Il semble bien que le mouvement contre la réforme des retraites soit en train de prendre une toute autre dimension : préavis de grèves illimitées, blocage des raffineries, opérations des chauffeurs routiers, lycéens dans la rue, sondage favorable la grève générale... On semble bien parti pour revivre un mouvement équivalent à celui de décembre 1995.
Face à ce énième avatar du « mouvement social » typiquement français, le corps politique retrouve aussitôt ses marques autour du bon vieux clivage gauche-droite. Pour les uns il ne s’agit que d’un folklore gauchiste qui fait honte à la France, un rite initiatique pour jeunesse décérébrée, une réaction irresponsable face à une réforme commandée par les nécessités de la modernité économique. Pour les autres c’est une lutte admirable d’un peuple prêt à se battre pour défendre ses droits sociaux, une révolte contre l’injustice, un combat pour lequel il faut aller jusqu’au bout et de ne rien lâcher. Chacun pourra adopter la posture qui lui conviendra le mieux.
Mais plus encore que pour n’importe quel mouvement social, la question qui me semble devoir être posée est de savoir si la réforme contestée justifie vraiment cette agitation. Et si le mouvement est vraiment dirigée contre elle, ou si quelque chose de plus profond n’est pas en train de se jouer.
Lorsque j’ai regardé pour la première fois le projet de réforme des retraites, j’ai surtout été frappé par la faiblesse de son ambition dans la mesure où elle ne vise en réalité aucun retour à l’équilibre, même pas temporaire. Je me suis dit qu’on avait probablement sous les yeux la réforme minimale que n’importe quel gouvernement se devait de prendre pour donner des gages aux marchés financiers et ainsi conserver notre précieuse note AAA. Ma toute première réaction a donc été de me dire qu’on avait échappé au pire et que cette réforme ne méritait pas qu’on s’excite sur elle au-delà du raisonnable.
Puis après mon premier article où j’entendais dénoncer la fumisterie des mesures d’âge, la réforme m’est de plus en plus apparue comme une agression inouïe et injustifiée du corps social dirigée en particulier contre la génération des enfants du baby boom. Si je résume, la réforme privilégie le recul des droits sociaux sur la mobilisation de ressources nouvelles. Elle fait porter l’effort sur les générations post-baby boom, épargnant totalement les actuels retraités et les séniors encore en activité. Se faisant, elle planifie sur plusieurs décennies une régression progressive et méthodique des droits sociaux et du niveau de vie. Elle présente cette évolution comme un fait naturel, contre lequel toute révolte relèverait du déni de réalité le plus irresponsable.
Là se situe la charge symbolique de cette réforme.
Pour le gouvernement, l’enjeu est bien de se montrer capable de violenter le peuple de la manière la plus visible possible et ainsi donner des gages à l’oligarchie mondialisée pour qui l’austérité généralisée et la régression sociale constituent la condition pour continuer à s’enrichir dans un contexte global de stagnation économique. C’est d’ailleurs pourquoi le gouvernement se réjouit si bruyamment (jusqu’ici) de l’ampleur des manifestations au motif qu’on mesure l’ardeur d’une réforme à l’ampleur des mobilisations qu’elle suscite… Le Peuple est choqué, scandalisé. Il se sent trahi et martyrisé. Bravo Messieurs, vous avez fait du bon travail !
Cette posture, qu’il ne faut pas hésiter à qualifier de sadique, ne vise pas qu’à rassurer les marchés financiers sur la capacité de la France à honorer ses dettes. Elle s’adresse aussi à l’électorat des winners qui aiment leur travail, gagnent bien leur vie, et n’ont pas peur devoir travailler jusqu’à 70 ans, ainsi qu’aux retraités à qui le gouvernement va pouvoir dire fièrement que leur retraite (pourtant déjà lourdement déficitaire) va pouvoir être garantie sans rien qu’on leur demande en échange. Les winners autoproclamés et les seniors épargnés par la réforme, ça doit bien faire une majorité des votants en 2012 …
Pour le peuple, l’enjeu est bel et bien de refuser cette régression sociale programmée qui a aussi pour dommage collatéral de transformer la nature et le statut du pouvoir politique. D’incarnation de sa volonté et défenseur de ses intérêts, l’Etat évolue en père fouettard chargé de lui administrer de gré ou de force la purge prescrite par les bons docteurs du capitalisme mondialisé. Tant que ce nouveau type de pouvoir politique se montre sous les traits de ce président amis des riches qu’on adore détester, pas de problème. L’image est raccord. En revanche, demain tout le monde sait qu’il pourra être incarné par n’importe le premier Papandréou ou Zapatero venu. Et c’est cela aussi qu’on voudrait éviter. Les manifestations sont aussi un moyen de mettre la pression sur le PS, pour qu’il prenne des gages et n’oublie pas.
L’ampleur du mouvement prend alors tout son sens, de même que l’implication de la jeunesse. Ce n’est bien sûr pas pour les revenus de transferts dont elle pourra bénéficier dans plus d’un demi-siècle que les jeunes s’inquiètent, mais pour l’ensemble de leur vie professionnelle qui va s’engager sous les pires auspices. Mais, oui, qu’ils y aillent ! En plus ça leur fera le plus grand bien de se découvrir d’autres préoccupations que le dernier portable à ma mode, leur coupe de cheveux ou l’identité des nominés du vendredi soir.
On regrettera quand même que le message soit encore une fois aussi contestataire et si peu revendicatif. Sans aller jusqu’à exiger de revenir sur les 50 milliards par an d’intérêts sur la dette publique payés indûment aux banques, on pourrait imaginer que la revendication porte plus globalement sur une autre politique, plus ambitieuse et dynamique, qui rechercherait le développement de l’emploi et des salaires, et non plus simplement à gérer les conséquences d’un déclin présenté comme inexorable ou à partager le plus équitablement possible des sacrifices tout aussi inévitables. Mais là, je rêve peut-être un peu …
Pourtant les perspectives de victoire apparaissent bien minces. On n’imagine mal à quelle situation de blocage du pays le mouvement devrait parvenir pour faire plier le gouvernement. Il faudrait jouer la politique du pire, incluant le recours à la violence, les batailles rangées contre les CRS, si possible jusqu’aux martyrs. Il est tout de même douteux qu’il y ait beaucoup de candidats pour l’insurrection et que la colère soit suffisamment puissante pour nourrir une telle escalade, sans qu’un mouvement de rappel à l’équilibre ne se produise dès les premiers vrais dérapages.
