Il y a 15 ans aujourd’hui disparaissait l’Union soviétique . Contrairement à ce qu’on se plaît à croire en occident, la fin de l’URSS ne doit rien à un soulèvement populaire, à une crise économique, où même à l’action diplomatique du Pape ! Elle est seulement la conséquence de l'incapacité du système soviétique à se réformer tout en conservant son unité.
La fin de l’URSS a été une catastrophe géopolitique, tant pour les populations concernées que pour l’équilibre du monde. Aujourd’hui son absence sur la scène internationale fait encore cruellement défaut. Elle n’a été remplacée par aucune puissance pouvant faire contrepoids à l’empire américain, si ce n’est la Chine, dont l’émergence est encore plus lourd de menaces pour le monde.
Il convient de rappeler en préambule le fil des évènements. En 1985, Mikhaïl Gorbatchev, nommé au poste de secrétaire général du PCUS initie un programme de réformes libérales, glasnost et perestroïka. En mai 1990, Boris Ieltsine est nommé président du soviet suprême de la République soviétique Fédérale de Russie, dont il proclame la souveraineté un an plus tard. Il s'en fait élire président au suffrage universel en Juin 1991 en même temps qu’il démissionne du parti communiste. En Août 1991, les forces conservatrices du PC tentent un coup d’Etat en isolant Gorbatchev, alors en vacances en Crimée. Le putsch échoue suites à des manifestations populaires auxquelles se rallient les forces militaires. Ieltsine, qui a joué un rôle important dans l’insurrection en sort renforcé. Commence l’éclatement progressif de l’URSS, qui se solde par son acte de décès le 8 décembre 1991 par le traité de Minsk signé entre la Russie, l’Ukraine et la Biélorussie.
Ce bref rappel historique montre le système ne s’est pas effondré par la contestation. Au contraire. Les manifestations populaires d’août 1991 visaient à défendre le système contre le retour en arrière incarné par le coup d’Etat. De plus, à l’exception des pays baltes, les mouvements nationalistes qui ont entraîné l’éclatement de l’URSS n’avaient pour l’essentiel rien de réformateurs. Les déclarations d’indépendance avaient surtout pour objet d'assurer la pérennité des nomenklatura en place, face à un mouvement réformateur qui venait du cœur de l’empire. Il a fallu attendre 2003 pour voir sortir la Géorgie du soviétisme et 2004 pour l’Ukraine, les autres républiques ayant toujours à leur tête les mêmes dirigeants qui gouvernaient le pays du temps de l’URSS.
L’effondrement de l’union soviétique s’est fait au prix d’un chaos, dont l’occident n’a jamais pris conscience de l’ampleur : chute du PIB de 50 %, évasion de capitaux d’un montant minimum de 150 Milliards de Dollars en 10 ans … Ieltsine, qui apparaissait en occident comme un gentil démocrate a mis en place un régime odieux, de nature « kleptocratique », qui a soigneusement organisé la ruine de l’économie et l’appropriation par des mafieux des actifs du pays. Ce pillage organisé s’est d’ailleurs fait avec l’aide et la complicité conscience des institutions internationales (1), bien heureux de mettre définitivement à genoux l’ancien rival. Du moins le croyaient-ils.
L’Economie russe a commencé à se révéler avec l’accession de Poutine au pouvoir en 1998 et la hausse du prix des matières premières, mais la situation des républiques non pétrolières reste très difficile, que ce soit sur le plan économique ou des libertés. Quand elles ne sont pas dirigées par des dictatures démentes comme au Turkménistan !
La disparition de l’Union soviétique a été un profond facteur de déstabilisation pour l’équilibre du monde. Jusque là, elle offrait un contre poids à l’hégémonie américaine, sur le plan militaire mais surtout sur le plan idéologique en proposant un modèle alternatif. L’existence même du communisme suffisait à tempérer la dynamique inégalitaire du capitalisme. Sa disparition a ouvert la voie à l’hypercapitalisme et à la mondialisation libérale. Les Etats-Unis devenaient le seul et unique modèle, la seule voie à suivre pour tous les peuples. L’ensemble de la planète est entré comme un seul homme, dans un système mondial dominé par les Etats-Unis, avec les conséquences que l’on commence à mesurer.
D’un monde bipolaire, on est brutalement passé à un monde unifié doté d’un seul centre. Cela a profondément modifié la nature même des USA. De chef de file du monde libre, qui avait la responsabilité de soutenir les démocraties pour éviter qu’elles ne basculent, il est devenu un empire prédateur qui s’est mis à consommer plus que de raison et à financer son développement avec la planche à billets. Ce cœur qui draine aujourd’hui vers lui 80 % de l’épargne mondiale et qui emprunte près de 2 milliards de dollars par jour pour financer son train de vie, avait besoin de trouver une nouvelle légitimité. Il lui fallait se trouver un nouvel ennemi, au besoin l’inventer. Les « attentats » du 11 septembre 2001, qu’il a habilement instrumentalisé, sinon orchestré lui-même (2), lui en ont, fort opportunément, offert un : le terrorisme islamique. Un nouvel « axe du mal » est venu remplacer l’ancien « empire du mal » défunt.
