynamique que nos voisins pour arriver au même taux d’emploi. L’importance du chômage des jeunes en France vient aussi du fait que nous avons plus de jeunes.
L’Allemagne a abandonné le droit du sang et s’est alignée sur le droit du sol pour mieux assimiler ses étrangers. Elle vient de copier les politiques familiales et natalistes françaises. Bientôt, elle s’alignera peut-être sur sa conception de la croissance par l’accroissement de la demande interne et abandonnera sa conception de la croissance par les exportations … Espérons.
Et si en Europe, finalement, le modèle à suivre était le modèle français ?
(1) Selon des études démographiques cités par Hakim El Karoui, la fécondité des femmes africaines en France est de 2.86 alors qu’elle est de 5.90 dans leur pays d’origine. Le phénomène se retrouve pour presque tous les pays 2.57 contre 3.64 pour les femmes algériennes, 2.97 contre 3.28 pour les Marocaines. Globalement la surfécondité des immigrés ne pèse que très peu sur les chiffres. Sur la période 91-98, le nombre d’enfants par femme était de 1.72 en France et de 1.65 pour les seules natives
Le seuil de reproduction n'est pas de deux enfant par femme, mais de 2.05 en france (compte tenue de la mortalité infantile). Ce n'est pas deux parce qu'il nait 105 garçon pour 100 fille en moyenne nationale, pourquoi je n'en sais rien mais c'est ainsi.
Donc nous ne sommes pas encore au seuil du remplacement de 1 pour 1 à chaque génération, mais effectivement on s'en approche et trés bon signe pour l'avenir de ce pays (il n'y a de richesse que d'homme).
Rédigé par : Yann | 17 janvier 2007 à 09:31
"L’exception démographique française"
Je ne me souviens pas parfaitement de mes cours de Démographie en fac, mais la France a toujours (= depuis l'ancien régime) connu un régime démographique atypique.
Par exemple, notre pays a été celui qui a démarré le plus tôt sa transition démographique et celui ou cette transition a été de la plus courte durée.
Je ne sais pas ce qu'en disent les démographes, mais avant de parler conséquences, je ne suis pas sur que les causes soient bien identifiées.
Rédigé par : xsteph | 17 janvier 2007 à 14:12
Tous ces commentaires me semblent bien optimistes.
Concernant l'histoire démographique de la France, ce pays a commencé sa transition démographique plus tardivement que le royaume uni. Il est faux de dire que le rythme de celle ci a été plus rapide que ds d'autres pays, il était ds la moyenne de l'Europe de l'ouest.
La nature fait tjs un peu plus de garçons, ceux ci sont moins endurants, moins résistants, leur espérance de vie est plus courte.
Ils ont aussi un instinct de conservation moins développé et sont par exemple plus sujet aux comportements à risques (regardez donc un lycéen sur un scooter et comparez avec les lycéennes), la nature compense, elle fait bien les choses.
De forts taux de fécondité sont ils un signe positif? On peut en douter car ce signe est souvent symptomatique d'une certaine pauvreté et ce à tous les pts de vue (intellectuel, culturel, professionnelle), une femme ayant réalisé des études longues, travaillant ds une profession intellectuelle, gagnant bien sa vie avec un niveau de consommation culturelle élevé a en moyenne moins d'enfants qu'une ouvrière peu qualifiée, mal rénumérée et avec un horizon culturel limité a voici et tf1.
Je pose donc la question de savoir si pour un pays comme la France le signe d'une forte fécondité est si positif, ou si au contraire il ne traduit pas une paupérisation multi facettes de la population française?
Les différences de taux de fécondité entre les "différentes composantes ethniques" peuvent aussi poser la question de l'assimilation de population jeunes d'origines immigrées ds un pays ou la population de souche vieillie et donc a tendance à se crisper... Est ce pour l'assimilation une donnée favorable?
Si l'on met cela en perspective avec l'excellent article de Malakine sur les banlieux un an après, il y a je crois matière à réflexion.
Le débat reste ouvert.
Rédigé par : chavinier | 17 janvier 2007 à 20:16
@chavinier
Non on ne peut pas faire de parrallèle entre pauvreté et fécondité. La fécondité est très basse dans les pays de l'est, et en particulier en russie.En revanche, sil'on veut donner une interprétation pessimiste de notre bonne fécondité, il faudrait le rechercher du coté du rapport au travail. Face à un monde économique de plus en plus dur et angoissant, les français se replient sur leur sphère privée.
Après tout peu importe les causes. Ce qui est intéressant en l'espèce, c'est plutôt les conséquences. Plus un peuple fait d'enfants, plus il est exigeant sur l'avenir. C'est plutôt encourageant.
@xsteph
En effet. La France a toujours été en avance sur les processus démographiques. Selon Todd, cela est du à son système libéral égalitaire qui favorise le processus d'individuation. La France a été la première nation à connaitre sa transition démographique, et elle serait maintenant la première à entrer dans un nouveau stade, en train d'essayer corriger le tir. Cela fait dire à El Karoui que la France est entrée dans une crise de la post modernité où l'individualisation extrême devient source d'angoisse.
En tout état de cause, le taux de fécondité est un indicateur extrêmement important pour mesurer l'évolution des sociétés. Le fait que ce taux remonte en France est signe de quelque chose d'important.On ne sait pas encore bien l'analyser, mais il se passe quelque chose de très intéressant dans l'inconscient collectif du pays en ce moment ...
Rédigé par : Malakine | 19 janvier 2007 à 07:29
@ Malakine.
Est-on sûr que la remontée du taux de natalité n'est pas due aux naissances retardées, celles des femmes qui font des enfants très tard?
Rédigé par : Didier Bous | 14 décembre 2008 à 19:46