Je ne crois pas que les manifestants espèrent vraiment pouvoir obtenir le retrait de la réforme ou même des aménagements substantiels sur les mesures d’âge. Il ne s’agit pas pour autant d’une posture qui permettrait à quelques uns de rejouer aux luttes de classes et aux Français dans leur ensemble, d’accepter la réforme après avoir quelque peu exprimé leur mécontentement pour la forme, le geste ou le symbole, histoire de conserver leur dignité et leur identité. On n’est pas des allemands tout de même ! Les grèves et les manifs, ça fait partie de l’identité nationale !
Mon sentiment est que le peuple est en train de tester actuellement ce qu’il reste de sa capacité à l’insurrection dans le contexte d’individualisme et de résignation actuel. L’atomisation de la société et la vacuité du débat politique permettent-ils encore d’agréger des colères individuelles en un mouvement collectif organisé qui puisse s’ériger en acteur politique et social ? Aujourd’hui, chaque corporation envoie des messages de radicalisation, tout en observant prudemment les réactions des autres. Si les copains y vont aussi, on est prêt à bouger, jusqu’à la grève générale. S’ils se dégonflent, on ne va pas jouer aux héros tous seuls…
Mais que se passera t-il s’il s’avère que la dynamique collective apparaît bel et bien en mesure de bloquer le pays et de faire plier le gouvernement ? Le Peuple va-t-il s’en suffire et s’en souvenir pour des crises futures ou va-t-il céder à la tentation d’user de son pouvoir retrouvé pour démettre ce président tant haï ? Va t-il persister à se définir comme un contre-pouvoir au pouvoir politique légitime qui se succède à l’identique malgré les alternances, juste capable de s'exprimer de temps en temps par quelques révoltes sociales ou électorales ? Ou va t-il prendre conscience que la souveraineté lui appartient et que l’avenir est une page blanche sur laquelle tout peut encore s’écrire ?
Malakine
L'argument des retraités papy-boomers qui n'ont jamais trop galéré a également été avancé par Natacha Polony à Ce soir ou jamais cette semaine.
Il est pertinent, surtout si on les considère comme un corps électoral à draguer pour Sarkozy. Mais je ne suis pas sur qu'il soit nécessaire d'aller jouer sur le terrain de la lutte générationnelle. On parle là de la tranche d'âge 55-75 ans qui vit globalement très bien.
Mais je ne suis pas sur que le façon dont on traite les plus âgés (les dépendants) dans ce pays soit très enviable. Et je trouve ca même particulièrement effrayant et inhumain. Et d'ailleurs les papy-boomers ne sont pas innocents...
Bref, pas de lutte générationnelle, ca ne nous mènera nulle part. Non ?
J'aime aussi l'évocation des "winners" qui me fait tant penser aux étudiants d'écoles de commerce (les ESC) qui pour le coup, eux, sont dans l'insouciance en croyant qu'ils sont du bon coté de la barrière parce qu'ils ont l'espoir de bosser à la Défense. Bon, ça change un peu quand ils arrivent en dernière année et qu'ils se rendent compte que leur job va consister à faire du reporting sur Excel... Mais ca ne les empêchera pas de voter Sarkozy et de mépriser le prolétariat, ne serait-ce que pour sauver les apparences.
Rédigé par : Jb | 16 octobre 2010 à 10:54
@ Malakine
Totalement d'accord, je ne vois pas bien ce que je pourrais ajouter…
Ah si : quand tu dis que tout ça manque de vraies revendications, je ne peux m'empêcher de mettre un lien vers cette interview d'Emmanuel Todd.
http://www.leprogres.fr/fr/france-monde/article/3187674/Emmanuel-Todd-Le-debat-n-a-aucun-sens.html
Je cite :
"Un économiste venu de Mars ne comprendrait pas que la planète France débatte de la manière d'augmenter la durée du travail dans l'avenir pour des personnes ayant déjà un certain âge, alors qu'on ne parvient pas à donner aujourd'hui du travail aux jeunes".
Et je tiens aussi mettre ce lien :
http://www.lalettrevolee.net/article-retraites-non-a-la-reforme-sarkozy-jospin-58793212.html
Ton papier du 8 septembre était excellent aussi :
http://horizons.typepad.fr/accueil/2010/09/la-r%C3%A9forme-des-retraite-entre-mensonges-et-manipulations.html
En gros je rêve qu'on défile plutôt pour le plein emploi ou mieux encore pour le droit au travail, et pour la sortie de l'UE… Faute de quoi tout cela ressemble un peu trop à un théâtre d'ombres.
Rédigé par : Joe Liqueur | 16 octobre 2010 à 12:09
@ Malakine
Il y a une autre charge symbolique. Nicolas Sarkozy mène cette réforme pour montrer qu'il a du courage, qu'il ne va pas céder à la rue, même si dans la réalité, cette réforme ne change pas grand chose au futur équilibre financier des retraites. On est dans la pure posture qui vise à pousser le PS dans une position électorale moins favorable.
L'artificier en chef se prend les pieds dans le tapis qu'il a mis sous les pieds du PS car il a mésestimé la colère des Français à son égard, aux injustices flagrantes qu'il a mises en place et qui interdisent le soutien à cette réforme.
Je n'arrive vraiment pas du tout à sentir ce qui pourrait se passer. Les vacances de la Toussaint vont-elles sauver le gouvernement ?
Je suis d'accord avec toi pour dire que le véritable débat est ailleurs. Pour moi, quelque soit l'issue, Sarkozy le paiera en 2012 (mais pas avant, une démission étant une hypothèse hautement improbable).
Rédigé par : Laurent Pinsolle | 16 octobre 2010 à 12:52
"Mon sentiment est que le peuple est en train de tester actuellement ce qu’il reste de sa capacité à l’insurrection"
Je me pose de plus en plus la question de savoir ce qu'on entend par "le-peuple"?
Je sais que De Gaulle lui faisait une confiance instinctive mais je me demande aujourd'hui de quoi on parle.
De fait, il n'est plus représenté au niveau des partis politiques majoritaires puisque l'UMPS n'est que le bras politique de l'oligarchie apatride qui nous gouverne.
Et quand je vois les réactions de Cédric, je me dis que si le-peuple n'est composé que de gens comme lui, on a du souci à se faire.
Bref, le-peuple c'est qui ?