25 ans après sa disparition, aucune puissance n’est toujours en mesure de venir équilibrer l’hyperpuissance de plus en plus inquiétante des Etats-Unis. Sûrement pas la Chine, dont le modèle de développement fondé sur les exportations et non sur le développement endogène la conduit à financer les déficits américains pour s’assurer des débouchés commerciaux, confortant ainsi le rôle de centralité des USA. Pour un temps. Jusqu’au jour où la Chine aura atteint un niveau de développement technologique suffisant, et décidera de mettre à genoux les USA en vendant leurs réserves de change en dollars (évaluées aujourd’hui à 900 Milliards) pour prendre leur place en tant que maître du monde.
Le monde a rapidement besoin d’une nouvelle URSS pour rééquilibrer le système géopolitique et assainir le fonctionnement de l’économie mondiale. Cette nouvelle puissance ne pourra être qu’européenne, ou plus exactement eurasiatique, car l’Europe ne pourra jamais s’ériger en superpuissance sans les Russes (3). Il ne s’agira pas de dominer le monde autrement que par le rayonnement de nos valeurs. Les Européens on trop souffert de l’impérialisme pour endosser à leur tour ce rôle. Cette nouvelle URSS, que je qualifierais pour les besoins de la cause, d’Union des Républiques Sociales d’Europe (URSE) assurera l’émergence d’une organisation du monde polycentrique, fondée sur les principes d’égalité et de coopération, où chaque grand ensemble régional trouvera en lui-même les moyens de son développement, selon son propre modèle et sa propre culture.
(1) voir « La grande désillusion» de Joseph Stiglitz dans le chapitre consacré à la crise Russe où il décrit la complicité du FMI et de la banque mondiale, dont il était à l’époque le vice-président, dans l’évasion de capitaux et sa responsabilité dans la crise financière de 1998 qui a abouti à la volatilisation de l’épargne de tout un peuple.
(2) Je fais ici clairement allusion aux théories conspirationistes qui rendent responsable le système militaro-industriel de l’organisation des attentats du 11 septembre, opérant ainsi une forme de coup d’Etat. Sans pour autant les reprendre à mon compte avec certitude, un doute subsistera tant que n’auront pas été levées toutes les zones d’ombre de cette affaire. L’hypothèse cadre en tout cas très bien avec la lecture proposée ici de l’empire américain de plus en plus dépendant du monde et désormais délégitimé par l’absence d’ennemi. Le mieux est de permettre à chacun de se faire son propre point de vue en consultant les documentaires accessibles sur internet.
(3) – Cette question importante fera l’objet de développements ultérieurs lorsque l’actualité en fournira l’occasion.
2006 - 1991 = 15 !
Rédigé par : Playtime | 09 décembre 2006 à 13:24
A un moment il est écrit 25 au lieu de 15 dans votre article je crois.
Articles très intéressant, j'avais déjà une vision similaire des choses concernant "le nouvel ennemi", le libéralisme, la [geo]-politique américaine, etc.
Voir mon modeste article sur Agoravox :
"A la recherche d'un nouvel ennemi" :
http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=4993
Concernant le dollar, la politique monétaire des USA, je vous conseille vivement de lire cet article :
http://etienne.chouard.free.fr/Europe/Escroquerie_Monetaire_Mondiale.htm
Concernant la planche à billet, elle tourne, elle tourne... voir l'indice M3 qui évalue la masse de dollar circulant dans le monde et qui n'est plus publié depuis mars 2006 par la Fed:
http://fr.wikipedia.org/wiki/Masse_mon%C3%A9taire
Enfin concernant, la "théorie du complot", je vous conseille vivement de visionner le dernier documentaire que nous avons mis en ligne (sous-titré fr) sur reopen911.info : "9/11 Mysteries" qui montre clairement comment les tours ont été dynamité (ce film centré sur le WTC est bp plus probant, clair et précis que Loose Change 2).
Rédigé par : Sylvio | 11 décembre 2006 à 11:51
Je vous laisse la nostalgie de cette période sinistre, de ce XXe siècle tragique pour la Russie et les Russes. La Russie d'aujourd'hui est toujours une grande puissance, un pays qui compte. Le bordel, le chaos, ce n'est pas seulement l'oeuvre de ces dernières années. C'est aussi ce lourd héritage. Cette URSS de malheur, catastrophe économique et humaine, qui ne peut pas disparaître comme ça, en quelques années. On le voit dans la vie de tous les jours là-bas, dans les mentalités souvent.
Rédigé par : Lizotchka | 26 novembre 2009 à 19:44