Rédigé par : RST | 16 octobre 2010 à 14:34
@Cédric
Le peuple souverain français (mais aussi pourquoi pas le peuple espagnol, portugais, néerlandais, etc ...) se décide à manifester son autorité : il n'est pas trop tard !!!
Mais pourquoi ne pas avoir manifesté avec cette détermination lorsque le traité de Lisbonne est venu contrarier le NON massif du peuple au référendum sur le TCE en mai 2005 ? C'était pourtant un symbole encore plus déterminant que celui des retraites puisque notre relation à l'UE conditionne tout y compris les retraites justement (et d'une validité indiscutable par rapport aux nombres de manifestants annoncés par les syndicats).
La réponse me parait simple pourtant : la gauche PS+PRG+Verts était alors dans le même camp que la droite Sarkozyste puisqu'elle a voté majoritairement pour Lisbonne (... logique après avoir appelé à voter OUI au réferendum de 2005).
Enfin c'est amusant :-) en prenant Malakine pour cible tu te trompes d'ennemi puisqu'il est partisan d'un retour à la souveraineté nationale qui s'exprime en toile de fond de ces manifestations (ex : la main-mise de la finance internationale sur l'économie française). Agir c'est bien, camarade, mais le faire à bon escient c'est encore mieux !
Rédigé par : Santufayan | 16 octobre 2010 à 16:49
"Le peuple, se sont des gens qui actuellement subissent (...) la main-mise des agences de notation sur l'économie"
Bon ben alors j'ai fait un rapide sondage et dans mon entourage personne ne se plaint de subir "la main-mise des agences de notation". Cela confirme que je ne fais donc pas partie du peuple.
"Nous allons enfin reprendre les rènes, du moins je l'espère. Ce n'est qu'ensuite que l'on s'attardera sur quoi faire"
Donc "le-peuple" se comporte basiquement comme n'importe quel homme (ou femme) politique. Prenons le pouvoir, on verra ensuite. Et ben c'est pas gagné !!!
Rédigé par : RST | 16 octobre 2010 à 18:52
Ce qui est à ajouter, c'est que les plus de 50
ne trouvant pas de job et n'ayant pas droit à la retraite, n'auront plus que les assedics en cas de perte de boulot. Au bout de 2 ans, c'est l'équivalent du RMI, une bonne affaire pour les finances publiques de rallonger la période du droit à la retraite.
Donc les enfants,faisant des études, de ces futurs rmistes auront encore moins d'aide de leurs parents.
Il est clair que cette réforme est très tordue dans le contexte de chômage élevé des jeunes et des plus de 50 ans.
Elle est très représentative de la perversité de ceux qui prétendent nous gouverner.
Sinon, manifester pour rester au statu quo actuel, ça me parait infantile.
Le mouvement actuel ne fait que contester sans proposer un processus de sortie de crise.
Cedric est très emblématique de cette attitude de réclamant.
Dans ces conditions, les manifestants ne peuvent qu'apparaitre pour des mendiants, et le gouvernement pour un père fouettard, mais un père qui réfléchit, ce qui lui procure une meilleure image que celle de ceux qui s'opposent à lui.
Il y a là un problème de com, encore une fois, malgré toutes les tares de Sarko, il risque de gagner la partie sur ce plan.
Rédigé par : olaf | 16 octobre 2010 à 19:30
> JB
Je ne veux pas donner dans la lutte générationnelle outre mesure, mais je suis bien obligé de constater que la génération du baby boom a été épargnée. Or tout le monde savait qu'elle posait un problème particulier au regard des retraites compte tenu de sa masse démographique. Non seulement ils n'ont pas cotisé à la hauteur des besoins qu'ils susciteront en vieillissant, mais ils partent en retraite en nous laissant un système avec un déficit gigantesque.
Si on reprends les arguments qui justifient la réforme, le déficit actuel (8.5Mds) signifie que les nouveaux retraités n'ont pas travaillé assez longtemps ou qu'ils touchent trop. Or, pour eux rien. Ni réduction du montant des pensions, ni augmentation de l'imposition. Il faut tout de même rappeler que les retraités coûtent aussi au budget de l'Etat entre 7 et 10 Milliards de niches fiscales liées à leur statut (abattement sur l'IRPP, CSG à taux réduit ..)!
C'est cette réforme qui reporte le coût de l'ajustement sur les générations suivantes en exonérant totalement la génération du baby boom, qui porte en elle la lutte générationnelle. Mais le dire c'est faire de la guerre générationnelle ou on peut ?
> Laurent
"cette réforme ne change pas grand chose au futur équilibre financier des retraites." Oui, à court terme ! Mais les mesures d'âge une fois qu'elle passées en pleine application produiront bien des effets, et non pas comme on nous le dit en augmentant le volume des actifs pour réduire la charge des inactifs, mais en organisant une baisse des pensions pour tous ceux qui ne pourront pas partir à la retraite avec leurs annuités pour l'avoir à taux plein.
> RST
Comme j'ai promis de répondre désormais à mes commentateurs avec la plus grande courtoisie, j'ai préféré virer Cédric et supprimer ses messages. Sur le peuple, je te laisse avec ta question :-)
> Olaf
Sarko ne gagnera la partie sur le plan de la com qu'à la condition de convaincre de la nécessité, de la pertinence et de l'équité de cette réforme. Ca ne me semble pas gagné.
Si on entend quelques éditorialistes de droite (dont très étonnamment Eric Zemmour) réciter comme des ânes les arguments préparés par le gouvernement, on entend quand même beaucoup de critiques plutôt bien articulées contre cette réforme. De toute manière Sarkozy a toujours été nullissime en communication gouvernementale.
Rédigé par : Malakine | 17 octobre 2010 à 09:15
Folklore identitaire ou vraie révolte sociale... tu semble défendre la thèse de la révolte identitaire (tester ce qu'il reste au peuple de sa capacité à l’insurrection dans le contexte individualisme). Tu retiens finalement la forme la plus dure moralement et socialement, a mis chemin entre les deux termes de ton titre.
J'ai le sentiment que c'est vraiment ce qui est en jeu, on rejoint R. Debray "comment, au royaume morcelé du moi-je, retrouver le sens et la force du nous..." C'est dommage que ton texte s'arrête là :) Souveraineté populaire ou souveraineté nationale…
Rédigé par : GeoRad | 17 octobre 2010 à 10:35
Totalement d'accord avec votre analyse. Merci.
Rédigé par : Carine | 17 octobre 2010 à 11:38
@ Malakine
Très intéressant ton point sur la lutte des générations, qui prend d'autant plus de sens quand on considère l'électorat de Nicolas Sarkozy. C'est juste pour l'organisation de la baisse des pensions, qui rappelle ce qui se passe sur la santé. On déshabille le système général au grand bénéfice des assureurs et mutuelles.
@ RST
Je crois qu'il y a une différence entre l'opinion instantanée du peuple et la façon dont il vote (il y a un gros écart entre les deux). Entre des élections, les citoyens ne se portent pas forcément à fond sur les sujets, puisqu'ils n'ont pas besoin de le faire. En revanche, lors des élections, je trouve que les Français votent avec beaucoup de sens (même quand ce n'est pas dans le même sens que moi).
Ce n'est pas grave que les Français n'aient pas la même vision que toi sur les agences de notation aujourd'hui. Ce qui compte, ce sera en 2012 ou en 2017 quand ils seront dans l'isoloir. Et je crois que la compréhension des travers du système économique actuel a énormément progressé en deux ans, à notre bénéfice.
Nous aurons besoin de circonstances et d'un homme qui sera capable de catalyser le besoin d'alternative de manière à la fois claire, forte et crédible. C'est la force de la Cinquième République que de mettre un homme au coeur de tout car cet homme peut s'opposer au système.
Rédigé par : Laurent Pinsolle | 17 octobre 2010 à 11:56
Je partage en gros ton analyse.
Sadisme, oui c'est le mot et j'ai l'impression que l'auto-masochisme si prégnant jusque-là est en train de se défaire, lui. Le test, comme tu le dis très bien,vise notamment le PS, qui a été l'instrument de pointe dans ce sens et qui
pourrait bien avoir à changer de ligne (ne serait-ce que par les considérations
électorales les plus banales et les plus raisonnables).
Les derniers avatars de la "pensée" Attali sont significatifs à cet égard. On
voit bien comment la ligne antérieure du PS pouvait se développer vers le
fanatisme le plus radical pour peu qu'elle ait été délestée de tout ancrage
socio-politique et de toute sanction électorale.
Voici aussi quelques observations et impressions de manifestant:
Une chose assez nouvelle dans ce mouvement paraît être la grève d'intensité
moyenne-haute avec tendance à la radicalisation mais à la carte avec grève-manif de semaine et de week-end, avec des gens qui font grève sans manifester et
d'autres qui, vice-versa, se débrouillent pour manifester en aménageant leur
emploi du temps mais sans faire grève (dans un certain nombre de secteurs, faire
grève n'a d'ailleurs guère de sens ou n'est pas possible), avec aussi un côté
manifestation par procuration non plus honteusement vécue mais quasiment
proclamée. Du coup, il est peu pertinent de comparer les journées de
mobilisation, on devrait plutôt les additionner.
Cela correspond un peu d'ailleurs, me semble-t-il, à la façon dont les choses se
passent subjectivement (du moins dans mon entourage). On y va d'abord pour voir, plus ou moins incrédule, puis plus régulièrement et autour de soi de plus en
plus de monde ne trouve pas idiot de mettre les pieds dans les défilés, même si
peu de gens participe à tout (grèves, manifs, AG, blocages...). Après des années
de défiance de soi et d'aquoibonnisme concernant toute action collective, il y a
quelque chose qui bascule ici. Comme j'appartiens à une génération (les
trentenaires) qui a pas mal subi sans beaucoup moufté, j'ai l'impression qu'une
vraie prise de conscience est à l'œuvre en ce moment. Et finalement, ça ne
serait pas étonnant. Après des années d'apesanteur et d'expectative devant la
direction que prendra finalement l'histoire, ma génération est sans doute en
train de se rendre compte qu'elle va prendre (ou plutôt qu'elle a déjà pris) le
réel dans la gueule avec une grande violence, et surtout que l'on n'est pas
devant une parenthèse désagréable prête à se refermer mais devant un tunnel de
restrictions sans fin.
L'autre aspect à souligner, c'est l'étendue en terme de classes sociales du mouvement et l'union privé-public, comme si là aussi l'atomisation manifeste jusque-là s'estompait. Ce que j'avançais en terme de générations (la fin d'une certaine atonie déprimée) est valable aussi de ce point de vue notamment. Ceux qui se sentaient protégés hier (et étaient enclin à beaucoup accepter, surtout si les choses ne concernaient que les ouvriers et les employés), sentent et savent
qu'ils ne sont plus. De l'autre côté, Sarkozy a tellement tapé sur ces derniers,
que les prolétaires ont quand même beaucoup moins tendance à les considérer
comme des privilégiés. Au bout du compte, il y a encore beaucoup de réticences
réciproques, mais aussi le sentiment d'une solidarité objective paraît en bonne
voie pour s'étendre.
Reste à voir où tout cela peut mener, et ma foi je n'en sais trop rien, mais en
regardant autour de moi une nouvelle fois, il me semble en tout cas que le
mouvement a encore pas mal de réserves.
Rédigé par : Emmanuel B | 17 octobre 2010 à 13:21
Post scriptum:
Sur l'aspect générationnel, il y a sans doute une lutte, mais c'est peut-être l'indifférence qui est le facteur déterminant finalement .
Pour le cas de Zemmour, je ne suis guère étonné pour ma part. Avant d'être patriote, protectionniste ou quelque autre qualificatif qu'on voudra, son positionnement médiatico-politique est d'abord d'être "dedroâte" et de toute évidence, manifestations et grèves du moment sont complètement "degôche" dans leur expression et leur style.
En bon déconstructeur systématique de l'hideuse bienpensance "degôche", il ne pouvait guère laisser passer l'occasion de taper sur un mouvement qui manifeste, c'est un fait, un certain nombre des travers et ridicules qu'il prétend pourchasser sans pitié. Comment s'empêcher par exemple d'entonner le couplet toujours porteur du jeunisme nécessairement à l'œuvre? Et tant pis s'il faut rejoindre l'orthodoxie libérale la plus éculée par ailleurs.
Rédigé par : Emmanuel B | 17 octobre 2010 à 14:46
Bonjour,
Cette analyse originale est très bonne. Il se passe en effet quelque chose en ce moment, mais difficile de savoir quoi : une mobilisation totale (et légitimée par les sondages) mais depuis la base et par intermittence.
Ton idée d'un "peuple" qui a perdu conscience de sa capacité de mobilisation et qui se cherche me semble la plus adéquate. C'est très bien trouvé...
J'ajouterai que le phénomène des manifestations distinguent désormais entre les très grandes métropoles intégrées dans la globalisation, qui manifestent relativement peu par rapport aux petites cités provinciales ou de banlieue qui subissent de plein fouet les effets du libre-échange.
Les ratios manifestants/population (même en se basant sur les chiffres de la police) sont étonnants, et dénotent un mouvement profondément ancré dans la population, ce qui expliquerait aussi pourquoi les leaders politiques et syndicaux soient dépassés par la base, et pourquoi la mobilisation est de ce type "parcellaire" (je te fais confiance pour trouver des images chimiques à ce phénomène de "précipitation/aggrégation" temporaire et aléatoire).
Pour finir sur la question des générations, je me permets de renvoyer aux travaux de Chauvel, qui planche dessus depuis des années, et dont les conclusions sont sans appel et accablantes pour les gouvernements qui se sont succédés depuis 1975 en France :
http://www.louischauvel.org/
Cordialement
Rédigé par : Verdun | 18 octobre 2010 à 10:04
> Georad
C'est vrai qu'en général, j'évite les titres et les conclusions interrogatives, mais en l'espèce il est vraiment difficile de trancher. La vérité est entre les deux. Au jour d'aujourd'hui, on pourrait dire que c'est une tentative de révolte sociale condamnée à l'échec. Mais attendons ...
> Carine
Merci !
> Laurent
Ton culte dans l'homme providentiel, ta foi en la personnalisation du débat et en l'élection présidentielle me remplit d'effroi à chaque fois. J'ai sincèrement peur que tu tombes de très haut un jour lorsque tu verras, élections après élections, que le système politique ne sélectionne plus que des incompétents notoires et que le système médiatique interdit désormais tout débat de fond.
> Emmanuel
Il est intéressant de mettre ton commentaire en parralèle avec celui de JB. Lui était hostile à l'idée de lutte générationnelle, mais toi tu vois dans la prise de conscience des classes générationnelles un motif de révolte. C'est un bon sujet de réflexion ça ...
> Verdun
Et si on abandonnait un peu le verbiage toddien et que l'on parlait plutôt de désindustrialisation ? A mon sens, compte tenu du poids désormais prépondérant de l'économie résidentielle sur l'économie productive, les cités provinciales sont beaucoup plus dépendantes aux transferts publics et sociaux qu'à l'emploi industriels. La purge budgétaire qui est en cours risque d'être bien plus dévastatrice que la désindustrialisation pour les villes de provinces.
Je crois que je vais revenir bientôt sur cette question générationnelle.
***
Au fait, samedi, j'y étais. La preuve, on m'a vu ... http://www.superno.com/blog/2010/10/nen-deplaise-aux-propagandistes-la-mobilisation-etait-en-hausse-hier-a-metz/
Rédigé par : Malakine | 18 octobre 2010 à 10:58
Plaire aux winners sans déplaire aux Séniors, fait parti à coup sur de la posture présidentielle. Mais alors que les séniors devraient adhérer à titre collectif à une réforme qui les épargne, à titre individuel, ils sont aussi des parents ou grand-parents solidaires de leurs proches qui galèrent déjà ou pour lesquels ils voient l'avenir s'assombrir. Il y a plus une solidarité inter-générationnelle (souvent limitée aux sentiments, certes) qu'un conflit générationnel.
Quant à la sortie de crise, et puisque, chez moi, le début de pénurie de carburant donne tout de suite une coloration "Mai 68" à ce mouvement social, je suis aussi très perplexe. Si la ressemblance s'arrête très vite, il n'empêche que l'issue me parait aujourd'hui aussi incertaine, car je n'imagine pas l'élu de 2007 accepter un recul ou un compromis néfaste au candidat de 2012...
Rédigé par : PeutMieuxFaire | 18 octobre 2010 à 12:00
Il semblerait que les Chinois nous ai bien compris:
http://www.youtube.com/user/fr000tch#p/a/u/0/mSSuaz3imXg
Saludos.
Rédigé par : ETDAS | 18 octobre 2010 à 12:07
Xavier,
Désolé pour le verbiage toddien, mais je faisais surtout référence au livre "recherche le peuple desespérément" de Brustier et Huelin (d'accord ce n'est pas loin de Todd ;-)).
N'oublie pas que nous sommes plusieurs à attendre tes développements sur la question protectionnisme/libre-échange.
Enfin, la question générationnelle est à mon sens très intéressante et permet de réaliser pas mal de choses (mais pas dans le sens d'un conflit nécessairement).
J'ai lu pas mal des travaux de Chauvel, et le moins que l'on puisse dire, c'est que cela "décoiffe" parfois !
loin des idées reçues en tout cas...
Sinon, à Marseille, c'est l'acmé de la crise... la vue sur la rade est proprement stupéfiante (on dirait une flotte d'invasion qui vient de débarquer, les ballons captifs en moins).
Pour revenir sur la gestion de la crise par le gvt, je trouve qu'ils ont envoyé les CRS sur les barrages un peu vite (le mouvement dans les raffineries en était à ses débuts et il n'y avait pas encore de "pourrissement"), et surtout que la com' gvernementale (sur les lycéens manipulés, sur l'essence qui ne manque pas...) est en train de devenir une catastrophe.
Nul ne sait comment cela peut tourner...
Cordialement,
Rédigé par : Verdun | 18 octobre 2010 à 13:24
@ ETDAS
Je ne suis pas sûr que ce ne soit pas un mauvais montage (il y en a déjà eu)... Quelqu'un sait parler/lire le chinois ?
Rédigé par : Verdun | 18 octobre 2010 à 13:26
A propos de la "chinoiserie" vidéo-ironique, ce n'est pas un mauvais montage mais un détournement tout ce qu'il y a de plus classique, dans la lignée directe du célèbre "La dialectique peut-elle casser des briques?". Pas mal d'ailleurs ce nouveau détournement. Bien visé.
Rédigé par : Emmanuel B | 18 octobre 2010 à 14:15
> PMF
Il est clair que personne n'imagine Sarkozy retirer sa réforme, ce qui est d'ailleurs assez inquiétant si le mouvement devait s'amplifier. On se demande bien quelle porte de sortie il va pouvoir inventer, d'autant qu'il ne peut même pas faire sauter son premier ministre puisqu'il a déjà annoncé son départ depuis des mois !
> Verdun
En ce qui concerne, mes "bouts d'essai" je viens de finir un nouveau plan et j'ai bien l'intention de reprendre tout depuis le début. Ceci dit, je pourrais toujours publier des chapitres de temps en temps, notamment sur la question du protectionnisme où je crois vraiment avoir une approche nouvelle de la question à mettre au débat. Je vais peut-être faire une exception et traiter ce chapitre avant de revenir au point de départ.
A propos du verbiage Toddien, je signale que Hakim El Karoui vient de sortir un nouveau bouquin. Je l'ai commencé ce week end et j'en ferais une note de lecture. J'espère ne pas être aussi méchant que je l'avais été pour "recherche le peuple ..." J'ai toujours eu de l'amitié pour Hakim :-)
> ETDAS
Je ne peux pas voir les vidéos depuis le bureau, mais je crois que j'ai déjà vu cette vidéo. Enfin, je verrais ça ce soir ...
Rédigé par : Malakine | 18 octobre 2010 à 15:26
@ ETDAS
La vidéo est un "fake", c'est une critique de la situation française actuelle, et en passant de Mélanchon (Mehlang Chang). Un "fake" plein de vérité...
http://www.facebook.com/home.php?sk=lf#!/mehlang.chang
Rédigé par : GeoRad | 18 octobre 2010 à 15:27
Il y a bien une solution : comme le changement de gouvernement ne peut être efficace, eh bien il reste la dissolution !!!
La gauche gagne alors les législatives mais hérite du bébé très très mal en point et Sarko rebondit en 2012 !
Rédigé par : PeutMieuxFaire | 18 octobre 2010 à 15:38
Je trouve l'analyse de Malakine excellente, et j'ajouterai qu'elle m'a ouvert les yeux sur certains aspects des choses.
Maintenant, permettez-moi de m'essayer à l'art difficile de la prophétie ( de nos jours on dit prospective mais c'est la même chose ):
2012, premier tour : effondrement de Nicolas Sarkozy et destruction de l'UMP, toutes tendances confondues. Si cela n'a pas lieu, en tous les cas, ce ne sera pas de ma faute, et pourtant j'ai voté pour Nicolas Sarkozy en 2007.
Deuxième tour : duel entre le PS et un ou plusieurs partis souverainistes. Victoire probable du PS, suivie de sa disparition pure et simple, vomi par les électeurs, avant même la fin du quinquennat. Causes : les mêmes que pour l'UNP ; il n'y a d'ailleurs pas la moindre différence réelle entre les deux partis, sauf que les uns regardent "Rue89" et les autres "Le Figaro Madame".
Ensuite guerre civile en France ( la classe politique toute entière ne voit aucun intérêt à tenir le moindre compte du Peuple qui est pourtant son Souverain ), sur fond d'écroulement du dollar et donc des Etats-Unis et donc d'Israël ( je ne parle pas d'Israël par obsession sionniste ou antisionniste, mais à cause des conséquences évidentes de la chute de cet Etat ou même seulement de sa mise en danger réelle, pas imaginaire ), d'écroulement de l'Union Européenne et de crise du pétrole et des matières premières. Je suis désolé d'avoir à le dire ( vraiment désolé parce que je ne vois pas ce qu'il faut en penser, sauf qu'il n'y aura pas de nuances : ou bien le meilleur ou bien le pire ) mais nous entrons dans une période de bouleversements planétaires. Angoisse...
Je maintiens ce que j'ai déjà dit à propos de DSK : il ne sera pas candidat. Il faudrait qu'il soit complètement idiot, et il ne n'est pas, pour qu'il aille se fourrer dans l'horrible bouzin que sera la Présidence de la République Française de 2012 à 2017 alors qu'il lui suffit de rester paisiblement à Washington surtout sans rien faire pour palper 450 000 dollars par an nets d'impôts, sans même avoir à boutonner sa braguette pour le prix ! Qu'est-ce que vous feriez à sa place, vous, hein ? Attention, y a la secrétaire qui passe dans le couloir ! Sans rire, maintenant. S'il choisit la France nous aurons tous du souci à nous faire, parce que cela voudra dire qu'il parie contre le dollar, son salaire de référence. Cela voudra dire en même temps qu'il n'est pas assez intelligent pour voir arriver l'éclatement de la Zone Euro. Angoissse...
Rédigé par : Sancelrien | 18 octobre 2010 à 16:10
> Sancelrien
Bravo ! Je partage pleinement les conclusions de ton exercice de prospective !
Sur DSK je pense comme toi, sauf que Laurent Pinsolle me fait hésiter en affirmant que la reconduction de son bail au FMI n'a rien de certain. Probablement qu'on voudra un non-européen à la tête de cette institution en 2012 pour montrer que désormais c'est la Chine qui mène le jeu monétaire compte tenu des réserves de changes accumulées par ce pays. S'il ne peut se maintenir au FMI, il reviendra en France.
Mais sinon c'est vrai que j'angoisse aussi à l'idée que les socialistes reviennent au pouvoir et doivent appliquer ici la purge libérale comme Papandréou ou Zapatero l'ont fait dans leur pays. Comme je le dis dans ce papier, l'image du pouvoir politique devenu sadique est raccord avec les personnalité de Sarkozy. Avec les socialistes au pouvoir ça sera infiniment plus douloureux pour nos compatriotes.
Au fait, je peux te demander ce qui dans ce papier t'a "ouvert les yeux" ?
Rédigé par : Malakine | 18 octobre 2010 à 22:58
@Sancelrien:
Je pense que ton raisonnement (et celui de quasiment tout le monde d'ailleurs) se situe dans le cadre ou rien de grave et décisif n'arrive dans le monde d'ici 2012.
Et là, au vu de la tournure que prennent les évenements aux états unis, je ne parierai pas ma chemise.
Ce qui se passe de vraiment important en ce moment, c'est la guerre des monnaies avec le QE2 de Bernanke, ainsi que les mid term elections.
Il y a une chance non négligeable que le système financier de wall streeet et de la city s'effondre brutalement.
Vu le degré d'inbrication des banques, notre pays pourrait des lors connaitre la "grève du cash" auprès de laquelle le blocage actuel fera figure d'aimable plaisanterie.
Si on en vient là, les élections...
Rédigé par : Roland | 19 octobre 2010 à 02:07
Ce n'est pas une "vraie révolte sociale" a proprement parler.
Dans l'arbitrage sur la question "faut-il réformer la retraite avec le recul de l'age de départ" selon la raison qu'a donné hier le président Sarkozy "la France s'y est engagé" sous-entendu "afin de rassurer les marchés financier et éviter une dégradation de sa note" la réponse de la population française est : "non".
Cette décision populaire n'est pas "une révolte" c'est une décision souveraine d'une autorité constitutionnelle puisque qu'en France "la Cour suprême, c'est le peuple." (De Gaulle)
Il ne s'agit pas de "mater une révolte" ou "céder à la pression de la rue" mais de considérer "Vox populi, vox dei" que la question est close sur ce point.
Maintenant tout le travail reste à faire. C'est à dire deux chose au moins :
- Trouver un substitut au principe de la "croissance à crédit". Et cela concerne la politique monétaire et fiscale ;
- Trouver une solution au problème de la "croissance sans emploi" et alors développer une politique économique favorable au plein emploi. Une politique économique qui passe elle-aussi par des ajustements monétaires, fiscaux, tarifaires et à terme une ré-actualisation de la coopération économique internationale.
Encore une fois la France est à la pointe de la modernité. Il n'y a qu'un peuple philosophe et citoyen qui puisse se distinguer ainsi.
Il lui reste maintenant à ajuster ses institutions et se garantir de tels désordres par un système plus démocratique, en s'inspirant du modele helvetique avec gouvernement collégial et pluraliste et un contrôle efficace des lois par le référendum (à distinguer du plébiscite binaire oui/non).
Rédigé par : patriote | 19 octobre 2010 à 07:23
@Malakine :
"Pour le gouvernement, l’enjeu est bien de se montrer capable de violenter le peuple de la manière la plus visible possible et ainsi donner des gages à l’oligarchie mondialisée pour qui l’austérité généralisée et la régression sociale constituent la condition pour continuer à s’enrichir dans un contexte global de stagnation économique. C’est d’ailleurs pourquoi le gouvernement se réjouit si bruyamment (jusqu’ici) de l’ampleur des manifestations au motif qu’on mesure l’ardeur d’une réforme à l’ampleur des mobilisations qu’elle suscite… Le Peuple est choqué, scandalisé. Il se sent trahi et martyrisé. Bravo Messieurs, vous avez fait du bon travail !"
Je n'avais pas pensé à cela.
J'ajoute que quand je parle de "guerre civile", c'est parce que les nombreux Français qui se sont laissés séduire par l'idéologie hyperlibérale-mondialiste n'accepteront jamais l'arrivée au pouvoir d'un mouvement souverainiste, peut-être même avant 2017 ( je ne suis pas sûr qu'un Président ou une Présidente socialiste puisse durer jusque là ).
Je m'attends donc à des évènements très violents.
Rédigé par : Sancelrien | 19 octobre 2010 à 07:48
> Roland
Vous faites allusion au scandale des "forclosures" ? http://www.moneyweek.fr/20101041585/conseils/economies/immobilier-foreclosure-gate/
> Patriote
Effectivement, ce qui est (peut-être) en train de se jouer là est le réapprentissage de la souveraineté. C'est bien ainsi que je conclue mon article.
Cependant le processus ne sera vraiment complet que lorsqu'on entendra dans les manifestations ou sur les plateaux de télévision traiter des deux problématiques dont tu parles.
Un gouvernement collégial à la suisse ?? Curieuse proposition pour un gaulliste, non ?
> Sancelrien
Tu n'y avais peut-être pas pensé mais tu l'avais ressenti. J'en suis sûr. C'est quelque chose dont je me suis rendu compte au fil des ans. Mes billets qui ont le plus de succès c'est ceux où j'arrive à mettre des mots sur des idées qui sont dans l'air. En l'espèce, je crois sincèrement que c'est ce sentiment de trahison qui explique la violence du rejet de la réforme.
Et pour finir de "t'ouvrir les yeux" tu sais à partir de quel évènement on peut dater l'évolution sadique du pouvoir sarkozyste ? Car il n'a pas toujours été pour la rigueur, bien au contraire. Il y a encore un an on parlait du "grand emprunt" pour préparer la croissance de demain et investir dans l'avenir ...
Rédigé par : Malakine | 19 octobre 2010 à 11:07
"Errare humanum est" De Gaulle n'était pas un dieu mais un homme.
Il est vrai que j'ai beaucoup d'attachement pour le personnage public mais sans aller jusqu'au fanatisme.
Je considère qu'il a pu commettre quelques erreurs. La proposition candide d'une armée de métier (dans ses jeunes années), l'affaire personnelle faite au sujet du référendum de 69, sont des prises de position criticables.
Mais c'est surtout dans la constitution de 1958 et la réforme de 1962 sur l'élection du président au suffrage universel on trouve une série de dispositions qui font du texte une copie troublante de la constitution de Weimar (l'autonomie régionale en moins) qui me gêne le plus.
Le pouvoir executif trouve ici des arguments qui causent des conflits de légitimité et de compétence et des sources d'abus avec les autres pouvoirs qui se retrouve réduits et menacés (législatif godillot ou dissous) ou écrasés (l'autorité judiciaire n'est pas institué comme pouvoir a part entière) et l'autonomie régionale (autre séparation du pouvoir) n'est pas garantie (par un partage clair des compétence législatives par ex.) et l'expression de la volonté générale soumis au bon vouloir d'un plébiscite organisé par le ministre de l'intérieur, excusez du peu.
Je m'autorise alors dans ces conditions à émettre quelques réserves et à partager quelques inquiétudes.
Rédigé par : patriote | 19 octobre 2010 à 13:10
@Malakine: Je parlais en termes généraux, l'histoire des foreclosures étant la cerise sur le gateau. Soyons clairs, le bordel actuel nous vient des USA, de la politique de basse pression salariale et de l'emploi du crédit comme béquille à la consommation. Après 3 ans de dégringolade, toutes les cartouches ont été tirées et l'impuissance est générale. Nous vivons un moment d'histoire, un empire s'écroule.
Le problème, c'est que nous somme copains copains avec cet empire vacillant. Pire, nous sommes associés étroitement, via l'europe et le système bancaire.
Les élections de mid term vont certainement aboutir à un blocage institutionnel du pays et une fuite en avant par l'émission massive de monnaie par la fed, entrainant une nouvelle chute du dollar et par conséquent une revalorisation de toutes les autres monnaies. Les investisseurs se reportent sur les bric et les matières premières en espérant sauver leur cul (pardon). Mais bien que la chine continue d'éponger les bons du trésor américains, la aussi les limites ont été trouvées. La fed ne sait plus à qui elle va refiler sa camelote.
Bref, la faillite approche à grand pas. Comme le $ est LA monnaie de change internationale, le bordel étatsunien contamine progressivement le monde entier. C'est ca la guerre des monnaies. Les bric ne veulent pas voir leur monnaie se réévaluer pour conserver leur compétitivité, et tous ceux qui ont des réserves de change libellées en dollars cherchent discrètement à les convertir en autre chose, n'importe quoi. D'ou le yoyo des cours sur les principales matières premières.
Mais la masse de dette étatsunienne en circulation est telle qu'il y aura forcément des baisés quand la valeur du dollar approchera de zéro (ce qui est de toutes façons le cas, la crédibilité d'un débiteur ne tenant qu'a la bonne humeur de ses créanciers)
Cette situation est désespérée et non rattrapable, il faut un nouveau système des monnaies et des parités pour le monde, mais le pouvoir de nuisance des EU n'est pas encore éteint, loin de là et ils bloqueront toute évolution les démasquant tout en continuant à foncer dans le mur à mach 2. C'est ce qu'ils font depuis le début de la crise (et même avant si on y regarde bien. C'est un Empire).
Comme nous sommes collés à leurs basques, que nous avons gobé la mondialisation, puis la répartition de la production, puis le choc des civilisations, puis l'économie dette (rappelez vous que leader minimo voulait une France de proprios à la sauce subprime), on est cuits aux petits oignons. Nous sommes également embringués dans le "grand marché transatlantique" (sic) cad une fusion totale des économies européennes et américaines (2015).
Voila, comme les bas nylon, les camel et le coca, les américains nous ont refilé leur dernier bébé, l'implosion par abandon de la production de biens réels et l'endettement massif. On est arrivés au bout du chemin.
Rédigé par : Roland | 19 octobre 2010 à 19:10
@ Roland.
Ils ne leur restent qu'une cartouche...
Celle pour laquelle ils dépensent encore plus que le reste du monde réuni!
Celle qu'ils expérimentent "Harp" et autres...
Celle qu'ils ont toujours utilisé à proportion de leur difficultés!
Cette cartouche la, ils n'auront eux, contrairement aux dirigeants soviétiques, je le crains aucun scrupules à la tirer.
C'est dans leur nature!
La fin d'un monde ou la fin du monde?
Rédigé par : ETDAS | 20 octobre 2010 à 00:10
@ETDAS:
J'ai un doute... Ils en ont les capacités, oui mais pas forcément la possibilité.
Le lobby militaro-financiaro-politiquo... on sait plus trop est bel et bien dans l'oeil du cyclone et l'effondrement financier va transformer très rapidement les F35 en beaux tas de rouille. Il y a actuellement un article très intéressant sur le renouvellement des matériels militaires et leur cout exponentiel sur contre info.
Pour la guerre traditionnelle, on sait tous que les us sont des burnes et qu'ils se sont fait sortir de presque partout ou ils ont guerroyé. Reste la surenchère nucléaire, mais contre qui? La chine? Pour quels résultats?
Non, je pense plutôt que la haute finance est foncièrement apatride et qu'elle va tenter de se recycler la ou il y a de la croissance et du pognon à gagner.
Ils laisseront crever sans scrupules ces braves étazunis qui pourtant les ont bien servi pour aller se poser ailleurs. Ce ne sera pas la première fois. Ce qu'Attali (un gros mot!) appelle dans sa novlangue le déplacement des cercles de pouvoir. Suivez le pognon...
MAIS, car il y a un mais, l'effondrement états unien va démonétiser une grande partie des richesses fictives crées depuis des lustres. M'étonnerait pas que dans les baisés on compte les militaires qui sont d'éminents spécialistes dans l'art de bouffer un pognon fou pour pas grand choses sommes toutes.
Amicalement et merci à Malakine pour la tribune un peu hors sujet :)
Rédigé par : Roland | 20 octobre 2010 à 02:12
> Patriote
Très intéressant. Je suis également assez critique sur la logique de nos institutions, mais non pas pour le primat du pouvoir exécutif (rebaptisé dans la Vème de "gouvernement") mais essentiellement pour la personnalisation du pouvoir qu'il implique. Lorsque le système politique pouvait sélectionner des personnalités d'exception cela pouvait se justifier. Mais aujourd'hui à l'époque de la vidéocratie c'est une véritable folie. Non seulement les médias tendent à ne plus sélectionner que des clowns mais la logique institutionnelle pousse à gouverner au caprice, au coup de tête et à développer la logique électoraliste dont je parle dans mon dernier billet (celui que tout le monde refuse de commenter)
> Roland / ETDAS
Je suis content d'avoir trouvé plus anti-américain que moi. Ah non c'est vrai, ETDAS qui me surpasse. J'ai encore en souvenir le post où tu avais rappelé ville par ville le nombre de morts Français causés par les bombardements américain ! :-)
Plus sérieusement, oui, la situation des Etats-Unis est inquiétante. Après la folie des années Bush on a aujourd'hui un président plus raisonnable mais rien ne dit qu'on ne repartira pas dès 2012 dans un délire encore plus inquiétant. Et oui, une fuite en avant militaire n'est pas du tout à exclure.
Sur le point particulier du "quantitative easing" je reste perplexe. Apparemment c'est une technique de relance économique que les USA voudraient voir appliquer aussi en Europe. Je suis sur ce point dans l'attente d'avis éclairés.
Rédigé par : Malakine | 20 octobre 2010 à 10:31
Comme le dit Marcel Gauchet, l'histoire est un grand cimetière d'apocalypses et celle que vous envisagez, Sancelrien et toi, a les plus grandes chances d'aller rejoindre les autres dans la remise. Difficile de ne pas être tenté de prolonger les perspectives autant qu'on peut, pourtant on sait bien que les choses ne se passent jamais ainsi.
Rédigé par : Emmanuel B | 20 octobre 2010 à 12:18
Elle me semble rejoindre ton analyse, à savoir que ce mouvement social ne cible pas tellement l'intérêt des djeuns :
http://www.telos-eu.com/fr/article/jeunes-pensez-d-abord-a-vous
Rédigé par : olaf | 20 octobre 2010 à 20:33